La “cocotte” : une bombe à retardement à désamorcer - La Semaine Vétérinaire n° 1467 du 21/10/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1467 du 21/10/2011

Dossier

Auteur(s) : NATHALIE DEVOS

Il y a 10 ans, une vaste épizootie de fièvre aphteuse touchait le Royaume-Uni. Si cet épisode peut paraître lointain, la menace demeure. Le virus est aux portes de l’Europe. Du fait de ses lourdes conséquences économiques, il est important de ne pas baisser la garde. L’OIE1 et la FAO2 rappellent qu’un seul pays défaillant peut mettre en danger le reste du monde. Aussi ont-ils annoncé la prochaine mise en œuvre d’une stratégie mondiale pour le contrôle de la fièvre aphteuse. De son côté, la France réactualise ses plans d’urgence.

C’était il y a une décennie, à quelques mois près. En 2001, une terrible épizootie de fièvre aphteuse, fortement médiatisée, touche la Grande-Bretagne. Elle est à l’origine de plus de 2 000 foyers et cause l’abattage de près de 6 millions de bêtes. Par le biais d’échanges commerciaux, la maladie a également touché l’Hexagone cette année-là, tout comme les Pays-Bas et l’Irlande.

Nul ne peut prédire la reproduction d’un tel scénario catastrophe en Europe, mais la menace est réelle. En témoigne l’incursion du virus aphteux de sérotype O en Bulgarie en janvier dernier, dans plusieurs villages du sud-est du pays, à la frontière turque (où la maladie est endémique).

La fièvre aphteuse figure parmi les maladies animales les plus contagieuses. Elle présente un caractère transfrontalier, accentué par le développement rapide des échanges internationaux d’animaux et de leurs produits. Elle engendre des pertes économiques considérables (voir article en page 34), qui affectent les filières de production organisées, mais aussi les petits éleveurs, ainsi que le commerce international des denrées d’origine animale et le secteur touristique.

Une situation contrastée selon les régions du monde

La fièvre aphteuse est internationalement répandue et seuls quelques pays développés ont pu devenir, dans un passé relativement récent, indemnes de façon durable. Ils ont rejoint ceux qui l’ont toujours été, comme l’Australie et la plupart des États insulaires du Pacifique Sud, ou qui le sont depuis longtemps, comme les pays d’Amérique du Nord. Par le passé, l’Europe a été infectée de façon enzootique ou épizootique, puis la maladie a été éradiquée dans sa partie ouest avant de faire quelques réapparitions, parmi lesquelles l’épizootie de 2001 qui a touché en premier et surtout le Royaume-Uni.

Durant les 12 dernières années, les incursions dans les régions voisines de l’Europe de l’Ouest (Afrique du Nord, Moyen-Orient, Caucase et Turquie) ont eu pour origine 5 écosystèmes viraux différents : l’Afrique de l’Ouest et centrale, l’Afrique de l’Est, l’Asie du Sud et l’Eurasie. Le Proche-Orient (notamment la Turquie) est une zone d’enzootie avec un fort potentiel de diffusion du virus dû aux mouvements d’animaux.

La fièvre aphteuse est également répandue dans de nombreux pays d’Afrique intertropicale. Plusieurs États d’Afrique australe maintiennent toutefois, de manière assez régulière, un statut indemne national ou zonal : l’Afrique du Sud, la Namibie, le Botswana, le Lesotho et le Swaziland.

En Amérique du Sud, la région du cône sud a réussi à contrôler, voire à éradiquer la maladie : la plupart des pays de cette région sont déclarés officiellement indemnes depuis quelques années, avec ou sans vaccination. D’autres États ou zones du continent restent cependant infectés, comme probablement la partie amazonienne du Brésil et, comme cela est confirmé, les pays du nord de la région andine (Venezuela, Équateur). En Asie, les sérotypes O et A sont endémiques dans plusieurs pays. Les années 2010 et 2011 ont vu le développement d’épizooties surtout dues au sérotype O en Chine, en Mongolie, au Vietnam, au Japon, en Corée (Sud et Nord).

Au total aujourd’hui, sur les 178 pays membres de l’OIE1, 96 ne disposent pas d’un statut indemne, 66 sont reconnus officiellement indemnes (65 sans vaccination et 1 avec vaccination) et 16 ont des zones reconnues officiellement indemnes (10 sans vaccination et 6 avec).

« Les pays doivent s’engager résolument aux plans politique et économique »

L’échec d’un seul pays dans le contrôle de la maladie peut avoir des conséquences graves sur ses voisins directs ou plus éloignés. D’où la volonté de l’OIE et de la FAO2, dans le cadre de leur partenariat dénommé GF-TADs3, de mettre en place une stratégie mondiale pour le contrôle de la maladie.

« La mise en œuvre d’un programme de lutte ne peut se faire avec succès que si les pays s’engagent résolument aux plans politique et économique. Mais les approches régionales sont, en raison du caractère transfrontalier de la maladie, également indispensables, de même que la coordination au niveau mondial. » C’est en ces termes que notre confrère Joseph Domenech a introduit la conférence sur « la mise en œuvre d’une stratégie mondiale pour le contrôle de la fièvre aphteuse », lors de la 79e session générale de l’OIE, en mai dernier à Paris. Cette stratégie sera présentée et discutée lors de la 2e conférence internationale à Bangkok (Thaïlande) en juin 2012. Un document sur les coûts/bénéfices des programmes de prévention et de lutte et un agenda de mise en œuvre chiffrée seront également proposés aux bailleurs de fonds et aux représentants des gouvernements. Le but est de les convaincre de l’importance d’investir dans la lutte contre cette maladie transfrontalière majeure du bétail.

L’approche progressive de la lutte contre la fièvre aphteuse : un nouvel outil

Pour mettre en œuvre cette stratégie mondiale pour le contrôle de la maladie, des outils de base sont nécessaires, comme pour toute stratégie de contrôle. Cela demande des services vétérinaires efficaces et transparents, des systèmes de surveillance épidémiologiques et d’alerte performants, des laboratoires nationaux de diagnostic et des laboratoires de référence, des plans d’urgence détaillés, des vaccins de qualité et en nombre suffisant, des données fiables issues des enregistrements géoréférencés des fermes d’élevage et des systèmes d’identification des animaux, des partenariats public/privé et avec les éleveurs. Cela passe aussi par des études socio-économiques pour évaluer les impacts de la maladie et du coût des programmes de lutte ou de prévention, et par les analyses coûts-bénéfices de ces programmes.

Mais de nouveaux outils sont aujourd’hui également disponibles. Par exemple, la finalisation récente du document PCP (approche progressive de la lutte contre la fièvre aphteuse)4, préparé par la FAO et l’OIE avec la contribution de nombreux experts, permet désormais la mise en œuvre et le suivi de la stratégie mondiale. Il décrit une série d’activités réparties en stades différents (voir schéma), qui permettront d’évaluer la phase d’avancement d’un pays et/ou d’une région dans leurs programmes de contrôle et d’éradication de la maladie. Le PCP a vocation à être un outil d’autoévaluation ou d’évaluation externe réalisé sur un mode de volontariat, à la demande des États. Il est adapté aux pays infectés et pour lesquels il est nécessaire de comprendre la situation locale (ressorts épidémiologiques, souches du virus circulant, etc.) et de préparer la mise en œuvre de programmes de lutte afin de réduire l’impact de la maladie.

En outre, l’engagement de l’OIE dans une nouvelle étape de soutien à la prévention et à la lutte contre la fièvre aphteuse se traduit notamment aujourd’hui par la proposition d’un nouvel article au chapitre viii.5 du Code sanitaire pour les animaux terrestres (Code terrestre). Cet article prévoit la possibilité pour l’OIE d’endosser les programmes nationaux de contrôle de cette maladie, qui lui seraient soumis par les pays qui le souhaitent, accompagnés par les justificatifs qui démontrent que ces programmes peuvent être mis en place avec succès.

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