Traitement chirurgical d’une éversion de l’abajoue chez un hamster russe

Un hamster russe (Phodopus sungorus) femelle de 8 mois est présenté en urgence en consultation pour une masse, localisée à la commissure labiale gauche, apparue brutalement la veille.

COMMÉMORATIFS ET ANAMNÈSE

Le hamster a été adopté quel­ques mois plus tôt et vit seul dans une cage adaptée. Il est nourri avec des graines achetées en grande surface et reçoit, une fois par semaine, un stick de graines collées au miel (pour friandise). La masse est constatée pour la 1^re fois la veille de la consultation et sa taille n’a ni augmenté ni diminué depuis. Le hamster parvient toujours à boire. Cependant, une baisse de l’appétit est observée depuis son apparition.

EXAMEN CLINIQUE

L’état général du hamster est bon : l’animal est vif et ne présente pas de modification du comportement, selon sa propriétaire. Cependant, il se met en position défensive dès que quelqu’un tente de toucher sa tête.

La masse, qui pend à la commissure labiale gauche, mesure environ 1,5 cm de diamètre. Elle est de couleur rouge à rosée et de consistance molle. La paroi semble fine. Un diagnostic d’éversion de l’abajoue est établi. À l’examen rapproché, de fines abrasions de l’abajoue au niveau de sa jonction avec la cavité buccale sont notées. Des régions congestives associées à une muqueuse sèche et nécrosée en surface sont également relevées. En raison de la détérioration des tissus exposés, une exérèse de l’abajoue est réalisée.

TRAITEMENT

L’anesthésie est induite par un mélange d’oxygène à 100 % (1 l/mn) et d’isoflurane à 5 %, et maintenue au masque à 2 % d’isoflurane. L’animal est placé en décubitus latéral droit. Un aide maintient l’abajoue éversée en traction, à l’aide d’une pince à dents de souris, afin de rendre accessible sa portion proximale. Une ligature transfixiante est réalisée à l’aide d’un fil tressé résorbable (Vicryl(r) 3.0), placé le plus près possible de la jonction abajoue–joue. L’abajoue est ensuite sectionnée au bistouri. Le moignon est réinvaginé dans la cavité buccale, à l’aide d’un coton-tige imbibé de soluté physiologique. Il importe de prendre garde à ne pas laisser de fibres de coton dans la plaie. Le réveil s’effectue sous oxygène à 100 %. L’animal est ensuite placé en couveuse afin d’éviter toute hypothermie.

Le hamster est gardé en observation toute la journée, en vue de s’assurer d’une bonne reprise de l’activité après le réveil et de l’absence de saignements buccaux. Il est rendu à sa propriétaire dans la soirée.

SUIVI POSTOPÉRATOIRE

Des nouvelles de l’animal sont transmises par téléphone, 10 jours après l’intervention. L’activité, la prise de nourriture et de boisson sont normales à partir du soir de l’intervention et le restent. La propriétaire ne constate aucune anomalie (saignement, prolapsus du moignon). Il lui est conseillé de supprimer les sticks au miel et de les remplacer par des morceaux de fruits ou de légumes.

DISCUSSION

Le prolapsus de l’abajoue survient chez le hamster en cas de surconsommation alimentaire, lorsque la nourriture proposée est trop abrasive ou trop collante, ou lors d’infection ou de traumatisme intrabuccaux. Lorsque l’éversion survient, plusieurs choix thérapeutiques sont possibles.

→ Si l’éversion est récente et que l’abajoue ne présente pas de lésion de nécrose, elle peut être réinvaginée à l’aide d’un coton-tige (lubrifié avec un gel à base de lidocaïne) et fixée au fond de la cavité buccale en position physiologique, par une suture transfixiante, à travers la peau.

→ En cas de lésions de la muqueuse ou de récidive, l’abajoue est à amputer via la méthode proposée ci-dessus.

→ Enfin, si le prolapsus de l’abajoue est dû à un phénomène tumoral (chez le hamster, cette localisation est souvent le siège de néoplasie), l’amputation est réalisée à l’aide d’une dissection mousse et d’une hémostase fine de l’abajoue atteinte.

Bibliographie

• 1– R. A. Bennett, H. S. Mullen, Soft Tissue Surgery, In Ferrets, Rabbits, and Rodents (2^nd edition), 2004, pages 316-328.
• 2– V. Capello, Common surgical procedures in pet rodents, Journal of Exotic Pet Medicine, vol. 20 (4), oct. 2011, pages 294-307.