Solutions alternatives aux antibiotiques : sera-t-il possible d’utiliser l’oxyde de zinc en France chez le porcelet ? - La Semaine Vétérinaire n° 1503 du 06/07/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1503 du 06/07/2012

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/PORCS

Auteur(s) : BÉATRICE BOUQUET

CONTEXTE

Dans de nombreux pays, l’oxyde de zinc est largement utilisé à dose élevée, lors du sevrage, pour contrôler les diarrhées colibacillaires et la maladie de l’œdème.

À ce jour, l’oxyde de zinc n’est pas autorisé en France. La question est cependant à l’étude en raison de son efficacité établie pour le contrôle des colibacilloses au sevrage. L’utilisation de cette molécule permet d’éviter, en particulier, le recours à la colistine. Dans ces conditions, quel statut donner à l’oxyde de zinc ? Telle était la question subsidiaire de la commission porcine lors du congrès de la SNGTV à Nantes en mai dernier.

Paule Carnat-Gautier (DGAL1) rappelle que l’oxyde de zinc est actuellement autorisé en tant qu’additif alimentaire en croissance-finition, à un taux maximal de 150 ppm, afin de couvrir les besoins physiologiques des animaux. Au Danemark, il est utilisé pour prévenir les diarrhées chez le porcelet, à hauteur de 2 500 à 3 000 ppm pendant une quinzaine de jours, sous forme de prémélange extemporané. Il disposerait dans ce pays d’une AMM2, mais avec un statut un peu particulier. Les Danois ne sont pas enclins à élargir leur AMM à l’échelle européenne.

DISCUSSION

En France, l’Anses3 a été saisie sur la possibilité d’employer l’oxyde de zinc. Outre la recherche du meilleur statut pour cette substance (médicament ou matière première ?), les experts s’interrogent sur l’écotoxicité des effluents associée à son administration.

Un aliment médicamenteux serait toutefois soumis à la concurrence des matières premières commercialisées pour d’autres usages, en particulier comme asséchant des litières.

« Faire entrer l’oxyde de zinc dans une case sera difficile », témoignent à l’unanimité les intervenants vétérinaires en filière porcine. Les indications même de cet usage, à forte dose pendant une durée limitée, avec une indication clairement médicale, le place de fait dans la catégorie des médicaments vétérinaires, souligne Arlette Laval (Oniris). Comme pour toute AMM, le produit devra alors satisfaire aux exigences du dossier “écotoxicologie”. Néanmoins, certains praticiens précisent que, en limitant l’indication au premier âge (postsevrage) et en diminuant l’apport en finition, les volumes utilisés sont réduits en conséquence. Ils ont donc un impact moindre via les effluents.

Reste qu’il est urgent de sécuriser la qualité des matières premières qui circulent à ce jour et qui “se retrouvent” dans les rations des porcelets. Les taux de métaux lourds seraient parfois mal contrôlés dans ces produits à la composition opaque.

Philippe Le Coz, président de la commission “porc” de la SNGTV, propose d’intégrer un produit qui n’est pas un aliment médicamenteux dans la même chaîne que ceux-ci. Cela autoriserait des contrôles de qualité et de quantité. C’est déjà le cas au Danemark. Le statut de l’oxyde de zinc y est particulier parce que celui-ci est prescrit systématiquement de façon extemporanée, mais de 2 façons : soit pour le premier âge à partir d’une liste de marques définies, soit sous forme de poudre incorporée dans l’élevage ultérieurement, donc sans apparaître officiellement en tant que prémélange médicamenteux.

LES TRAVAUX DE L’ANSES

Paule Carnat-Gautier témoi­gne que toutes les possibilités sont « sur la table de travail de l’Anses (…), y compris la modification du taux d’incorporation actuellement fixé à 150 ppm en croissance-finition ».

Ce dossier a un caractère d’urgence, insistent les praticiens. Il donne lieu à des « distorsions de concurrence » en association avec la limitation de l’usage des antibiotiques. Cette question peut devenir cruciale du jour au lendemain si des restrictions sont apportées à l’usage de la colistine, considérée comme le dernier recours en médecine humaine pour certaines infections colibacillaires, voire salmonelliques. Au Danemark, la part de la colistine est passée à 1 %, rapporte Fabien Larcher (Chêne Vert Conseil), en raison de l’utilisation systématique d’oxyde de zinc dans les premiers 14 jours postsevrage, tandis qu’en France elle s’élève à 33 %.

La réponse de l’Anses à la saisine est attendue pour la fin de l’année 2012. Ce sera ensuite à la DGAL de statuer.

Pour accélérer les choses, la possibilité d’une ATU4 débouchant sur une AMM a été évoquée. « Il faut un dossier de fond plus solide », estiment les experts. L’oxyde de zinc est une solution à moyen et non à long terme, relativisent les vétérinaires praticiens.

L’ATU représenterait une solution en cas de nécessité, comme ce fut le cas pour la bacitracine chez le lapin, précise Arlette Laval. « Il serait tout à fait possible pour un laboratoire de démontrer l’efficacité de l’oxyde de zinc, mais il faudra encore satisfaire au dossier écotoxicité. » À ce jour, les firmes pharmaceutiques vétérinaires susceptibles de “porter” un tel dossier ne se bousculent pas.

Source : discussions en marge de l’atelier “porc” lors des journées nationales des GTV, à Nantes le 23 mai dernier.

  • 1 Direction générale de l’alimentation.

  • 2 Autorisation de mise sur le marché.

  • 3 Agence nationale de sécurité sanitaire.

  • 4 Autorisation temporaire d’utilisation.

Voir aussi

P.S. REVY et coll. Inra Prod. Anim., 2003, 16 (1), 3-18, « Le zinc dans l’alimentation du porc : oligo-élément essentiel et risque potentiel pour l’environnement ».

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