Vétérinaire apicole, pourquoi pas ? - La Semaine Vétérinaire n° 1473 du 02/12/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1473 du 02/12/2011

Entre nous

VOUS AVEZ LA PAROLE

Auteur(s) : CLAIRE BEAUVAIS*, NICOLAS VIDAL-NAQUET**, CHRISTOPHE ROY***

Fonctions :
*MEMBRES DE LA COMMISSION APICOLE DE LA SNGTV

L’abeille ferait-elle peur aux praticiens ? C’est la conclusion, peut-être hâtive, que l’on pourrait tirer face à la liste des confrères intéressés par la pathologie apicole… Or il pourrait être fort dommageable pour la profession, à l’heure où l’État désire créer un « réseau d’épidémiosurveillance des troubles de l’abeille », qu’elle ne se positionne pas. Rares sont les spécialités qui réunissent les vétérinaires canins et leurs confrères ruraux, et la pathologie apicole en fait partie : si l’abeille domestique est bien un animal “de rente” pour les denrées qu’elle produit, elle est aussi (et de plus en plus) présente dans nos cités. Or la problématique “abeille” est la même à la ville et à la campagne : réaliser des visites de ruchers régulièrement pour dépister au plus tôt des événements sanitaires.

Les vétérinaires doivent se sentir concer­nés par la filière apicole et par les dépopulations de colonies d’abeilles. Néanmoins, on ne s’invente pas praticien apicole du jour au lendemain… Si l’enseignement général en école vétérinaire aborde trop peu la pathologie apicole, des cursus complémentaires existent : une formation délivre le diplôme interécoles en apiculture et pathologie apicole (Oniris/ENVA) depuis plusieurs années et des sessions SNGTV sont désormais inscrites au catalogue (« La pharmacie vétérinaire en apiculture » et « Le b.a.-ba en apiculture »). Un atelier apicole a lieu pendant les journées nationales des GTV depuis 2 ans et permet, sans grand engagement, de raviver ses connaissances. Enfin, des téléformations de 45 minutes seront proposées en 2012 sur différents thèmes (loque américaine, frelon asiatique, varroose). De nombreux praticiens comptent en outre parmi leur clientèle un apiculteur sympathique prêt à vous initier à la pratique apicole.

Pas intéressante, la pathologie apicole ? Bien au contraire ! Chaque cas clinique est un défi et ne se résume pas à une simple prescription. La problématique apicole rend fous les chercheurs tant chaque solution cache un autre problème. Le manque de spécialités vétérinaires disponibles en apiculture gêne le praticien et l’oblige à recourir à des alternatives parfois complexes. L’audit d’élevage devrait être systématique tant les pratiques sont essentielles dans l’apparition des troubles de l’abeille.

Les apiculteurs n’ont-ils pas besoin des vétérinaires ? À l’instar des autres filières, ils devraient s’appuyer sur le praticien pour éviter les écueils sanitaires. L’apiculteur amateur est parfois un propriétaire d’animal de compagnie, habitué à recevoir des conseils vétérinaires. Ne pas lui en prodiguer ne peut que le décevoir. Les médicaments vétérinaires autorisés chez l’abeille, peu nombreux, poussent souvent l’apiculteur à recourir à des traitements “hors AMM”. Ces pratiques, trop fréquentes et problématiques pour l’ensemble de la filière, devraient être encadrées par un vétérinaire, qui reste le seul professionnel garant de la qualité des denrées produites, et le miel en est une.

L’abeille, centre de toutes les préoccupations ? Oui, mais pourquoi ne préoccupe-t-elle pas davantage les vétérinaires ? L’abeille n’est pas un phénomène de mode. Elle reflète nos inquiétudes en matière de santé publique : pas d’antibiotiques en apiculture, la recherche scien­tifique le déconseille, la filière ne le souhaite pas et les résidus viendraient salir son produit1. L’abeille met en évidence la dégradation de l’environnement, car elle est une “sentinelle”, malheureusement accumu­latrice de substances chimiques de toutes origines. Préoccupons-nous de cette espèce en constituant un réseau de vétérinaires “apiphiles” : nous vous invitons, si vous êtes intéressé par la pathologie apicole ou apiculteur amateur, à vous faire connaître auprès de notre commission.

L’abeille, l’avenir du vétérinaire ? Probablement pas. Le vétérinaire, avenir de l’abeille Pourquoi pas !

  • 1 Voir 60 Millions de consommateurs, octobre 2011.

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