Recueillir et élever à la main des jeunes animaux sauvages n’est pas toujours pertinent - La Semaine Vétérinaire n° 1457 du 01/07/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1457 du 01/07/2011

Prise en charge de la faune sauvage

Formation continue

FAUNE SAUVAGE

Auteur(s) : Florine Popelin-Wedlarski

Fonctions : praticienne au zoo de Doué-La-Fontaine (Maine-et-Loire)

Au printemps, de nombreux jeunes animaux sauvages sont considérés orphelins et recueillis, souvent à tort. Leur élevage est parfois délicat et certaines espèces ne peuvent espérer retourner à la vie sauvage.

1 SAVOIR RECONNAÎTRE UN ANIMAL ORPHELIN

Avant de vouloir ramasser à tout prix un jeune animal trouvé seul, il convient de se demander s’il s’agit effectivement d’un orphelin. En effet, dans la majorité des cas, ces animaux ne sont pas abandonnés, mais provisoirement laissés par les parents partis se ravitailler. Le cas du faon est un exemple typique : la biche ou la chevrette (femelle du chevreuil) laisse le faon dans les hautes herbes, où son pelage tacheté le camoufle, pendant qu’elle va se nourrir et revient régulièrement pour l’allaiter. Aussi, les promeneurs, marqués dans leur enfance par la tragédie de Bambi, découvrent dans la quasi-totalité des cas un faon isolé, et le recueillent, persuadés qu’il est orphelin. Dans de nombreuses espèces, les jeunes sont laissés seuls à un moment ou à un autre. Des portées entières de lapereaux ou de hérissons sont parfois recueillies au prétexte qu’elles étaient dans le nid sans la mère. Certains découvreurs essaient de s’assurer que les petits sont bien abandonnés et restent près du nid pour guetter le retour du père ou de la mère. Si cette attitude part d’une bonne intention, elle est souvent plus délétère qu’utile : les parents ne s’approchent pas du nid tant que l’homme est présent, ce qui retarde le nourrissage des jeunes, provoque leur refroidissement et leur affaiblissement, et se termine le plus souvent par un recueil, le découvreur étant alors persuadé du bien-fondé de son acte. De façon générale, un petit calme, dans son nid et chaud a le ventre plein et est donc nourri. Le ramassage doit se limiter aux animaux agités, qui essaient de sortir du nid, sont froids au toucher, l’hypoglycémie provoquée par l’absence de nourrissage par les parents se traduisant par une hypothermie.

Dans d’autres cas, les jeunes sont trouvés hors du nid, car ils le quittent avant d’être autonomes. Ils sont appelés semi-nidifuges. C’est le cas notamment des rapaces nocturnes, tels que la chouette hulotte, ou de certains passereaux, comme le merle ou l’étourneau. Les petits ne sont pas entièrement emplumés et ne volent pas encore, ou volettent maladroitement. Il s’agit d’une phase d’exploration de l’environnement pendant laquelle ils sont toujours sous la surveillance et la dépendance des parents, qui continuent de les nourrir. Ces oiseaux doivent donc être laissés en place, ou éventuellement remis à l’abri sur une branche ou dans un buisson s’ils se sont aventurés en terrain découvert, à la vue d’éventuels prédateurs.

Lorsqu’un animal est ramassé par des découvreurs un peu zélés et présenté à la clinique vétérinaire, un examen clinique rapide doit être effectué. Il permet d’établir son état d’hydratation et de nutrition : les jeunes oiseaux, comme les mammifères bien nourris, ont l’abdomen tendu et le jabot plein, pour ceux qui en possèdent un. Des traces éventuelles de plaies ou de fractures liées à la chute des branches ou à un prédateur sont également recherchées. S’il est en bonne santé et bien nourri, il ne s’agit vraisemblablement pas d’un véritable orphelin. La meilleure solution est donc de le rendre à ses parents.

2 RETOUR À LA NATURE DES JEUNES LORSQU’ILS NE SONT PAS ORPHELINS

Le jeune animal peut retourner auprès de son père et de sa mère s’il est suffisamment vif pour attirer leur attention, qu’il a été trouvé depuis moins de vingt-quatre heures (idéalement dans la journée, pour les mammifères) et que le lieu de découverte est précisément connu. Il est éventuellement possible de le réchauffer, de le réhydrater, voire de le nourrir un peu s’il a été trouvé depuis plusieurs heures. Ainsi, parfaitement en forme, il sera en mesure d’appeler ses parents qui reviendront prendre soin de lui. Même si les manipulations doivent être limitées au maximum, l’odeur humaine n’est pas forcément un obstacle définitif à la réadoption, la plupart des oiseaux, notamment, n’ayant que peu d’odorat. Il est même parfois envisageable de réintégrer des oisillons dans leur fratrie plusieurs jours ou même plusieurs semaines après leur découverte, ou de les confier à des parents adoptifs de la même espèce. C’est le cas chez les chouettes : si le jeune est capable d’émettre un cri de quémandage approprié, il peut attirer l’attention d’un adulte du voisinage qui viendra le nourrir.

Lors du dérangement ou de la destruction d’un nid, s’il est tombé par exemple à la suite d’un orage ou qu’il est découvert lors de travaux, le plus efficace est souvent de construire un substitut et d’y remettre les petits à proximité immédiate de la localisation initiale. Un panier peut remplacer un nid de passereaux détruit, ou encore une caisse semi-enterrée ou recouverte de branches et de feuilles celui de hérissons ou de lapereaux. Il convient ensuite de s’en tenir le plus loin possible afin de permettre aux parents de localiser leur nichée et de revenir s’en occuper. Les corvidés notamment (pies, corneilles) continuent souvent à défendre leurs jeunes même tombés au sol, et vont jusqu’à attaquer le découvreur qui vient les recueillir. Il va de soi que, dans ce cas, cette technique est toujours couronnée de succès.

3 ELEVAGE À LA MAIN

Dans certains cas, une prise en charge est cependant nécessaire. Deux questions doivent alors être posées : un jeune de cette espèce peut-il être élevé correctement à la main ? Une fois sevré, pourra-t-il être relâché dans la nature ?

Elever un animal à la main impose de connaître ses impératifs biologiques, notamment concernant l’alimentation (le type d’aliment, sa présentation, sa taille et la fréquence des repas), le logement (le type de nid et les substituts possibles) et le comportement (comment déclencher le réflexe de quémandage chez les oisillons, la nécessité de stimuler les jeunes mammifères pour qu’ils urinent et défèquent, etc.). Ces données sont relativement bien connues pour certaines espèces, et totalement empiriques pour d’autres. L’élevage artificiel se solde alors le plus souvent par un échec. L’expérience de la personne qui élève est également à prendre en compte. La plupart des espèces sont protégées, et à ce titre ne peuvent être prises en charge que dans le cadre d’un centre de sauvegarde. Pour les quelques-unes qui échappent à cette protection (pigeons, corneilles, pies), il convient de bien prévenir le découvreur des contraintes et des spécificités de l’élevage à la main, et d’essayer de décourager les novices de se lancer dans une telle aventure pour le bien-être et l’avenir des oisillons.

Même si l’élevage par l’homme est un succès, il n’est jamais aussi performant que son équivalent naturel, y compris chez les espèces fréquemment élevées à la main. La croissance des jeunes est toujours plus lente, les aliments ne sont pas parfaitement adaptés (le régime alimentaire dans la nature peut être en partie méconnu ou impossible à reproduire en captivité), avec des risques de carences. Enfin et surtout, l’homme ne peut pas remplacer l’apprentissage donné par les parents, notamment en ce qui concerne la recherche de nourriture, l’évitement des dangers ou encore les codes sociaux ou de communication de l’espèce (le chant, par exemple, chez les passereaux). Ainsi, même si les études font généralement défaut, il est considéré qu’un jeune élevé à la main aura toujours moins de chances de survivre à sa première année qu’un autre avec ses parents.

En outre, toute habituation ou tout attachement excessif à l’homme est un obstacle au relâcher. L’animal n’a alors pas peur de lui et peut se mettre en danger en s’approchant inconsidérément des gens, ou encore représenter un danger pour eux (comme les cervidés en période de rut).

Ainsi, même s’il est tentant de vouloir élever soi-même un petit animal pour le rendre ensuite à la nature, il est primordial de se rappeler qu’il s’agit rarement de la meilleure solution pour lui. Elle ne doit être réservée qu’aux cas pour lesquels il n’existe aucune possibilité de retour auprès d’un parent naturel.

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