99 % des chiots des animaleries américaines proviendraient d’élevages intensifs - La Semaine Vétérinaire n° 1441 du 11/03/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1441 du 11/03/2011

Puppy mills aux Etats-Unis

Éclairage

INTERNATIONAL

Les conditions de vie y sont déplorables. Les croisements sont réalisés sans souci de la consanguinité. Les chiens reçoivent des soins minimes, une nourriture de mauvaise qualité et ne sont pas sociabilisés.

L’histoire est tristement classique aux Etats-Unis : une famille craque à la vue d’un adorable chiot derrière la vitrine d’une animalerie. Dès la première visite vétérinaire, les propriétaires découvrent avec surprise que leur chiot, Kiki, « qui a des papiers, vous savez », présente une affection congénitale, des parasites intestinaux ou une infection virale.

La Humane Society of the United States (HSUS), l’équivalent de notre Société protectrice des animaux (SPA), estime que 99 % des chiots vendus dans les petshops aux Etats-Unis proviennent de puppy mills, sortes d’élevages industriels dans lesquels les conditions de vie sont pour le moins discutables. Elles s’apparentent à celles du bétail.

Les chiots transitent par des “foires aux bestiaux”

Lancaster, située au sud-est de la Pennsylvanie, est réputée pour sa communauté amish, hermétique, voire secrète. Les Amish vivent sans électricité, sans voiture ni confort moderne. Lancaster est aussi la “capitale” américaine des puppy mills. D’ailleurs, la plupart des éleveurs sont amish ou mennonites (une communauté un peu plus libérale). Ironiquement, certains Amish écoulent leurs chiots par Internet ! Mais les plus grosses ventes se font aux petshops via des intermédiaires, qui achètent des “lots” aux enchères, organisées comme une foire aux bestiaux.

500 000 chiots naissent chaque année dans ces structures

Peu après la Seconde Guerre mondiale, des fermiers du Midwest cherchaient une nouvelle source de revenus et ont répondu à la demande croissante de chiots de la part des citadins. Les petshops stimulent la demande et le cercle vicieux est lancé : l’offre doit suivre. Selon la HSUS, il y aurait plus de quatre mille puppy mills à travers les Etats-Unis. Chaque année, un demi-million de chiots y naissent, dont deux cent mille à Lancaster.

Dans ces élevages commerciaux, l’idée du profit passe avant le bien-être, le confort et la santé des animaux. Leurs employés sont accusés de maintenir des locaux insalubres. Notre enquête clandestine l’a confirmé. Les chiens ne sont là que pour se reproduire, sans souci pour la consanguinité ou leur socialisation. Il s’ensuit de nombreuses affections congénitales. Les soins vétérinaires sont minimes et la nourriture est de mauvaise qualité. Les problèmes comportementaux sont légion.

Les animaux non rentables sont sommairement tués

Récemment, un éleveur de Pennsylvanie a tué par balle ses soixante-dix chiens pour ne pas avoir à payer leur traitement antipuces, à la suite d’un contrôle surprise. Un autre éleveur de l’Etat de New York a gazé une centaine de chiens, à l’aide d’une boîte en bois raccordée au pot d’échappement de son tracteur par un tuyau.

Les autorités ont fini par tenter de réguler les puppy mills. Mais cela se révèle extrêmement ardu : les élevages sont disséminés dans des milliers de fermes amish, où les moyens de communication datent du xixe siècle. En outre, les gros élevages répartissent leurs portées à travers de multiples fermes dans la campagne environnante. Les identifier et imposer les nouvelles directives apparaît encore plus difficile.

Qu’est-il advenu de Kiki, le chiot du début de notre histoire ? Penser qu’il a été “sauvé” du système serait naïf. Etant donné la demande constante, il faut maintenant un nouveau Kiki. En considérant le taux de mortalité, peut-être faudra-t-il deux chiots pour le remplacer. Et le cercle vicieux continue…

Des directives difficiles à imposer

L’Etat de Pennsylvanie a voté, fin 2009, de nouvelles directives destinées à améliorer le sort des chiens qui passent leur vie dans des puppy mills. Les autorités et les vétérinaires d’Etat se démènent pour appliquer ces nouvelles consignes :

– accès à de l’exercice à l’extérieur ;

– température ambiante supérieure à 10 °C ;

– accès constant à de l’eau de boisson (non gelée) ;

– examen vétérinaire deux fois par an ;

– interdiction d’utiliser du grillage sur le sol des cages ;

– interdiction d’empiler les cages.

Cela implique un surcoût pour les éleveurs. Les plus grandes organisations pourront sans doute payer ces améliorations. Mais des centaines de petits élevages ont fermé, incapables de rester rentables. Les associations de protection ont soudain été submergées. Quasiment tous ces chiens ont besoin de soins : stérilisation, tumeurs, affections dentaires, cutanées, etc. Tout cela coûte cher pour des associations déjà faibles financièrement.

Ph. Z. et B. K.

La preuve sur YouTube

Les faits révélés par notre enquête clandestine sont corroborés par des vidéos visibles par tous sur YouTube. Petite sélection…

• L’histoire de Mariah, dont le nom était Tag 19, car c’était le numéro de sa boucle auriculaire : http://www.youtube.com/watch?v=XBZVAj0_pjo

• Caméra cachée dans un élevage de chiens en batterie en Virginie : http://www.youtube.com/watch?v=oxY51QlpEG0&feature=related

• Vente aux enchères de chiens par des puppy mills dans divers Etats américains : http://www.youtube.com/watch?v=vEt1rkq0Gw4

Ph. Z. et B. K
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