Que redoutez-vous dans votre exercice pour les années à venir ? - La Semaine Vétérinaire n° 1455 du 17/06/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1455 du 17/06/2011

Entre nous

FORUM

L’obscurantisme des campagnes

Jean-Marie Nicol, praticien rural à Châteaubriant (Loire-Atlantique)

En vingt ans, nous avons délivré énormément de messages de prévention et participé au progrès sanitaire. Notre légitimité aurait dû s’en trouver accrue. Paradoxalement, nous assistons à de constantes remises en cause et à un patient démantèlement de notre maillage, dans l’indifférence de ceux qui s’émeuvent de la disparition des médecins dans les campagnes. Personne ne conteste nos qualités d’urgentistes et de “bons à tout faire en tous lieux et tous temps”. Surtout pas les spécialistes autoproclamés de la reproduction, ni les pareurs qui sont passés du préventif au curatif, encore moins les Groupements de défense sanitaire qui développent leur business-produit, monopolisent les maladies de troupeau et protègent les éleveurs de nos appétits grossiers. Pas non plus les professionnels du plan sanitaire d’élevage et du médicament préventif, délivré larga manu par les spécialistes du bon conseil parfaitement désintéressé. Ni ceux, chargés de la gouvernance, qui ont donné leur blanc-seing à une utilisation sans limite des médicaments par les éleveurs, qui aujourd’hui nous imposent de limiter la consommation des antibiotiques, et demain autoriseront l’autocertification via un réseau de techniciens. Le progrès sanitaire n’est plus à l’ordre du jour. La bêtise, en revanche, est en marche et fait un bruit assourdissant !

Ce n’est pas mon métier qui m’angoisse le plus

Laurent Sochat, praticien à Limoges (Haute-Vienne)

J’exerce en canine depuis 1984, sans crainte particulière. La pratique évolue bien et est même de plus en plus technique et intéressante. Cela fait trente ans que la perte du médicament est évoquée. Or, une grosse hypothèque a été levée par le rejet de l’amendement 50 qui prévoyait la séparation de la prescription et de la délivrance. Dont acte. Alors, inutile de se faire peur par plaisir. En revanche, la pléthore de diplômés étrangers est un problème à gérer. Le risque est que la loi belge actuelle soit de nouveau modifiée.

Pour le reste, tout se passe bien. Nous ne connaissons pas les limites du marché. C’est notre chance. Nous ne sommes pas sur un périmètre constant et l’offre génère une bonne partie de la demande. Dans ce cas, les soucis liés au partage sont moins aigus. En réalité, la composante principale, c’est le praticien. S’il est motivé, il s’en sortira. Je ne crois pas à l’arrivée des chaînes. Elles n’ont aucun intérêt à venir sur ce marché. Pour peser sur celui-ci, elles devront amener des sommes d’argent inexistantes sur ce secteur. Car, là encore, tout repose sur le vétérinaire. Il faudra le payer à sa juste valeur et il est difficilement gérable. Faire vivre une chaîne dans ces conditions est illusoire. Pour moi, la conjoncture nationale pèse plus sur la profession que les évolutions internes.

La perte du marché du médicament

Alain Delemotte, praticien rural exclusif à Anvesnes-sur-Helpe (Nord)

Je me suis installé en 1987 en rurale et force est de reconnaître que nous ne travaillons plus comme autrefois. Les exploitations sont plus importantes, nous faisons beaucoup de prévention et de suivi, il est nécessaire d’évoluer en permanence.

Cependant, ma principale crainte est de voir le marché du médicament nous échapper. Au fil des années, les marges se sont réduites. De 30 % hier, elles sont tombées à près de zéro. Aujourd’hui, entre le moment des achats et la vente des médicaments, mieux vaut être vigilant sur la trésorerie. Les clients ont du mal à nous croire, mais il nous arrive de vendre les médicaments en dessous du prix d’achat et, tant que nous n’avons pas touché les remises des laboratoires, nous vendons à perte. Qui plus est, nous sommes dans une région proche de la Belgique où la concurrence est vive et où de jeunes vétérinaires proposent des médicaments à bas prix pour se lancer.

Pour l’instant, nous n’avons pas connu de baisse de chiffre d’affaires. Mais pour le maintenir, il a fallu multiplier les visites d’élevage, les bilans sanitaires, la traçabilité, se former et se spécialiser, par exemple en pédicure bovine.

L’Etat va-t-il maintenir l’agriculture française ?

Hubert Vin, praticien mixte à Neufchâteau (Vosges)

Ma principale crainte concerne la baisse de revenus des agriculteurs. Il s’agit de savoir si l’Etat veut ou non maintenir l’agriculture en France. Sans cette volonté, tous les acteurs de la filière prendront un coup derrière la tête. Pour l’heure, je compense la disparition de mes clients par une augmentation de taille du secteur. Comme nous, les Groupements de défense sanitaire et les organismes professionnels (contrôle laitier, etc.) tentent de s’accrocher à ce qui reste de l’agriculture. Les DSV semblent partir en lambeaux ou n’ont plus les moyens de leurs ambitions. Mon autre inquiétude est de perdre le médicament, qui représente jusqu’à 70 % de nos ressources. Cela signifierait deux ou trois emplois en moins et une tarification beaucoup plus élevée des actes. De même, l’arrivée d’une chaîne est toujours à redouter, mais dans une région où il est déjà difficile de trouver des aides pour assurer le travail à faire, je doute que des low cost, et les salaires qui vont avec, y trouvent leur place. Personnellement, j’ai encore vingt-cinq années d’activité devant moi. Je me demande si je vais parvenir à suivre les évolutions techniques et technologiques de l’agriculture et de la profession. Mais pour le moment, j’ai encore le feu sacré !

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