L’histoire des vétérinaires militaires s’expose au Val-de-Grâce

Le musée du Service de santé des armées du Val-de-Grâce (Paris) propose, jusqu’au 18 septembre 2011, une exposition temporaire⁽¹⁾ qui retrace l’histoire du corps des vétérinaires militaires au gré des évolutions de l’armée française. Cette histoire parallèle, mais méconnue, débute en 1769, huit ans à peine après la création de l’école de Lyon.

A l’instar de leurs confrères civils, la reconnaissance du statut et des compétences des vétérinaires militaires n’est pas immédiate. La nouveauté de l’enseignement vétérinaire, l’origine modeste des diplômés, la concurrence des empiriques, les bouleversements liés à la Révolution et aux décennies qui suivent, entravent durablement leur autonomie en les soumettant à la tutelle régimentaire.

Les soins aux chevaux constituent l’essentiel de l’activité

S’ils obtiennent, dès 1788, l’exclusivité des soins aux chevaux, les confrères militaires devront attendre 1852 pour accéder au statut d’officier et 1878 pour la mise en place d’une première organisation territoriale vétérinaire. Dès 1876, la visite des animaux de boucherie et l’examen des viandes destinées aux troupes s’intègrent aux missions du service vétérinaire de l’armée, un rôle qui ne cessera de s’amplifier par la suite. Les soins aux chevaux demeurent néanmoins l’activité essentielle jusqu’à l’entre-deux-guerres. Si la guerre de tranchées marque la fin de la cavalerie, chevaux et mulets restent utilisés pour la traction de l’artillerie, le ravitaillement des troupes et l’évacuation des blessés. Les vétérinaires s’occupent également de chiens (employés surtout pour des missions sanitaires) et de pigeons pour les transmissions (plus de trente mille utilisés en 1914-1918).

En dehors du soutien aux combattants, le corps des vétérinaires militaires joue un rôle important dans le développement des colonies et dans la recherche. L’exposition rend ainsi justice aux contributions oubliées de confrères comme Philippe Thomas (découvreur de gisements de phosphates en Tunisie) ou Eugène Pesas (qui travailla avec Alexandre Yersin sur la peste bovine). Le Laboratoire militaire de recherches vétérinaires, créé en 1920, s’est intéressé aux maladies infectieuses et parasitaires des chevaux, à la prévention des risques liés aux agressions biologiques ou nucléaires, à l’hygiène des denrées alimentaires, aux leptospiroses et piroplasmoses, ainsi qu’aux maladies virales canines.

Une évolution vers des missions en santé publique

Avec la mécanisation de l’armée, la Seconde Guerre mondiale signe la fin de la prédominance du clinicien du cheval au profit de son confrère hygiéniste ou biologiste. En 1945, la récupération des chiens de l’armée allemande marque la naissance de la cynotechnie militaire française sous l’autorité des vétérinaires. Leurs missions s’orientent néanmoins de plus en plus vers le contrôle et la maîtrise de facteurs directement liés à la santé de l’homme(hygiène alimentaire, gestion de l’eau, recherche appliquée). Ce rôle en santé publique amène le corps à être rattaché en 1978 au Service de santé des armées.

La fin du xx^e siècle reste marquée par la disparition du service national, qui entraîne une perte annuelle de cent cinquante à cent quatre-vingts vétérinaires, compensée par une politique de recrutement. En 2010, 20 % des vétérinaires des armées ont participé à des opérations extérieures (Afghanistan, Côte d’Ivoire, Kosovo, Liban, Tchad).

Nos confrères Claude Milhaud, Patrick Perrin, Emmanuel Dumas et notre consœur Florence Calvet se sont particulièrement investis dans la préparation de cette exposition, un événement labellisé Vet2011. Le musée Fragonard et plusieurs établissements militaires⁽²⁾ ont collaboré avec le musée du Service de santé des armées pour le prêt de pièces, parmi lesquelles de nombreux objets insolites.

• (1) 1, place Alphonse-Laveran, 75005 Paris. Ouverture tous les jours (sauf lundi et vendredi) de 12 h à 18 h.

• (2) Le 8^e régiment de transmissions de Suresnes, le 132^e bataillon cynophile de l’armée de terre de Suippes, les antennes vétérinaires de Paris-Ecole militaire et de Châlons-en-Champagne, le Centre d’expertise du soutien du combattant et des forces (Cescof).