Au lieu de vous moquer, apprenez à mieux nous connaître

Été 2006 : fête de la plage à Villeneuve-lès-Maguelone, feu d’artifice, un retour de vent et de nombreuses personnes reçoivent de minuscules cendres incandescentes dans les yeux.

Les pompiers appelés arrivent 30 minutes plus tard, mais ils se disent incompétents et non autorisés légalement pour prodiguer des premiers soins dans cette situation, car ils ne sont pas accompagnés d’un médecin ou d’un infirmier. Je demande à voir le matériel dans le camion et j’utilise une poche de sérum physio-logique pour nettoyer les yeux douloureux de mon fils. En sortant du camion, une dizaine de personnes faisant la queue, j’explique être vétérinaire et être intervenu sur mon fils avec les moyens du bord, et elles me demandent de les prendre également en charge.

Automne 2008 : trek Allibert dans le désert Tunisien à 4 jours de marche de la première ville, avec 10 personnes : le guide, 2 chameliers, 4 médecins généralistes, 1 professeur de sport et 2 vétérinaires. L’un des 2 nomades qui vont faire boire leur troupeau à la source que nous venons de quitter s’approche de notre campement afin de demander des médicaments pour son ami blessé depuis plusieurs jours. Notre guide lui propose de le faire voir par les médecins du groupe. Après avoir ôté sa chaussure de peau, l’homme dévoile une plaie très purulente de la cheville avec des zones de peau noire nécrosée. Les médecins ayant emmené une petite trousse de chirurgie commencent à regarder, mais désemparés devant cette situation inhabituelle, ils me demandent de prendre le relais. Je leur explique la marche à suivre, étant habitué à traiter chirurgicalement des plaies abcédées.

Été 2009 : 22h30, coup de téléphone d’une amie (appartenant au corps médical) qui présente un spasme douloureux de la paupière à la suite du retournement de sa lentille oculaire. 22h40, elle s’allonge sur la table de chirurgie de la clinique vétérinaire. 22h45, la lentille est retirée. Elle me remercie, car elle craignait d’attendre 24 heures aux urgences !

Y a-t-il un docteur en médecine qui pourrait :

– mettre un cathéter à un individu pesant de 1 à plusieurs centaines de kilos ;

– assurer et gérer une anesthésie fixe ou gazeuse ;

– faire des prélèvements et des analyses de sang, urine, peau, moelle osseuse, etc. ;

– effectuer différentes interventions chirurgicales : sutures cutanées, entérectomie, césarienne, ostéosynthèse (broches, vis, plaques, etc.) ?

Nombreux sont les docteurs en médecine vétérinaire qui pratiquent tout cela. Si vous trouvez la perle rare en médecine humaine, qui exerce en France et est capable de tous ces actes, prenons rendez-vous sur des situations d’urgence, sans cadre réglementaire étouffant toute initiative de bonne volonté, et on verra si les vétérinaires ne se feront pas apprécier pour leur travail, même sur des humains si besoin ; après tout, l’homme n’est-il pas un mammifère ?

Quand ils euthanasient des animaux, ce n’est ni par habitude ni par incompétence, mais sur demande des propriétaires, pour des raisons financières acceptables ou pour abréger des souffrances par une mort douce en phase terminale de maladie ou accidentelle incurable. Trop facile de montrer des images choc sorties de tout contexte !

Certes, les vétérinaires ont autre chose à faire en France, mais priez afin que la sacro-sainte Sécurité sociale n’explose pas pour éviter d’avoir à faire des choix économiques de traitement et voyagez dans le monde pour voir comment cela se passe en son absence. Priez pour ne pas vous trouver en situation de catastrophe ou d’urgence sévère, car on verra qui retroussera ses manches pour s’adapter !

Au lieu de vous moquer, en pensant que les vétérinaires ne règlent leurs problèmes que par l’euthanasie, apprenez à nous connaître et vous gérerez mieux certaines crises (vache folle, grippe aviaire, etc.), vous gaspillerez moins l’argent du contribuable – consultations, injections, médicaments périmés (Tamiflu, vaccins, etc.) – et vous gagnerez ainsi du temps et de l’argent pour assurer vous-même des actes dans les déserts médicaux. Inspirez-vous de notre maillage territorial et de notre éthique pour assurer les soins et les urgences, car de nombreux animaux sont plus vite soignés que de nombreux humains.

Ainsi, vous pourrez venir en aide à notre pauvre adjointe au maire ayant eu le courage de parler d’un grave problème qui doit être traité de façon consensuelle par l’ensemble de la classe politique, hors démagogie, avec des professionnels de santé responsables et éthiques.

Mesdames et messieurs de l’UCDF et autres médicaux, sortez de votre microcosme et vous verrez sûrement que M^me Tenenbaum, la poissonnière d’Intermarché et les vétérinaires sont tout aussi respectables que vous.