Yersiniose caprine : aspects cliniques et diagnostiques - La Semaine Vétérinaire n° 1482 du 10/02/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1482 du 10/02/2012

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/CAPRINS

Auteur(s) : KARIM ADJOU

La yersiniose, une affection en cours d’émergence mondiale, se déclare sous différentes formes cliniques. Le traitement est efficace s’il est précoce. La prévention de cette affection passe par de bonnes pratiques d’élevage, car il n’existe pas de vaccin.

SIGNES CLINIQUES

Forme intestinale

La forme intestinale apparaît le plus souvent chez des animaux âgés de 1 à 6 mois. Cependant, les animaux de tout âge et de toute race sont susceptibles d’être atteints.

Une mort subite accompagne certains cas de diarrhée. Celle-ci est aqueuse et non hémorragique. Son évolution est généralement courte (jusqu’à quelques jours) et son issue souvent fatale.

L’apparition d’une hyperthermie est rare.

Il est également possible d’observer une forme plus longue assortie d’une déshydratation et d’une perte de poids. La maladie évolue donc sur un mode suraigu, aigu ou chronique.

Forme abortive

Des avortements spontanés sont notés au sein du troupeau, ainsi que la naissance à terme de chevreaux faibles qui meurent dans les heures suivant leur naissance.

Les cotylédons des placentas des chèvres atteintes peuvent être entièrement blancs ou présenter des taches blanches à leur surface.

Il est possible d’observer un taux d’avortement jusqu’à 24 % sur une période assez courte et la mort des chèvres atteintes.

Autres formes

Il existe aussi une forme aiguë et chronique de mammite. Un œdème mammaire et des cail­lots dans le lait dans la forme aiguë et du sang dans le lait dans la forme chronique sont alors notés. L’induration de la mamelle est susceptible de persister pendant plusieurs semaines après la guérison.

Modifications biologiques

Les données hématologiques ou biochimiques sur des cas spontanés de yersiniose chez les caprins ne sont pas disponibles. Les ovins présentent une leucocytose neutrophilique.

LÉSIONS

À l’autopsie, les chèvres qui présentent la forme entérique de la maladie sont maigres et souvent émaciées. Les abcès internes, multiples, de grande taille (pseudotuberculose) décrits chez les animaux de laboratoire ne sont pas rapportés chez les chèvres, mais des abcès uniques peuvent être occasionnellement trouvés. La lésion macroscopique la plus courante est l’hypertrophie œdémateuse des nœuds lymphatiques mésentériques.

Les lésions macroscopiques des intestins semblent limitées à une hyperhémie de la muqueuse ou à une entérite catarrhale. Néanmoins, un examen méticuleux permet la mise en évidence de petits foyers de nécrose. À l’examen histologique, ces lésions sont localisées à la muqueuse, surtout la lamina propria, et contiennent des colonies de bactéries entourées de neutrophiles. Ce sont des microabcès multiples caractéristiques de la maladie1. Un épaississement marqué du cæcum et du côlon proximal, et des ulcérations de la muqueuse (avec la formation de plaques de fibrine) sont observés chez certains animaux.

Dans la forme abortive de la maladie, l’utérus peut être hémorragique ou rempli de pus. Les animaux morts à la suite d’une forme abortive de la maladie sont susceptibles de présenter un œdème au niveau des nœuds lymphatiques mésentériques. Une spléno­mégalie, des infarctus rénaux, un épaississement de la muqueuse intestinale avec un œdème peuvent être présents. Les bactéries sont mises en évidence par culture à partir des nœuds lymphatiques et du contenu utérin.

DIAGNOSTIC

En raison du potentiel zoonotique de la maladie, un diagnostic définitif, fondé sur des méthodes bactériologiques ou sérologiques, est à poser lorsqu’il existe un risque d’exposition pour l’homme.

L’organisme responsable de la maladie est susceptible d’être isolé à partir de fèces diarrhéiques, du lait de mammite ou des sécrétions utérines. Comme ces bactéries peuvent appartenir à la flore intestinale des animaux, le sérotypage est nécessaire afin de confirmer la virulence de la bactérie isolée. Il est également possible d’utiliser des tests sérologiques pour confirmer le diagnostic de yersiniose.

Les caprins atteints d’une diarrhée provoquée par Yersinia enterocolitica présentent une augmentation du taux d’agglutination entre le sérum prélevé le jour de la diarrhée et celui extrait 2 à 3 semaines plus tard.

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL

Dans la forme entérique de la maladie, le diagnostic différentiel comprend toutes les causes potentielles de diarrhée. Dans le groupe d’âge le plus concerné par l’affection, les chevreaux de 1 à 6 mois, la coccidiose et le parasitisme dû aux nématodes font partie des causes les plus fréquentes de diarrhée. La salmonellose et l’entérotoxémie peuvent également produire une diarrhée avec des morts subites. Les abcès internes sont le plus souvent causés par Coryne­bacterium pseudotuberculosis chez la chèvre. Cependant, la yersiniose, la tuberculose et la mélioïdose sont à considérer comme des causes potentielles.

TRAITEMENT ET PRÉVENTION

Yersinia est généralement sensible à un large spectre d’antibiotiques même si, en pratique, le traitement est rarement entrepris. De nombreux cas de succès thérapeutiques mettent toutefois en évidence l’usage des tétracyclines, notamment lors d’épisodes de yersiniose abortive et entérique. L’antibiothérapie est plus efficace si elle est instaurée précocement dans l’évolution de la maladie. Lors de cas sévères de diarrhée, une fluidothérapie est conseillée en soutien du traitement antibiotique.

Comme l’épidémiologie de la yersiniose caprine n’est pas encore complètement élucidée, les recommandations pour le contrôle de la maladie sont assez largement empiriques et se fondent sur des bonnes pratiques d’élevage.

  • 1 Slee et Button, 1990.

L’ESSENTIEL SUR LA YERSINIOSE CAPRINE

→ Étiologie

Yersinia enterocolitica, Yersinia pseudotuberculosis

→ Répartition géographique Mondiale avec influence saisonnière.

→ Symptômes majeurs

– Forme intestinale : diarrhée aqueuse non hémorragique avec une évolution souvent rapide et fatale (animaux entre 1 et 6 mois) mais aussi forme chronique.

– Forme abortive : avortements lors du dernier tiers de gestation.

– Forme mammaire : caillots de lait dans la forme aiguë et présence de sang dans la forme chronique.

→ Tableau lésionnel

– Émaciation des cadavres.

– Entérite catarrhale et hyperhémie de la muqueuse intestinale.

– Hypertrophie œdémateuse des nœuds lymphatiques mésentériques.

– Microabcès intestinaux.

– Pas d’abcès multiples de grande taille chez les caprins.

→ Moyens diagnostiques

– Culture bactérienne.

– Sérotypage nécessaire (car bactérie commensale de l’intestin).

– Tests sérologiques.

→ Traitement

– Antibiothérapie (tétracyclines le plus souvent) précoce.

– Fluidothérapie en cas de déshydratation.

→ Prévention

– De bonnes pratiques d’élevage.

– Diminution des sources de stress.

– Fournir une alimentation et de l’eau en quantité suffisante.

– Séparation des espèces

– Lutte contre le parasitisme.

– Contrôle des nuisibles.

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