« La place de l’animal en ville fait rarement partie du projet politique d’un maire » - La Semaine Vétérinaire n° 1454 du 10/06/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1454 du 10/06/2011

Trois questions à Jean-Luc Vuillemenot

À la une

Auteur(s) : Marine Neveux

Une approche globale de la présence du vivant non humain en ville peine à voir le jour.

La Semaine Vétérinaire : Vous êtes au cœur du débat sur la relation homme-animal et des stratégies développées par les villes pour permettre une intégration harmonieuse de l’animal dans les zones urbaines. Depuis plusieurs années, faites-vous le bilan d’une évolution positive et d’une prise de conscience des communautés Ou les freins vous paraissent-ils encore importants ? A quels obstacles vous heurtez-vous principalement ?

Jean-Luc Vuillemenot : Le sujet n’est plus tabou, mais il reste soumis à l’influence majeure des mouvements d’opinion. L’évolution est positive ces dernières années, dans la mesure où il devient plus rare qu’une collectivité prenne des dispositions réglementaires drastiques. Toutefois, les réponses apportées restent liées à la propreté et à l’hygiène. Les villes sont toujours dans une orientation “technique” qui ne tient pas compte de la possibilité de modifier les comportements. Ainsi, l’offre des équipements sanitaires pour les chiens est singulièrement en baisse. Il en est de même pour les aires de liberté qui permettent aux animaux de s’ébattre. Certainement sous l’impulsion de grandes villes, le ramassage individuel des déjections canines tend à devenir la norme attendue par les collectivités.

Toujours vécue comme une nuisance, la présence du chien, mais aussi du chat, est abordée en aval. Les actions proactives d’information, d’éducation des maîtres, de services, apportées sur l’espace public restent minoritaires. Les élus n’appréhendent pas l’importance du rôle social de l’animal et l’attachement qu’il suscite chez les propriétaires. Il est d’ailleurs rare que la place de l’animal en ville fasse partie du projet politique d’un maire ! Cette absence d’approche globale empêche une réflexion stratégique d’ensemble sur la présence du vivant non humain en ville. La problématique du partage de l’espace public pour des usages différents est une question à laquelle doivent répondre les décideurs municipaux. Ils peinent encore à concevoir qu’une famille urbaine, avec des enfants, puisse plébisciter des itinéraires de détente qui autorisent le renforcement du lien entre chacun des partenaires, dont le chien.

S. V. : Des villes comme Orléans ou Chartres ne sont-elles pas pionnières avec certaines initiatives ?

J.-L. V. : Ces deux villes ont développé des programmes intéressants qui s’appuient sur des solutions réfléchies, dans le cadre d’une approche globale de l’animal en ville. L’amélioration de la propreté des rues a été pensée autour d’une palette d’actions, qui inclut : l’installation d’équipements sanitaires, l’information de toute la population sur les initiatives prises, l’éducation des propriétaires, l’incitation au ramassage individuel et une approche positive, voire même festive du sujet. La stratégie de ces collectivités vise à obtenir d’une part une amélioration du comportement des maîtres, et d’autre part un autre regard sur les animaux qui partagent la ville avec ses habitants. De nombreux acteurs sont associés à la mise en œuvre, mais une condition indispensable s’impose : une volonté politique ferme et affichée. D’ailleurs, la création d’un groupe pilote, la désignation d’un chef de projet au sein de l’équipe municipale et l’implication forte et précoce des services constituent de puissants signaux émis en direction de tous les usagers de la ville. A ce propos, il convient de rappeler le programme mis en place à Grenoble au début des années 90 et jamais remis en cause ! Les Grenoblois sont d’ailleurs les seuls usagers d’une ville à pouvoir faire appel à un éducateur canin municipal. Plus récemment, le grand Lyon (cinquante-huit communes) a institué une “mission animalité urbaine”. Malgré la dimension de l’agglomération et certains freins structurels, des innovations voient le jour dans la cité des Gaules. Les balades canines en plein cœur de Lyon sont un facteur important d’éducation des propriétaires et facilitent la perception du chien en ville par les autres usagers.

S. V. : Les rencontres “Animal et société” avaient identifié plusieurs axes de travail : éducation, formation et information, contrôle des populations citadines, rôle social de l’animal, etc. Selon vous, des évolutions concrètes ont-elles abouti à la suite de ces échanges ?

J.-L. V. : En effet, les rencontres “Animal et société” ont constitué un creuset intéressant. Elles ont produit des recommandations dont les pouvoirs publics auraient pu s’emparer sans ouvrir un débat sensible. Outre les apports théoriques et pluridisciplinaires, des pistes pour innover, expérimenter et faire un état des lieux des bonnes pratiques ont été tracées. Force est de constater que la seule réalisation a été l’édition, sur la base d’une initiative unilatérale, d’un livret d’information pour les maîtres. Les rencontres “Animal et société” n’ont pas atteint leur but. La réflexion sur la présence du vivant non humain en ville ne peut pas être exclusivement technique, et seulement entre les mains des experts concernés. Le champ d’observation est bien plus large. De nombreuses disciplines doivent participer à l’élaboration d’un programme modèle, qui pourrait ensuite être proposé aux collectivités locales. La sociologie des comportements, l’éthologie, l’urbanisme et les techniques de la communication sont au centre de ces enjeux, pour construire un vivre ensemble dont l’animal fait partie.

Le rôle social des animaux de compagnie en situation urbaine est un levier important pour mettre en avant les valeurs positives de leur présence auprès des décideurs. Un travail de coordination nationale pourrait représenter un prolongement pertinent des rencontres “Animal et Société”. Nous pourrions d’ailleurs, en raison de l’antériorité de notre expertise sur ces domaines, assumer une mission afin de mettre en œuvre des actions qui s’appuieraient sur un réseau de collectivités pilotes.

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