Formation
ANIMAUX DE COMPAGNIE
Auteur(s) : DIDIER LANORE*, GWENAËL OUTTERS**
Fonctions :
*praticien à Plaisance-du-Touch (Haute-Garonne) et à Bordeaux (Gironde). Article rédigé d’après une conférence présentée au congrès de l’Afvac 2010.
– Chaque outil thérapeutique garde sa place, malgré l’arrivée des thérapies ciblées.
– La chirurgie seule guérit les mastocytomes de grade I opérables et à bilan d’extension négatif (stade 1).
– La chimiothérapie est indiquée comme traitement adjuvant à la chirurgie, pour limiter la dissémination métastatique annoncée par le grading histologique.
– La radiothérapie vise à éviter les récidives.
– Les thérapies ciblées sont indiquées dans des cas précis et ne court-circuitent pas les traitements classiques.
Les critères de décision thérapeutique lors de mastocytome font appel à l’examen clinique (stade, volume, récidive, localisation, métastases loco-régionales ou systémiques) et aux résultats des analyses complémentaires (grading histologique, qualité des marges, marqueur ki67, marqueur c-kit). Une décision thérapeutique ne saurait être prise sans bilan d’extension : une cytoponction du ganglion satellite négative clôt théoriquement les investigations. Si la cytoponction est positive, le bilan complet est réalisé avec ponction de tous les organes. La recherche de la mutation c-kit est effectuée par le laboratoire d’histopathologie de l’école vétérinaire de Nantes (Jérôme Abadie), en plus de l’histologie et du Ki67 (réalisées dans la plupart des laboratoires anatomopathologiques des écoles vétérinaires). Les possibilités thérapeutiques des mastocytomes sont la chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie et les thérapies ciblées. Notre confrère Didier Lanore a présenté la place de chacune à l’occasion d’une conférence1.
Le traitement chirurgical est curatif pour les tumeurs uniques opérables, de stade 1, de grade I, de Ki67 inférieur à 10 %, avec bilan d’extension négatif et des marges d’exérèse saines. Large et précoce, il est complété par une analyse histologique, qui conditionne d’éventuels traitements adjuvants (un Ki67 élevé, qui indique un risque de dissémination métastatique, oriente vers une chimiothérapie ; un risque de récidive – lorsque la chirurgie est insuffisante : marges infiltrées à l’histologie, effraction capsulaire du ganglion, etc. – fait opter pour une radiothérapie). Les études rapportent des taux de survie de 83 % à 4 ans pour le grade I avec chirurgie seule, et de 100 % à 1 an (Murphy 2004). Dans ces cas, aucun traitement adjuvant n’est nécessaire. Pour le stade 4, dont la survie est de 34 à 43 jours, la question de la prise en charge chirurgicale se pose.
La chimiothérapie a sa place en traitement adjuvant, en postopératoire, pour limiter la dissémination métastatique annoncée par le grading histologique. Elle intéresse les tumeurs de grades III ou II avec un Ki67 supérieur à 10 %, opérables. La survie enregistrée dans l’étude de Camps-Palau est, pour le grade II, de 6 ans. 2 molécules peuvent être utilisées :
→ la vinblastine, à 2 mg/m2 par voie intraveineuse stricte pendant 8 séances (4 séances à 1 semaine d’intervalle, puis 4 séances à 2 semaines d’intervalle) ; sa myélotoxicité est peu fréquente ;
→ la lomustine per os à 60 mg/m2, toutes les 3 semaines, pendant 3 à 6 mois (toxicité médullaire et hépatique).
Les mastocytomes sont radiosensibles. La radiothérapie est utilisée en thérapie adjuvante, après l’intervention chirurgicale ou sur la tumeur laissée en place. Elle concerne le site tumoral et/ou ganglionnaire de drainage. La radiothérapie vise à éviter la récidive. Les études menées avec cette technique sont encourageantes : pour le grade II, des taux de survie de 96 % à 5 ans sont rapportés. Sur le grade III avec exérèse incomplète, des survies médianes de 28 mois et des taux de non-récidive à 1 an de 65 % sont observés (Al Sarraf 1996, Hahn 2004). La plupart des travaux sont effectués sans chimiothérapie adjuvante, ce qui pourrait prouver l’efficacité de la radiothérapie pour endiguer également le phénomène métastatique. En complément de la chirurgie, les médianes sans récidive sont de l’ordre de 36 mois et les médianes de survie de 3 à 4 ans.
En dehors des cas précédemment décrits, il existe des situations d’échec :
→ les tumeurs pour lesquelles la taille, la localisation ou le refus des propriétaires interdit la chirurgie ;
→ les éclosions multicentriques ;
→ les bilans d’extension systémique positifs pour lesquels, quel que soit le traitement, les survies sont de l’ordre de 1 à 1,5 mois ;
→ les récidives multiples ou rapides, malgré la mise en place de thérapeutiques adaptées ;
→ les cas pour lesquels la chimiothérapie ou la radiothérapie à long terme n’apporte plus de résultats.
Face à ces situations, les thérapies ciblées peuvent avoir leur place, mais elles ne doivent pas court-circuiter les schémas thérapeutiques classiques. Les taux de réponse avoisinent 50 %?(guérison ou stabilisation). En outre, ces médicaments présentent l’avantage de se distribuer par voie orale, sans hospitalisation (ce ne sont pas des molécules classées CMR), pour une utilisation simple et pratique qui convient à bon nombre de propriétaires (certaines précautions, comme le port de gants, sont cependant à respecter). Leur principal inconvénient est leur coût, surtout pour les chiens de poids élevé, plus sujets au mastocytome. 2 molécules de thérapies ciblées ont une AMM2 vétérinaire chez le chien : le masitinib (Masivet®) et le tocéranibe (Palladia®).
Le masitinib bloque l’activité du récepteur c-kit des cellules tumorales. Ce médicament est administré par voie orale, quotidiennement ; la dose de départ est de 12,5 mg/kg/j. Il a obtenu l’AMM pour le traitement des mastocytomes de grade II et III non résecables ou récidivants, avec mutation du récepteur c-kit.
Le tocéranibe bloque l’activité du récepteur c-kit des cellules tumorales, mais également l’activité des récepteurs VEGF des cellules endothéliales et des récepteurs PDGF des péricytes. Le traitement s’administre par voie orale, tous les 2 jours, avec une dose initiale de 3,25 mg/kg. L’AMM est obtenue pour le traitement des mastocytomes cutanés récurrents, non résécables, de grades II ou III. Ces thérapies ciblées comportent des effets secondaires assez comparables à ceux de la chimiothérapie, qui imposent un suivi régulier de l’animal (numération-formule et biochimie).
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