L’excès d’inflammation génitale est délétère, pas les bactéries - La Semaine Vétérinaire n° 1481 du 03/02/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1481 du 03/02/2012

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/BOVINS

Auteur(s) : BÉATRICE BOUQUET*, SYLVIE CHASTANT-MAILLARD**

Fonctions :
*service de reproduction, ENV de Toulouse. Article rédigé d’après la conférence présentée durant l’EBF, en décembre 2011.

L’expression « infection utérine » devrait disparaître du vocabulaire. En raison du phénomène de clairance naturelle des bactéries jusqu’à 7 semaines après le vêlage, il convient de réfléchir activement et d’intégrer la notion d’équilibre entre les vagues de contamination bactérienne utérine après la mise bas et les mécanismes d’élimination. Au lieu de dénombrer des bactéries, il serait préférable de quantifier la réaction inflammatoire utérine (l’immunité utérine est essentiellement cellulaire : les cytokines pro-inflammatoires déclenchent une intense diapédèse de neutrophiles, qui phagocytent les bactéries à la lumière). Dans 36 % des cas d’endométrite, il n’existe pas de croissance bactérienne mais une inflammation pathologique1. Le pourcentage s’élève même à 85 % pour les seuls cas d’endométrite sévère.

Les outils de la bactériologie moderne se révéleraient utiles afin de déterminer si les bactéries sont présentes, mais non cultivables. Un travail de métagénomique génitale pourrait éclairer la pathophysiologie des endométrites, par l’établissement d’un profil génomique de l’ensemble de la population bactérienne présente (comme pour les sols, par exemple).

SEUILS DE NEUTROPHILES PATHOLOGIQUES

La cytobrosse est la technique de référence pour quantifier la réaction inflammatoire utérine. Les premières publications en ce sens chez la vache remontent à 2004, tandis que cette approche est beaucoup plus ancienne chez l’espèce équine. En faisant du frottis endométrial le nouvel outil diagnostique de l’endométrite bovine, il a également été nécessaire de déterminer le bon seuil de neutrophiles permettant de distinguer inflammation normale et pathologique. Un consensus s’est établi autour de 5 à 6 % de neutrophiles sur le frottis. On parle alors d’endométrite cytologique, qui peut ou non être exprimée cliniquement. Il s’agit bien d’une maladie : les vaches affectées ont des performances de reproduction diminuées. En 2010, l’équipe de Stephen Leblanc et celle de Gibert ont montré que davantage d’inséminations artificielles et de temps sont nécessaires pour que ces vaches soient à nouveau gravides.

Il convient également de s’intéresser au col utérin. Le seuil pathologique établi diffère un peu (2 % de neutrophiles). Le constat d’une cervicite associée à une endométrite diminue encore les performances de reproduction (effet additif1).

Il n’existe pas d’association entre la cervicite et l’endométrite chez les vaches qui présentent une inflammation (32 % d’infections mixtes, 11 % de cervicites seules).

DIAGNOSTIC

Les moyens diagnostiques traditionnels sont peu fiables pour diagnostiquer l’endométrite.

À la palpation, la consistance des cornes et leur diamètre (supérieur à 4 cm) sont de mauvais critères. Le diamètre du col possède un intérêt relatif (sensibilité : 36 %, mais valeur prédictive positive : 70 %). À l’échographie, moins de 50 % des images anormales présentent véritablement une inflammation utérine sous-jacente (les images de pyomètre et d’œstrus sont exclues). L’inflammation dans les cornes utérines n’est pas, non plus, un phénomène homogène. L’examen des écoulements vaginaux tire – un peu – son épingle du jeu (un massage préalable par voie transrectale peut se révéler judicieux). Il existe toutefois des vaginites sans inflammation utérine ni cervicale.

La notion de réactivation (inflammatoire) spontanée (ou rupture immunitaire) au cours du post-partum rend aujourd’hui discutable le fait de proposer un seul examen (entre 21 et 35 jours). Un contrôle 1 semaine avant l’insémination pourrait s’y ajouter. L’endométrite cytologique participe effectivement au syndrome repeat breeding. Plus de 57 % des vaches sont affectées au moment de l’insémination artificielle (36 % pour le col). Attention : après l’insémination artificielle, l’inflammation n’est plus néfaste, mais s’accompagne de davantage de réussite.

PRÉVENTION ET TRAITEMENT

À l’avenir, il conviendra d’étendre l’ensemble de ces résultats, obtenus surtout chez la holstein, à d’autres races, dont la montbéliarde. Il importe également de définir les étapes de la reproduction perturbées par ces phénomènes inflammatoires et les mécanismes précisément impliqués. Les conséquences thérapeutiques sont, en outre, à approfondir. Les prostaglandines F2€ pourraient être aussi peu efficaces que sur les formes cliniques d’endométrite (Galvao, 2009). Le seul traitement à avoir prouvé son efficacité est la céfapirine par voie intra-utérine. Comme l’endométrite n’est pas toujours visible (sécrétions propres), il serait tentant de proposer de traiter systématiquement toutes les vaches. Le Canadien Kasimanickam (en 2005) et Pasquin (en France en 2008) ont mis en évidence l’efficacité de cette pratique en termes de performances de reproduction. Cependant, « le contexte n’est pas favorable », selon Sylvie Chastant, car les antibiotiques sont des molécules sensibles.

Les facteurs de risque de l’endométrite cytologique, étudiés à l’échelle du troupeau, sont les mêmes que pour la forme clinique. Continuer à travailler sur l’équilibre énergétique de la ration, de gérer les affections peripartum, les hypocalcémies, la génétique, la reprise de cyclicité est toujours d’actualité pour un meilleur contrôle, en amont, de la maladie inflammatoire génitale.

  • 1 Selon les résultats obtenus par Deguillaume en 2010. Voir aussi « Virage diagnostique et thérapeutique sur les endométrites », S. Chastant-Maillard et R. Fournier, Point Vétérinaire, 2011, n° 318, p. 56.

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