Rénovation du mandat sanitaire : projet abouti ! - La Semaine Vétérinaire n° 1482 du 10/02/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1482 du 10/02/2012

Missions des vétérinaires

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Auteur(s) : MARINE NEVEUX

Les modalités d’attribution, d’exercice et de remplacement du vétérinaire titulaire d’un mandat sanitaire se précisent. Explications avec Jacques Guérin et Pierre Brouillet (Conseil de l’Ordre) et Christophe Brard (SNGTV).

Plusieurs textes réglementaires étaient en attente, avec un objectif de parution avant l’élection présidentielle, à la suite de l’ordonnance de juillet dernier relative à la rénovation du mandat sanitaire. Le principal décret concerne la modernisation des missions des vétérinaires titulaires d’un mandat sanitaire. Il sera présenté en Conseil d’État dans les jours à venir. À la suite du Comité consultatif de la santé et de la protection animale (CCSPA) du 19 janvier dernier, une dernière consultation des parties prenantes s’est révélée nécessaire. Le projet est aujourd’hui abouti. « Les organisations professionnelles vétérinaires ont formulé des propositions concertées, expliquent nos confrères Jacques Guérin et Pierre Brouillet, du Conseil supérieur de l’Ordre (CSO). La DGAL1 a reçu favorablement nos contributions. Par conséquent, le CSO a rendu un avis favorable au projet de décret. Ces dispositions législatives et réglementaires confirment et renforcent l’importance des missions confiées au vétérinaire. »

La rénovation du mandat sanitaire est en marche depuis plusieurs années. « Le bilan est plutôt positif », se félicite Christophe Brard, président de la SNGTV2. D’ailleurs, dès 2007, un groupe de travail consacré au mandat sanitaire avait été mis en place au sein de cette organisation afin d’envisager l’élargissement des missions confiées aux vétérinaires sanitaires. Cette réflexion s’est poursuivie en concertation avec la FSVF3. Elle s’est ensuite concrétisée au cours des États généraux du sanitaire. L’ordonnance de juillet dernier, le décret et les arrêtés à paraître en représentent l’aboutissement. « Un important travail de communication sera à effectuer auprès des filières dans les mois à venir, afin d’expliquer les nouveaux termes et les nouvelles mesures », remarque Christophe Brard.

Des conditions d’octroi à préciser

Les conditions d’attribution de l’habilitation du vétérinaire sanitaire par l’État seront précisées dans ce décret, notamment en ce qui concerne la formation, le retrait ou la suspension de l’habilitation. « Si les conditions d’octroi sont clarifiées, elles ne changent pas fondamentalement la situation actuelle. Il s’agit, ni plus ni moins, de s’assurer que le vétérinaire qui accepte une mission sanitaire soit en capacité d’assumer son engagement de par sa formation initiale ou continue, sa disponibilité, y compris en cas d’urgence sanitaire, et une charge de travail compatible avec ce que nous pouvons attendre d’un vétérinaire, estiment Jacques Guérin et Pierre Brouillet. Vu le pourcentage significatif de vétérinaires formés à l’étranger qui exercent en France, il paraît normal qu’un préalable de formation spécifiant le modèle sanitaire national soit requis. Le pendant de l’octroi de l’habilitation du vétérinaire sanitaire est la capacité du donneur d’ordre à retirer ou à suspendre cette habilitation selon des critères précis. » Les arrêtés d’application à suivre préciseront les conditions d’attribution et de formation. Le CSO considère que la formation, la zone géographique, le nombre d’élevages suivis et l’indépendance dans l’exercice de la mission sont des critères justes et pertinents.

Les conditions d’exercice des missions

Le décret distingue, comme actuellement, des conditions d’exercice différentes selon les filières. « Pour la plupart des espèces, le décret privilégie la zone géographique de proximité en limitant l’habilitation à 5 départements au maximum, limitrophes entre eux et comprenant celui de l’un des domiciles professionnels d’exercice du vétérinaire sanitaire », détaillent Jacques Guérin et Pierre Brouillet. « Une certaine souplesse a ainsi été conservée pour coller aux réalités du terrain », souligne Christophe Brard. « L’effet de l’évolution du Code de déontologie de juillet 2010 se fait sentir, la réponse est pragmatique. La simplification administrative vient du fait que la démarche d’habilitation est centralisée sur le préfet du département du siège du domicile professionnel administratif. Charge audit préfet de diffuser l’information vers ses homologues des autres départements pour lesquels l’habilitation est demandée par le vétérinaire sanitaire », ajoutent Jacques Guérin et Pierre Brouillet.

Pour les cheptels d’intérêt génétique particulier ou pour des élevages de certaines espèces (aquaculture, poules reproductrices, par exemple), l’habilitation est octroyée par le ministre de l’Agriculture. Celle-ci ouvre la possibilité d’étendre l’aire géographique d’habilitation à l’ensemble du territoire national. La demande sera alors formulée auprès du ministère.

Par conséquent, les zones d’intervention du vétérinaire sanitaire s’effectueront selon un zonage géographique dans le cadre général, qui peut aller jusqu’au territoire national dans certains cas particuliers. La notion de quotas est également intégrée. « Le texte du décret fait référence aux quotas du décret prescription-délivrance », commente Christophe Brard. « Les organisations professionnelles vétérinaires ont demandé, au même titre et dans le même esprit que le décret du 24 avril 2007 relatif aux conditions et aux modalités de prescription et de délivrance au détail des médicaments vétérinaires, que la même approche par quotas soit applicable à l’habilitation du vétérinaire sanitaire », poursuivent Jacques Guérin et Pierre Brouillet. Le vétérinaire déclarera ainsi le nombre d’élevages et d’animaux chez lesquels il intervient. « Ces données pourront être rapportées au nombre d’équivalents temps plein (ETP) d’une structure d’exercice vétérinaire. Les DD(CS)PP4 pourront ainsi effectuer un contrôle de cohérence réclamé par les organisations professionnelles vétérinaires », conclut Christophe Brard.

Les conditions de remplacement ou d’aide d’un vétérinaire sanitaire

Quelles seront les conditions de remplacement ou d’aide d’un vétérinaire sanitaire ? « Le vétérinaire sanitaire remplaçant doit être habilité pour l’activité et l’aire géographique d’intervention, et en capacité d’assumer ses missions sanitaires en supplément et sans compromettre ses propres missions. Le vétérinaire sanitaire “titulaire” doit avertir le préfet de son DPA avant de se faire remplacer », développent Jacques Guérin et Pierre Brouillet. « En dehors du remplacement, le vétérinaire sanitaire peut se faire épauler dans des conditions que nous avons souhaitées strictes. » « Si le vétérinaire est assisté, cela doit s’effectuer sous son autorité et sa responsabilité. En outre, cela ne peut pas concerner les missions de police sanitaire », précise Christophe Brard. « L’assistanat, sans tomber sous le coup de l’exercice illégal, est ouvert aux étudiants détenteurs d’un diplôme d’études fondamentales vétérinai­res, sans préjudice des dispositifs régissant la délégation des actes vétérinai­res, et sous couvert de dispositions précises du ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Pêche, à des techniciens. Le dispositif vise, en l’occurrence, les prélèvements (chiffonnettes) dans le cadre des plans de recherche de salmonelles en élevage avicole. Nous serons extrêmement vigilants afin que ce dispositif ne vienne pas pallier les insuffisances des vétérinaires sanitaires habilités dans un nombre d’élevages excessif et qui souhaiteraient, par ce biais, “confier” ou “déléguer » leurs prérogatives à des techniciens”, ajoutent Jacques Guérin et Pierre Brouillet. L’article R.203-10 devrait donc lever toute ambiguïté. Cet assistanat sera sans préjudice pour l’exercice vétérinaire.

Vétérinaire mandaté par l’État

La responsabilité du vétérinaire sera-t-elle alignée sur celle d’un agent public ? L’ordonnance de juillet dernier définit 2 catégories.

→ Le vétérinaire sanitaire habilité par l’État correspond à celui qui intervient, à la demande et pour le compte de l’éleveur, pour la réalisation de missions imposées aux détenteurs d’animaux.

→ Le vétérinaire mandaté par l’État : cette nouvelle notion émerge de l’ordonnance et offre la possibilité à l’État de mandater des confrères sur des missions spécifiques, de police sanitaire, de contrôle dans le cadre de la certification sanitaire officielle ou de la mise en œuvre du “paquet hygiène”, et dans le cadre de la protection animale.

« Le nouveau dispositif a pour ambition première de clarifier le cadre juridique en distinguant les missions du vétérinaire sanitaire selon qu’il les effectue pour le compte de l’éleveur (habilité) ou pour celui de l’État (mandaté). La responsabilité du vétérinaire sanitaire est fonction de cette dichotomie. D’un côté, il exerce sa mission dans un cadre libéral et endosse les responsabilités afférentes. De l’autre, il exerce sa mission à la demande et pour le compte de l’État, qui en assume les responsabilités. » Ces confrè­res mandatés seront désignés après un appel à candidatures. « Nous souhaitons qu’une infor­mation directe soit diffusée auprès de tous les vétérinaires sanitaires pour ces appels à candidatures, et pas uniquement au niveau d’un journal d’annonces légales ou de la préfecture », déclare Christophe Brard.

Compétence, indépendance, impartialité

La compétence, l’indépendance et l’impartialité « sont en premier lieu une appréciation personnelle du vétérinaire sanitaire habilité et plus encore mandaté. Il en va de sa responsabilité, en son âme et conscience, d’accepter la mission qui lui est proposée sans se mettre dans une position qui, potentiellement, serait intenable ou nuirait à sa réalisation », expliquent Jacques Guérin et Pierre Brouillet. « Il ne faut pas que le vétérinaire détienne des parts dans la société dans laquelle il intervient », renchérit Christophe Brard. Bien entendu, le vétérinaire sanitaire ne peut pas être économiquement lié, mais peut prodiguer des soins chez ces clients. « N’entrons pas ici dans le débat du conflit d’intérêts potentiel ou avéré, ajoutent nos confrères de l’Ordre. Il s’agit, plus pragmatiquement, de la relation entre un vétérinaire et un éleveur concernant la surveillance, la prévention ou la lutte contre les dan­gers sanitaires de 1re ou de 2e catégorie réglementés. Les enjeux collectifs sont importants. Le vétérinaire sanitaire se doit d’être en capacité de jouer son rôle, plein et entier, en toute indépendance vis-à-vis des pressions extérieures. Le couple éleveur-vétérinaire est pérennisé. Au-delà de toutes considérations, c’est le fondement même du modèle sanitaire français qui serait alors mis en cause ! L’Ordre des vétérinaires fait confiance aux vétérinaires sanitaires pour qu’il en soit toujours ainsi. L’Ordre est confiant dans le modèle sanitaire français qui, à l’épreuve des dangers, a su jouer son rôle et a montré toute son efficacité. »

  • 1 Direction générale de l’alimentation.

  • 2 Société nationale des groupements techniques vétérinaires.

  • 3 Fédération des syndicats vétérinaires de France.

  • 4 Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations.

  • Retrouvez des compléments d’information sur le site WK-Vet.fr : http://www.wk-vet.fr/mybdd/?visu=164&article=164_3731

  • 1 Acte médical vétérinaire.

Le “domicile professionnel d’exercice sanitaire”

Le mandat sanitaire sera-t-il attribué à une clinique vétérinaire ou restreint, individuellement, à chaque vétérinaire d’une même structure ? « Nous avons demandé, en dehors des conditions normales de remplacement du vétérinaire sanitaire empêché d’exercer sa mission, que soit prévue la possibilité de désigner un autre vétérinaire sanitaire, en particulier un confrère appartenant au même domicile professionnel d’exercice, et que l’éleveur puisse désigner un DPE au sein duquel exercent plusieurs vétérinaires habilités pour la même zone géographique et la même activité, expliquent Jacques Guérin et Pierre Brouillet. C’était une demande forte des organisations professionnelles vétérinaires. Il convient de saluer ce grand pas vers la reconnaissance, par notre administration de tutelle, de l’exercice en groupe de la profession vétérinaire et des missions sanitaires en particulier. C’est une réalité de terrain, une approche pragmatique du maillage vétérinaire qui repose sur le vétérinaire sanitaire, mais aussi sur le “DPE sanitaire”. C’est reconnaître qu’en matière de force de frappe, en cas d’urgence, la répartition des tâches s’organise entre les vétérinaires sanitaires d’une même entreprise. »

Les commissions bipartites

Le fonctionnement des commissions bipartites sera vraisemblablement défini par un arrêté.

« La proposition des organisations professionnelles vétérinaires, soutenue par les instances professionnelles agricoles, consiste à partir sur une négociation nationale pour la nomenclature des actes et les tarifs associés (définis en AMV6) », explique Christophe Brard. Ensuite, la négociation pourrait s’effectuer localement pour tenir compte des frais d’approche, de l’organisation des chantiers (contention), etc. « À défaut d’une tarification nationale, nous souhaitons rester sur un échelon départemental d’évaluation, car il peut exister de grandes disparités au niveau régional. En outre, les acteurs se connaissent souvent mieux au niveau du département, ce qui facilite la conduite des réunions. »

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