Les vétérinaires gaulois tiennent le cap ! - La Semaine Vétérinaire n° 1502 du 29/06/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1502 du 29/06/2012

Dossier

Auteur(s) : FRANÇOISE SIGOT

Sur les terres qui ont vu naître la première école vétérinaire de France, les praticiens du Rhône exercent leur activité sur fond de conditions économiques chaque année un peu plus tendues. Principalement canins, les vétérinaires rhodaniens parviennent toutefois à préserver quelques bastions ruraux au sein de leur département.

Terre de paradoxe, le Rhône figure au premier rang des 88 départements de la France de province, hors Île-de-France, pour sa densité de population (524 habitants par kilomètre carré). Avec une popu­lation estimée à quelque 1,8 million d’habitants, le Rhône est le troisième département le plus peuplé, derrière le Nord et les Bouches-du-Rhône. En revanche, par sa superficie (3 249 km2), il occupe l’avant-dernière place, devant le territoire de Belfort.

Hyperurbanisé (97 % de sa population vit dans un espace à dominante urbaine et les trois quarts dans le grand Lyon, communauté urbaine la plus peuplée de France), le Rhône est aussi l’un des départements où les disparités de revenus sont les plus fortes. Les derniers territoires encore ruraux et les banlieues de l’est de la capitale des Gaules affichent des revenus moyens très bas, à l’opposé de l’hypercentre de la ville et des communes résidentielles des Monts-d’Or où le niveau de vie est en constante augmentation.

Le département s’accommode néanmoins plutôt bien de ses spécificités, qui marquent évidemment l’exercice des vétérinaires qui ont choisi de s’y implanter. Ils sont 455 au total. Parmi eux, près de 300 exercent en libéral, au sein de 139 cliniques et cabinets, et plus de 100 sont salariés d’un laboratoire pharmaceutique, une des particularités du département qui abrite notamment le siège et de nombreuses activités de production et de recherche de Merial, gros consommateur de compétences vétérinaires.

LE POIDS DE L’HISTOIRE

Mais une autre – et pas la moindre – des spécifici­tés de l’exercice vétérinaire dans le Rhône reste bien entendu la présence de VetAgro Sup. La plus ancienne école vétérinaire de France, créée par Claude Bourgelat en 1761, accueille chaque année 110 étudiants qui reçoivent une formation initiale en 5 ans les conduisant à la thèse d’exercice vétérinaire. Le campus lyonnais dispense aussi des formations de spécialisation (internats et résidanat) et participe à la formation continue des praticiens. Il offre enfin des programmes de formation paravétérinaires.

VetAgro Sup accueille également des étudiants étrangers via sa participation aux programmes d’échanges européens et par une relation forte avec les universités nord-américaines, dont celle de Montréal. Installé à une vingtaine de kilomètres du centre de la capitale des Gaules, au cœur d’une des grandes zones périurbaines du département, le campus tient à rester un lieu ouvert, notamment en multipliant les liens avec les libéraux. « Nos relations sont faites de hauts et de bas », concède Stéphane Martinot, directeur géné­ral de VetAgro Sup. Une vieille histoire d’amour et un peu parfois de désamour, car l’école lyonnaise a de tout temps réservé des places aux libéraux au sein de son conseil d’administration et des conseils de départements. De quoi favoriser les échanges, fussent-ils parfois un peu tumultueux ! Ainsi, à ceux qui voient d’un mauvais œil nombre d’urgences et de cas référés prendre la direction de l’école, son directeur répond que les accréditations de l’établissement sont soumises à l’existence d’un service d’urgences et qu’il ne pratique pas de dumping sur les tarifs. Quant aux équipements présents sur le campus, qui conduisent VetAgro Sup à devenir une place forte des cas référés, Stéphane Martinot les planifie en concertation : « Nous essayons de discuter le plus et le mieux possible avec nos confrères pour développer des services communs. Par exemple, il n’existait pas de scanner pour les carnivores domestiques à Lyon, nous nous sommes donc rencontrés et nous avons échangé sur ce point avant d’arriver à la conclusion qu’un tel équipement était nécessaire. Depuis quel­ques années, l’école accueille donc un scanner privé. Il en va de même pour le scanner pour les chevaux et pour l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Ainsi, nos étudiants ont accès à des services majeurs et nos confrères peuvent référer juste l’imagerie, ou tout le processus de soins », explique le directeur de Lyon. Globalement, ces dernières années, les relations ont donc été plutôt franches, mais apaisées, entre l’école et les praticiens libéraux.

UN AVENIR SUR FOND DE CONCENTRATION

Comme partout ailleurs, les conditions d’exercice en libéral se durcissent, mais le Rhône s’enorgueillit de ne pas avoir vu de cabinet contraint de baisser le rideau à cause de la conjoncture économique.

« Nous notons toutefois un nombre d’instal­lations en baisse. Une proportion croissante de confrères nous font part de difficultés, au premier rang desquelles figurent les demandes d’étalement des règlements, voire les défauts de paiement, mais jusque-là tous sont globalement parvenus à maintenir leur niveau d’activité », observe Michel Dubor, président du Syndicat des vétérinaires d’exercice libéral du Rhône. L’analyse vaut pour les canins (plus de 230) comme pour les ruraux (une quarantaine) et les quelques équins (moins de 10) encore présents dans le département.

Toutefois, la tendance est à la concentration. En ville comme en zones périurbaines, les vétérinaires qui exercent au sein de petites structures sont de plus en plus rares. Sur l’agglomération lyonnaise, les vétérinaires en solo se comptent sur les doigts d’une main et sont pratiquement tous installés en centre-ville, où ils se concentrent sur les actes de base et acceptent de référer de nombreux cas. En revanche, le nombre de cliniques qui comp­tent au moins 2 vétérinaires augmente. C’est le prix à payer pour satisfaire une clientèle de plus en plus exigeante, parfois assurer la permanence des soins et surtout parvenir à amortir les frais, notamment ceux liés à l’immobilier, qui ne cessent de croître.

En s’éloignant de l’agglomération, les mêmes effets se confirment, mais pas forcément avec des causes identiques. Cette marche forcée vers la concentration présente cependant un avantage : elle permet de maintenir un maillage fort et de garantir la continuité des soins. Toutefois, rares sont les praticiens ruraux et équins qui, aujourd’hui, n’ajoutent pas un zeste de canine à leur exercice. « Je ne connais aucun confrère strictement rural dans le Rhône », reconnaît Jean-Louis Cloye, président du Groupement technique vétérinaire (GTV). Avec quelque 5 000 bovins recensés au sein d’exploitations qui comptent tout au plus une centaine de têtes, voire souvent moins d’une cinquantaine, la spécialisation devient difficile. D’autant que, les derniers bastions ruraux étant situés au nord et à l’ouest du département, la concurrence des vétérinaires de la Saône-et-Loire et de la Loire est une réalité avec laquelle les ruraux rhodaniens doivent compter.

Quant à l’équine, si le Rhône ne manque pas de centres équestres, et dans une moindre mesure de professionnels, ces structures sont aussi majoritairement installées en limite du département. Ainsi, beaucoup s’attachent les services de vétérinaires extérieurs à ce dernier. Sans compter que le pôle équin de VetAgro Sup dispose en la matière d’un savoir-faire reconnu et d’une clientèle fidèle.

Mises bout à bout, ces particularités ne font au final plus qu’une, qui semble satisfaire les vétérinaires comme leurs clients : même si les conditions d’exercice se tendent et obligent à quelques adaptations, il n’existe pas, à ce jour, de désert vétérinaire dans le Rhône.

  • 1 L’État, les ENV, l’ENSV, le Centre de coopération international en recherche agronomique (Cirad), l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), etc.

  • 2 Agronomes et vétérinaires sans frontières, Coopération vétérinaire privée française pour l’international, Association française des directeurs et cadres de laboratoires vétérinaires publics d’analyses, Syndicat de l’industrie du médicament vétérinaire et réactifs.

ENSV : UNE AUTRE ÉCOLE DANS L’ÉCOLE À MARCY L’ÉTOILE

Depuis 2010, l’École nationale des services vétérinaires (ENSV) fait partie de VetAgro Sup. Destinée, lors de sa naissance en 1973, à prendre en charge la formation des vétérinaires fonctionnaires du ministère de l’Agriculture, l’ENSV a vu peu à peu ses missions évoluer. « Notre établissement est une structure singulière, aux interfaces de l’enseignement supérieur et de l’école d’application, de l’expertise en santé publique vétérinaire et des activités de gouvernance sanitaire vétérinaire, associant secteur privé et secteur public », résume Olivier Faugère, son directeur.

Certes, la formation des inspecteurs en santé publique vétérinaire (ISPV) reste son cœur de métier et, chaque année, 10 à 12 ISPV sortent de l’ENSV. Mais en marge de sa vocation originelle, la structure s’est beaucoup ouverte sur l’extérieur. Ses enseignements s’adressent aujourd’hui à un public de non-fonctionnaires et à des vétérinaires officiels étrangers. « Nous avons développé une coopération internationale, en accueillant des étudiants et en apportant notre expertise à des écoles étrangères qui souhaitent mettre en place des cursus de formation similaires aux nôtres. Cet activisme en coopération internationale nous vaut le label de l’Organisation mondiale de la santé animale », précise Olivier Faugère.

La formation continue destinée aux fonctionnaires fait aussi largement partie du quotidien de l’ENSV. Elle conduit en outre, avec la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) et les ENV, les sessions liées au mandat sanitaire.

Enfin, l’expertise de ses équipes est mise au service des professionnels de la santé publique vétérinaire, à travers des études, des outils qu’elle propose aux différents acteurs : « L’ENSV n’est pas seulement une école d’application pour les fonctionnaires. Sa vocation est de former des personnes qui peuvent être utiles à l’ensemble des vétérinaires libéraux et salariés. D’ailleurs, l’avenir va certainement vers une collaboration renforcée entre les vétérinaires mandataires et l’administration. Chaque fois qu’il y aura une évolution vers des tâches confiées à des vétérinaires privés, l’ENSV souhaite y être associée », plaide son directeur.

L’EXPERTISE VÉTÉRINAIRE NATIONALE AU DEPART DE LYON

Né en 2002, le groupement d’intérêt public France Vétérinaire International prend une part active dans le rayonnement international de l’art vétérinaire français. En réunissant des acteurs publics1 et privés2, FVI est capable de mobiliser des acteurs reconnus pour leur expertise en matière de lutte contre les crises sanitaires et les maladies émergentes, notamment. « Notre mission est d’assurer la promotion de l’expertise vétérinaire nationale hors de nos frontières. Nous la déclinons à travers la participation à des projets de coopération et en assurant des formations », explique Olivier Faugère, également directeur de FVI.

C’est donc de Lyon que partent, au propre comme au figuré, ces initiatives qui permettent de partager et de faire rayonner l’excellence vétérinaire française.

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