Les praticiens canins philippins peinent à justifier leur travail - La Semaine Vétérinaire n° 1435 du 28/01/2011
La Semaine Vétérinaire n° 1435 du 28/01/2011

Philippines

Éclairage

INTERNATIONAL

L’animal de compagnie est une notion récente et relative aux Philippines. En outre, les vétérinaires libéraux doivent faire face à des cliniques non déclarées.

Le statut de l’animal aux Philippines est loin de celui des pays occidentaux : les chiens sont souvent errants ou utilisés comme gardiens et les chats ont rarement un propriétaire. La notion d’animal de compagnie émerge depuis peu, mais essentiellement dans les milieux aisés. Ainsi, l’idée qu’un animal puisse nécessiter des soins reste peu répandue et beaucoup de Philippins pensent que les os et les déchets suffisent à nourrir chiens et chats. En outre, la consommation de viande canine existe encore, malgré son interdiction par la loi. Ces éléments ne facilitent pas la tâche des vétérinaires canins, qui peinent à justifier leur travail. Les cliniques non déclarées, tenues par des vétérinaires qui ont une autre activité principale et pratiquent des tarifs bien plus attractifs, car ils ne paient aucune charge, constituent un autre écueil.

La vaccination antirabique n’est pas obligatoire

Les opérations de convenance concernent principalement les chiens, même si la stérilisation est considérée comme un acte chirurgical majeur au vu des risques de complication. Les césariennes et les énucléations sont également fréquentes.

La vermifugation tend à prendre une part importante de la pratique, au fur et à mesure que les vétérinaires parviennent à sensibiliser les propriétaires à la gravité du parasitisme, cardiaque par exemple, fréquent aux Philippines. Les vaccinations pour les chats et les chiens sont les mêmes qu’en France. Même si la rage est endémique aux Philippines, la vaccination n’est pas obligatoire et ne nécessite pas d’identifier l’animal.

Pour le bétail, aucune vaccination n’est obligatoire à Mindanao, car l’île est indemne de fièvre aphteuse, contrairement à celle de Luzon.

Les élevages bovins, porcins et caprins donnent lieu à des visites régulières. Les vétérinaires vérifient les traitements de chaque animal, en parallèle d’un examen clinique.

Exercer une médecine poussée reste difficile : entre les limites financières des propriétaires et l’indisponibilité de certains examens complémentaires, les praticiens vont rarement au bout de leur diagnostic. Une consultation au cabinet coûte environ 4,20 €, mais n’est pas réglée si des médicaments sont délivrés, avec une marge de 30 % pour le vétérinaire. Les visites d’élevages sont facturées entre 42 et 84 €, selon le nombre d’animaux, alors que le prix d’une stérilisation de chienne s’élève à 125 €.

Le revenu moyen fluctue ainsi entre 168 € en début de carrière et 1 680 € pour un praticien bien installé.

L’Etat subventionne un programme d’insémination

Seuls quelques vétérinaires privés ont suivi une formation en insémination artificielle. La plupart travaillent dans le cadre du programme gouvernemental gratuit pour les éleveurs, Backyard, comme celui mis en place par notre confrère Jesus Augusto Flor à Iligan, dans dix villages, avec quinze femelles zébus et carabaos (buffles d’eau utilisés pour le travail au champ). Tous les trois mois, le vétérinaire se rend dans chaque village pour l’évaluation du statut des animaux par palpation transrectale, la synchronisation des chaleurs à l’aide de PGF2a à J0 et l’insémination artificielle à J3 et J4. La semence provient du Philippino Carabao Center, situé à quatre heures d’Iligan. Les taux de succès des inséminations en semence congelée sur les animaux synchronisés sont de 50 % pour les zébus et de 35 % chez les carabaos. Les dystocies sont rares et, souvent, l’éleveur n’assiste pas à la mise bas.

Ce programme est bien reçu dans les villages et l’accueil réservé aux deux vétérinaires et aux quatre techniciens qui se partagent le travail est toujours chaleureux : épis de maïs et eau de coco à volonté !

Les abattoirs sont un volet important de la profession

Il existe trois catégories d’abattoirs (A, AA ou AAA selon le degré de mécanisation), qui conditionnent la distribution de la viande : marché local, régional, ou exportation vers d’autres îles des Philippines. Beaucoup d’abattoirs publics, construits dans les années 90 et accrédités alors AA, avec une capacité de quatre cents animaux par jour, ont vu leurs équipements se détériorer. Désormais sans accréditation, ils fonctionnent au ralenti (moins de cent animaux abattus par jour), en raison de la diminution de l’aide financière de l’Etat.

Les porcs, bovins, carabaos, chèvres, chevaux sont la propriété d’un boucher, dont les initiales sont inscrites au couteau sur la peau, lorsqu’ils sont menés à l’abattoir. En attendant leur sort, les animaux sont parqués et abreuvés pendant un à trois jours, puis le lavage et l’inspection ante-mortem sont effectués : la détection d’une anomalie implique un passage en fin de chaîne. La chaîne d’abattage, si elle faisait partie du mode de fonctionnement originel, n’est plus en fonction, et la marche en avant n’est plus respectée : les animaux sont étourdis à la masse, saignés et éviscérés à même le sol. Le sang est récupéré et mélangé dans des sacs plastiques. En revanche, les techniciens parviennent à distinguer les viscères de tel ou tel animal. Ainsi, si ces dernières présentent des lésions à l’inspection post-mortem, la carcasse peut être vérifiée. En découlent la saisie partielle (le plus souvent) ou totale (si l’origine de la lésion n’est pas identifiée) et la délivrance d’un certificat d’inspection de la viande. Sans ce dernier, la vente au marché, prévue immédiatement après l’abattage, ne peut avoir lieu.

Les règles d’hygiène incluent un nettoyage (une fois par jour à une fois par semaine), la possession de trois couteaux pour chaque boucher, la récupération des eaux de lavage dans un “lagon”, la destruction au gaz et l’enfouissement ou le stockage dans une “fosse septique” des organes lésés.

Les vétérinaires philippins, compétents de par une formation adaptée, sont malheureusement assez peu sollicités, en raison de la situation économique et des cultures locales. Il en résulte quelques lacunes dans le suivi de la santé animale.

  • * Avec le soutien de l’association des anciens élèves et amis de l’ENVL.

La formation vétérinaire philippine

La formation est dispensée dans des universités généralistes (deux sur l’île de Mindanao) et dure six ans. L’admission se fait après un examen commun à toutes les filières de l’université. Seuls les étudiants les plus méritants sont autorisés à se présenter à un examen oral spécifique à la filière vétérinaire. La sélection se poursuit tout au long du cursus : sur une promotion de départ de cent étudiants, seuls vingt sortent diplômés. La formation comporte peu de pratique et aucune spécialisation. Ainsi, la plupart des jeunes diplômés débutent comme salariés dans des cliniques vétérinaires ou dans des exploitations agricoles (élevages hors sol porcins ou avicoles), afin d’acquérir de l’expérience.

Malgré l’existence d’un boarding exam, dont la validation est nécessaire à l’obtention du diplôme de vétérinaire, celui-ci n’est pas reconnu à l’étranger. Les Philippins qui s’expatrient (notamment vers les autres pays d’Asie) ne peuvent exercer qu’en tant qu’auxiliaire ou soigneur dans un élevage.

Les vétérinaires philippins doivent s’inscrire à la Philippines Veterinary Medical Association (équivalent de l’Ordre) pour obtenir leur licence. Son renouvellement est conditionné à l’accumulation d’un nombre suffisant de points, distribués lors de la convention annuelle.

G. P., M. C.
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