Points forts du congrès ECVO en ophtalmologie canine - La Semaine Vétérinaire n° 1453 du 03/06/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1453 du 03/06/2011

Congrès de l’European College of Veterinary Ophthalmology

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Laurent Bouhanna

Fonctions : spécialiste en ophtalmologie, titulaire du DESV d’ophtalmologie, praticien à Paris

La transposition du canal de Sténon, l’épisclérite nodulaire, les lésions de l’iris et la cataracte ont émergé parmi les nombreux thèmes abordés.

1 L’ÉPISCLÉRITE NODULAIRE PEUT ÊTRE DUE À UNE INFECTION À LEISHMANIA SPP.

Une étude* barcelonaise vise à vérifier que la leishmaniose est une cause d’épisclérite granulomateuse nodulaire. Dix chiens, dont l’affection est confirmée par biopsie, y sont inclus. Pour tous les cas, les prélèvements conjonctivaux et scléraux mettent en évidence des lésions similaires avec un infiltrat (pyo)granulomateux qui contient des macrophages, des plasmocytes, des neutrophiles et des lymphocytes épars. Le nombre relatif de cellules inflammatoires est semblable et, à l’examen histologique, l’aspect des infiltrats observés pour les différents cas ne présente pas de différence. La présence de micro-organismes fongiques et de mycobactéries est exclue pour tous les échantillons. A l’examen immunohistochimique, la détection de Leishmania spp. est positive pour 8 chiens (80 %), tandis que les examens sérologiques ne sont positifs pour ce parasite que dans 7 de ces cas (7 sur 8, soit 82,5 %). La recherche sérologique d’Ehrlichia se révèle négative chez tous les sujets étudiés.

Dans les zones d’endémie, il convient donc d’inclure Leishmania spp. dans les hypothèses diagnostiques des épisclérites granulomateuses nodulaires. Une détection immunohistochimique de Leishmania spp. est recommandée, car les caractéristiques histologiques et les types cellulaires inflammatoires sont similaires entre les lésions d’origine leishmanienne ou idiopathique.

2 UN TAUX DE SATISFACTION DES PROPRIÉTAIRES ÉLÈVE LORS DE TRANSPOSITION DU CANAL DE STÉNON

La transposition du canal de Sténon est une solution chirurgicale qui permet de traiter la kératoconjonctivite sèche chez les chiens qui ne répondent pas au traitement médical classique (en particulier la cyclosporineA en pommade). Une étude* évalue le taux de réussite de cette technique. Le niveau de satisfaction des propriétaires est apprécié selon le confort oculaire, les soins quotidiens, l’humidification de la surface oculaire et la vision.

Les dossiers médicaux de 56 chiens (92 yeux), qui ont subi une transposition du canal de Sténon (avec un suivi assuré par un vétérinaire ophtalmologue), sont examinés. 40 propriétaires (40 chiens, 56 yeux) sont contactés par téléphone. 37 propriétaires (37 chiens, 60 yeux) remplissent également un questionnaire qui comprend une échelle visuelle analogique. Le suivi des animaux dure en moyenne 38,6 mois (entre 1 et 109 mois). Le taux de réussite chirurgicale s’élève à 93 % (86 yeux sur 92). Les échecs (7 %, 6 yeux sur 92) sont secondaires à une intolérance à la salive (4 yeux sur 6) ou à une défaillance du canal de Sténon transposé (2 yeux sur 6). Le taux de complication s’élève à 51 % (47 yeux sur 92). 66 % d’entre elles (31 yeux sur 47) sont traitées médicalement et 34 % (16 yeux sur 47) nécessitent une autre intervention. 90 % des propriétaires (36 sur 40) acceptent une nouvelle opération. Des améliorations statistiquement significatives sont notées en phase postopératoire pour le confort oculaire, le nombre de traitements topiques quotidiens à administrer, l’hydratation de la cornée et la vision.

Cette publication montre que cette technique est toujours d’actualité pour les cas de kératoconjonctivite sèche réfractaires aux soins médicaux habituels. Cependant, un traitement continu réduit est parfois nécessaire.

3 UNE NOUVELLE TECHNIQUE POUR LES CAS DE LUXATION DE LA GLANDE NICTITANTE

Une étude* rétrospective menée chez 24 chiens (34 yeux) estime le taux de réussite, la simplicité technique et les complications d’une nouvelle procédure de remise en place de la glande nictitante luxée chez le chien. Le procédé consiste, dans un premier temps, à effectuer deux incisions conjonctivales : l’une située de 2 à 4 mm du limbe ventronasal et parallèle à celui-ci, l’autre localisée à 3 ou 4 mm sur la face bulbaire de la membrane nictitante et parallèle à son bord libre. La glande est replacée et fixée en position normale en suturant, à l’aide de points séparés en U (fil résorbable Vicryl 6.0), l’incision de la membrane nictitante aux tissus épiscléraux et sous-conjonctivaux ventraux. Les nœuds sont enfouis. Des examens ophtalmologiques (13 chiens sur 24) ou des contacts téléphoniques avec les propriétaires (11 chiens sur 24) permettent un suivi sur le long terme (11,1 mois en moyenne) des animaux. Le taux de réussite est de 87,5 %.

Chez les chiens suivis, les résultats des tests de Schirmer sont normaux et les examens biomicroscopiques ne révèlent pas d’anomalies. Lesraceslesplusatteintessontlebulldog anglais, le matin de Naples et le cocker américain. 91,3 % des animaux ont moins d’un an au moment du diagnostic. 58,3 % des prolapsus de la glande nictitante sont unilatéraux. Chez les 3 chiens qui présentent une affection bilatérale, l’apparition n’est pas simultanée (2 mois de décalage).

4 LE BICHON FRISÉ ATTEINT DE CATARACTE N’A PAS DE PRÉDISPOSITION AU DÉCOLLEMENT DE LA RÉTINE

Un groupe de bichons frisés atteints de cataracte (diabétiques ou non), chez lesquels un décollementderétineaétérecherché(par ophtalmoscopie ou par échographie), est étudié*. L’objectif consiste à déterminer si le risque de développement d’un décollement de rétine, secondaire à une cataracte, ou à la suite d’une phacoémulsification, correspond à ce qui est décrit dans des études antérieures.

27 chiens atteints de cataracte (soit 45 yeux atteints) sont retenus. 19 cataractes sur 45 ont une origine diabétique. Les examens ophtalmoscopiques ou échographiques effectués lors de la consultation initiale n’ont mis en évidence aucun décollement de rétine sur les 45 yeux. Une intervention chirurgicale de phacoémulsification est pratiquée chez 20 chiens (34 yeux). 17 de ces 34 yeux, pour lesquels une uvéite phacoclastique est diagnostiquée, sont traités préalablement à l’aide d’anti-inflammatoires. Une phacoémulsification, suivie de l’implantation d’une lentille intraoculaire, est réalisée sur 30 des 34 yeux. Une vitrectomie antérieure estpratiquée sur 5 des 34 yeux.La durée moyenne du suivi est de 16,6 mois (1,5 à 73 mois). Lors du dernier examen de contrôle, la fonction visuelle est conservée sur 31 des 34 yeux. 3 yeux (2 chiens) deviennent aveugles en raison d’un probable syndrome de rétine silencieuse ou d’une névrite optique (n = 2) et d’un glaucome secondaires (n = 1). Un décollement de rétine n’est mis en évidence pour aucun des 34 yeux étudiés.

Ces travaux suggèrent qu’au Royaume-Uni, les bichons frisés ne présentent pas de prédisposition raciale relative au décollement de la rétine associé à des cataractes ou consécutif à une phacoémulsification. Par conséquent, la réalisation prophylactique “en aveugle” d’une rétinopexie transsclérale au laser ou d’une cryopexie transsclérale n’est pas indiquée, contrairement à ce qui est souvent préconisé pour cette race.

5 PRÉVENTION DE LA CATARACTE LORS DE DIABÈTE SUCRÉ AVEC UN INHIBITEUR DE L’ALDOSE-RÉDUCTASE

La cataracte est une complication fréquente du diabète sucré dans l’espèce canine. Un essai clinique* vise à déterminer si l’administration topique d’un inhibiteur de l’aldose-réductase, le Kinostat®**, est en mesure de retarder l’apparition et la progression de cette affection chez des chiens atteints de diabète sucré.

Cette étude prospective pilote, randomisée et en double aveugle, inclut 40 chiens chez lesquels un diabète sucré vient d’être diagnostiqué et qui ne présentent aucune atteinte du cristallin. 28 animaux sont traités avec du Kinostat® et les 12 autres reçoivent un placebo (par voie topique, 3 fois par jour dans les 2 yeux pendant 12 mois). Après un an de traitement, une cataracte est observée chez 10 des 12 chiens qui ont reçu le placebo (83 %), versus 13 des 28 chiens (46 %) traités avec du Kinostat®. Les valeurs de la fraction A1C de l’hémoglobine (HbA1C***) ne diffèrent pas significativement entre les groupes placebo et Kinostat®. Par conséquent, l’apparition et la progression de la cataracte chez des chiens atteints de diabète sucré semblent être significativement retardées par l’administration topique de Kinostat®.

6 RÉPARATION D’UNE PLAIE SCLÉRALE TRAUMATIQUE À L’AIDE D’UNE GREFFE AUTOGÈNE DE FASCIA LATA

Une équipe de l’Animal Eye Care de Melbourne étudie l’utilisation d’une greffe de fascia lata en vue de réparer une plaie sclérale consécutive à un traumatisme chez un chien*. La lésion, de 5 mm de diamètre, est située à 10 h, au contact du limbe. Dans un premier temps, la conjonctive bulbaire susjacente, incisée et disséquée, révèle une hernie du corps ciliaire dans la plaie sclérale. Le greffon, un fragment elliptique de fascia lata de 12 × 20 mm prélevé en région cranio-latérale de la cuisse gauche, est placé sur le site à combler et suturé à l’aide d’un fil 8/0 de lactomère tressé (Polysorb®). Durant cette phase, le greffon est découpé aux dimensions de la plaie sclérale. La conjonctive est suturée à l’aide d’un fil 6/0 de lactomère tressé. Le traitement médical comprend une administration de cefovecine longue action, du carprofène par voie orale et de l’atropine par voie topique.

Deux semaines après l’intervention, une hyperhémie et un œdème modérés sont notés. Ils sont traités avec un collyre à 1 % de prednisolone. Le greffon permet de traiter le prolapsus du corps ciliaire, de rétablir la solidité du globe et de restaurer une structure de la sclère proche de la normale. La cicatrisation est rapide et, 3 mois après l’intervention,la fonction visuelle est normale. Aucune anomalie ou gêne oculaire n’est observée. De plus, le résultat esthétique est jugé satisfaisant.

Le fascia lata semble donc être un bon matériau pour réaliser une greffe réparatrice de plaie sclérale. En outre, une telle intervention est relativement peu coûteuse. Le prélèvement, facile à réaliser, permet d’obtenir des greffons de grande dimension.

7 DESCRIPTION D’UN CAS DE CATARACTE PAR HYPOCALCÉMIE CHEZ UN CHIEN

Un chien croisé, âgé de 6 ans, est présenté en consultation* pour des crises convulsives récidivantes et des tremblements musculaires. Le propriétaire rapporte des épisodes de démarche raide, des modifications comportementales et des troubles gastro-intestinaux. Les analyses complémentaires permettent de diagnostiquer une hypocalcémie marquée. L’examen ophtalmologique met en évidence, pour les deux yeux, une cataracte caractéristique et symétrique, avec des opacités corticales lamellaires coalescentes. Le comportement visuel n’est pas affecté et l’analyse du fond d’œil est normale. Le chien est traité, avec succès, pour une hypocalcémie aiguë. Un traitement à base de vitamineD et d’un supplément calcique par voie orale est prescrit. Ce chien est suivi pendant 3 ans. Le dernier examen révèle une légère progression de la cataracte, mais la fonction visuelle est conservée. La régularisation de la calcémie chez un sujet qui présente une hypocalcémie a donc permis de stabiliser la cataracte initiale.

8 LE LASER DIODE INTERVIENT DANS LE TRAITEMENT DES LÉSIONS PIGMENTÉES DE L’IRIS CHEZ LE JEUNE CHIEN

7 chiens de moins de 15 mois, qui présentent des lésions pigmentées de l’iris progressant rapidement, sont traités à l’aide d’un laser diode*. La prise en charge postopératoire comprend un soin topique (atropine 0,5 %) administré immédiatement après le traitement au laser, puis un traitement topique à l’aide d’acétate de prednisolone 1 % (3 fois par jour pendant 3 semaines). Des examens de contrôle sont réalisés à 3 et 6 semaines, puis à 6 et 12 mois après l’intervention. Par la suite, un suivi est pratiqué tous les ans.

L’étude inclut uniquement des cas dont les dossiers sont complets et si le suivi est effectué pendant 3 ans au minimum. Les cas retenus sont des chiens de race braque de Weimar (3), labrador (1), berger allemand (1), border collie (1) et croisé (1). Lors du premier traitement laser, l’âge des animaux est compris entre 2,5 et 15 mois (9 mois en moyenne). L’énergie appliquée est de 200 à 1 000 mW pendant 30 à 90 secondes, en mode continu. A l’exception d’une dyscorie modérée, aucun effet indésirable n’est observé sur les yeux traités et aucun signe de douleur oculaire n’est noté. Chez deux chiens, le traitement laser est répété à deux reprises, 6 et 12 semaines après la première application.

Chez ces 7 chiens de moins de 15 mois, l’extension rapide de mélanocytomes iriens présumés est stoppée grâce ce traitement, sans effets indésirables graves. L’énergie délivrée est nettement inférieure à ce que rapportent de précédentes études.

  • * M. Leiva, D. Fondevila, C. Naranjo et coll. : « Leishmania spp. causing nodular granulomatous episcleritis in dogs. »

  • * M. Rhodes, C. Heinrich, H. Featherstone et coll. : « Parotid duct transposition : a retrospective review of 56 dogs (92 eyes) from 1999 to 2009. »

  • * J.E. Premont, S.J. Monclin, M.Grauwels : « Description of a perilimbal pocket technique for surgical replacement of prolapsed nictitans gland in the dog. »

  • * B.K. Braus, C. Heinrich, H. Featherstone et coll. : « Incidence of retinal detachment in cataractous Bichon frise dogs in the UK. »

  • * F. Kador, T.R. Webb, I.D. Brass et coll. : « Topical Kinostat® ameliorates clinical development and progression of cataracts in dogs with diabetes mellitus. »

  • ** Pharmacopée humaine (médicament disponible aux Etats-Unis).

  • *** L’HbA1C est un paramètre biologique qui permet de déterminer la glycémie sur 3 mois.

  • * R.A. Grundon, C. Hardman, R.G. Stanley : « Repair of a scleral defect with an autogenous fascia lata graft. »

  • * T. Azoulay : « Hypocalcemic cataract. »

  • * I. Allgoewer, C. Jandeck, D. Ottenberg : « Diode laser therapy of pigmented iris lesions in young dogs. »

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr