L’ordonnance sur l’acte vétérinaire est parue - La Semaine Vétérinaire n° 1436 du 04/02/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1436 du 04/02/2011

Profession. Dérogation d’actes

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

Les conditions dans lesquelles certains actes pourront être réalisés par des personnes qui n’ont pas la qualité de vétérinaire font l’objet d’une ordonnance législative(1).

L’ordonnance du 20 janvier 2011 était attendue depuis plusieurs semaines et reste conforme à l’accord signé l’été dernier entre les organisations professionnelles vétérinaires et agricoles(2), à quelques précisions près. Un long chemin parcouru depuis le contexte initialement difficile de la fièvre catarrhale ovine, il y a plus d’un an… L’application concrète de cette ordonnance est conditionnée au décret et à l’arrêté qui sont en attente de parution. Sur ces points, au cours de la prochaine réunion prévue le 9 février, les organisations professionnelles vétérinaires et agricoles devraient aboutir à un consensus. C’est au niveau de l’arrêté que seront précisés les actes qui pourront être réalisés par un éleveur ou un technicien (les deux n’auront pas le même statut dérogatoire). Un petit bug dans la rédaction de l’ordonnance, d’ailleurs… La liste positive des actes pour les techniciens a été oubliée, mais ce raté d’écriture du Conseil d’Etat sera corrigé d’ici à quelques jours, à la demande des différents protagonistes de l’accord.

Une définition positive et européenne de l’acte vétérinaire

L’acte vétérinaire est ainsi clairement défini dans l’ordonnance. « Nous sommes le premier Etat membre de l’Union européenne à avoir intégré, dans son droit national, la définition de l’acte vétérinaire adoptée par la Fédération des vétérinaires d’Europe, elle-même issue du rapport Durand », se félicite Michel Baussier, président du Conseil supérieur de l’Ordre. « L’ordonnance sur les actes est bien conforme aux travaux menés avec les organisations professionnelles agricoles », constate de son côté Christophe Brard, président de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), soulignant en outre le dialogue constructif établi entre les différentes familles professionnelles. « Exit la césarienne réalisée par l’éleveur, nous ne sommes pas dans l’optique de créer des brèches, poursuit notre confrère. Pas de diagnostic, pas de traitement non plus pour les techniciens. » La liste des actes dérogatoires reste fidèle à l’esprit initial d’actes de convenance : parage, écornage, etc. « Globalement, ces négociations, certes difficiles, ont bien avancé », souligne Pierre Buisson, président du Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL). En outre, « il existait un besoin de clarification, notamment pour mettre fin à l’insécurité juridique dont les éleveurs se sentaient menacés », ajoute notre confrère. Au final, « il n’y a pas de volonté, chez les organisations professionnelles agricoles, de développer un corps de techniciens en concurrence avec les vétérinaires ».

L’éleveur est reconnu en tant qu’infirmier de son élevage

L’ordonnance du 20 janvier est l’aboutissement d’un long processus, dont la maturation s’est poursuivie lors des Etats généraux du sanitaire, avec la volonté chez les éleveurs de voir reconnue la notion de soins et d’actes d’usage courant. Dans le texte, un article introduit ainsi de nouvelles possibilités pour « les éleveurs et les détenteurs professionnels d’animaux d’espèces dont la chair ou les produits sont destinés à la consommation, y compris ceux qui peuvent également être élevés à d’autres fins, comme les chevaux, ainsi qu’à leurs salariés, de réaliser certains actes de médecine et de chirurgie des animaux ». L’éleveur est ainsi reconnu comme l’infirmier de son élevage.

L’exercice illégal sanctionné à la même hauteur qu’en médecine humaine

L’exercice illégal de la médecine vétérinaire est clairement précisé et plus lourdement sanctionné : jusqu’à deux ans de prison et 30 000 € d’amende (versus trois mois de prison et 9 000 € d’amende précédemment). « Ces sanctions sont une façon de valoriser l’acte et l’exercice vétérinaires. Si l’Etat estime que l’acte vétérinaire est, de par sa contribution à la santé publique et à la protection animale, un bien public, il faut une répression du même ordre », martèle Michel Baussier. Notre confrère se félicite que les peines encourues soient alignées sur l’exercice illégal de la médecine humaine, alors qu’elles étaient auparavant moins sévèrement réprimées que pour l’exercice illégal dans la profession d’ambulancier…

Un autre élément bénéficie d’une clarification utile : le précèdent texte de 1989 avait sorti les castrations de l’exercice vétérinaire pour les espèces autres que les équidés et les carnivores domestiques ; la dérogation générale est aujourd’hui abrogée. La possibilité pour les éleveurs et les détenteurs d’animaux de réaliser cet acte particulier sera définie par filière. La rédaction est aussi affinée au niveau des techniciens, qui interviennent dans un cadre « strictement » zootechnique : « Il était utile de bien cadrer cet aspect », précise Michel Baussier.

Un autre point d’amélioration concerne « la définition de la garde », constate Pierre Buisson. Cela permettra d’éviter les dérives de certaines personnes qui se prétendraient “gardien” de l’animal pour seulement quelques heures ou jours, afin de s’octroyer la possibilité d’effectuer des actes dérogatoires… « Au final, la situation se rapproche de celle des éleveurs, qui doivent déclarer une mise en pension. » Seule cette dernière, attestée par une déclaration de mouvement, autorise le détenteur à réaliser des actes sur les animaux dont il a la garde.

Les échéances à venir concernent l’arrêté d’application

La prochaine étape est donc celle du 9 février, sur l’arrêté d’application, le projet de décret ayant été validé par les parties lors des réunions précédentes. L’établissement d’une liste positive des actes, filière par filière, est en effet un point crucial. Si la concertation continue à évoluer de façon constructive, les actes relatifs à la reproduction restent un point à résoudre.

En outre, l’une des prochaines échéances importantes pour la profession sera l’ordonnance sur le mandat sanitaire. Le calendrier impose sa parution avant l’été. La question des nouvelles notions de vétérinaire « mandaté » et « habilité », avec les responsabilités associées, a déjà été soulevée, et ne recueille pas l’adhésion. « Plutôt que d’introduire de nouvelles définitions, n’est-il pas plus simple d’identifier ce qu’est le mandat sanitaire et, dans les actes associés, de définir ceux pour lesquels le vétérinaire est mandaté par l’Etat ?, s’interroge Christophe Brard. Il n’est pas logique que notre responsabilité de libéraux soit mise en cause lorsque nous intervenons pour le compte de l’Etat. Dans ce cadre, la responsabilité du vétérinaire doit être alignée sur celle d’un agent public. »

La certification à l’exportation des animaux vivants semble, en revanche, en bonne voie. « Le vétérinaire certificateur aura le statut de vétérinaire officiel au sens de la réglementation communautaire », constate Christophe Brard. « Ce dispositif de certification est plus clair », surenchérit Pierre Buisson. Néanmoins, « il restera à mettre en œuvre le projet de gouvernance sanitaire, dans un esprit, souhaitons-le, fidèle aux plates-formes définies et aux objectifs d’efficacité établis lors des Etats généraux du sanitaire », espère notre confrère.

  • (1) Ordonnance du 20/1/2011 parue au Journal officiel du 21/1/2011.

  • (2) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1414 du 27/8/2010 en page 14.

Bornes et conditions de formation

Les dérogations formulées dans l’ordonnance sont conditionnées à des obligations, notamment de formation (initiale et continue), qui seront fixées par décret. La liste des actes dérogatoires sera établie par arrêté, filière par filière. Elle nécessitera, bien entendu, une justification de compétences de la part des éleveurs. La liste des actes sera restreinte afin de se conformer à quatre bornes : le respect des réglementations relatives à la protection animale, au médicament vétérinaire, à la certification et au mandat sanitaire. « Le décret intègre un moratoire jusqu’à 2012 », détaille Pierre Buisson. Au-delà de cette échéance, il n’y aura donc plus d’installation possible en agriculture sans un minimum requis en matière de formation d’éleveur infirmier. « Nous pourrions envisager l’établissement d’une convention entre le vétérinaire et l’éleveur, pour reconnaître les formations réalisées entre ces deux parties. »

M. N.

L’ordonnance en bref

• L’acte de médecine a « pour objet de déterminer l’état physiologique d’un animal ou d’un groupe d’animaux ou son état de santé, de diagnostiquer une maladie, y compris comportementale, une blessure, une douleur, une malformation, de les prévenir ou les traiter, de prescrire des médicaments ou de les administrer par voie parentérale ». L’acte de chirurgie des animaux est celui qui « affecte l’intégrité physique de l’animal dans un but thérapeutique ou zootechnique ».

• L’ordonnance du 20 janvier est issue des discussions des Etats généraux du sanitaire. Elle ne concerne pas les animaux de compagnie, dont la délégation d’actes pourrait faire l’objet de débats ultérieurs. Ce texte concerne donc uniquement les propriétaires ou les détenteurs professionnels d’animaux, dont la chair ou les produits sont destinés à la consommation humaine, ou leurs salariés. Ils peuvent ainsi pratiquer certains actes de médecine et de chirurgie sur leurs animaux, ou sur ceux dont la garde leur a été confiée dans le cadre de leur exploitation.

• L’ordonnance précise les conditions d’exercice des « techniciens justifiant de compétences adaptées définies par décret, intervenant dans le cadre d’activités à finalité strictement zootechnique, salariés d’un vétérinaire ou d’une société de vétérinaires habilités à exercer, d’une organisation de producteurs reconnue en vertu de l’article L.551-1, d’un organisme à vocation sanitaire reconnu en vertu du II de l’article L.201-1 ou d’un organisme relevant du chapitre III du titre V du livre VI ».

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