Le libéral doit bien se couvrir pour faire face en cas de maladie ou d’invalidité - La Semaine Vétérinaire n° 1430 du 17/12/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1430 du 17/12/2010

Prévoyance santé

Gestion

ENTREPRENDRE

Auteur(s) : Olivier Jacquinot

De nombreux vétérinaires ignorent être mal couverts par leur régime obligatoire de prévoyance santé. Les assurances facultatives qu’ils peuvent souscrire sont rarement adaptées à la profession.

Un accident de ski ou de voiture, le coup de dent d’un client à quatre pattes, un geste malheureux en cuisinant, etc., et c’est le passage à vide : plus de revenus du tout pour le vétérinaire si celui-ci n’a pas pris soin de bien s’assurer. « Il y a une véritable méconnaissance des praticiens sur leur situation en matière d’assurance », estime Christian Homassel, directeur de la mutuelle Ampli spécialisée dans les professions libérales. « La situation du vétérinaire est catastrophique par rapport à son engagement et à ses responsabilités, confirme de son côté Philippe Journet, qui exerce en Ardèche et siège au conseil d’administration d’une mutuelle au sein duquel il joue le rôle de poil à gratter. Pour percevoir des indemnités journalières, le délai de carence est de douze mois, et encore faut-il un taux d’invalidité supérieur à 66 % ! » Jacqueline Foulquier, responsable “qualité, organisation et formation” du groupe Pasteur Mutualité, une autre mutuelle spécialisée, acquiesce : « La couverture, via la Caisse autonome de retraites et de prévoyance des vétérinaires (CARPV), doit être considérée comme une base… Dans le cadre d’une maladie ou d’un accident, il n’existe aucune garantie, aucune indemnité pendant l’arrêt de travail. Or le praticien exerce souvent en clinique, il faut assurer le salaire du personnel, continuer à payer les charges et rembourser les emprunts. Il est confronté à un besoin absolu de se garantir, faute de quoi la situation peut rapidement devenir dramatique. »

Aucune indemnité journalière pour le professionnel libéral

Si les différences entre les statuts du salarié et du libéral sont de moins en moins nombreuses, il en subsiste d’importantes en matière de prévoyance, en cas de maladie ou d’invalidité. « Le vétérinaire libéral ne perçoit aucune indemnité journalière de la Sécurité sociale, souligne Christian Homassel. Pour la prévoyance, il relève de la CARPV. Chaque profession libérale a ainsi une couverture différente selon les dispositions prises par sa caisse de retraite. » Or, dans le cas des vétérinaires, la couverture offerte par la CARPV est particulièrement déficiente. « Cela tient peut-être au fait que nous relevons de l’Agriculture et non de la Santé », avance Philippe Journet. Toujours est-il que, en cas d’arrêt de travail, le vétérinaire ne perçoit rien, à moins d’être reconnu invalide à plus de 66 %. Dans ce cas, une rente lui sera versée à partir du trois cent soixante-sixième jour d’incapacité de travail. Ou, plus précisément, trois cent soixante-six jours après la reconnaissance effective de l’incapacité de travail ! « Et encore, les indemnités étant versées à terme échu, trimestriellement, il faut attendre quinze mois avant de toucher réellement quelque chose », précise Christian Homassel.

Opter pour un organisme spécialisé qui tient compte des spécificités du métier

Toutefois, contracter une assurance supplémentaire facultative ne suffit pas forcément à bien se couvrir. « Il faut absolument se tourner vers les mutuelles qui connaissent bien notre profession, notre situation », insiste Philippe Journet. En effet, pour déterminer le niveau de handicap professionnel, les compagnies ou les mutuelles d’assurances généralistes se fondent sur un barème dit fonctionnel, qui ne tient pas compte des spécificités du métier. Ainsi, par exemple, le taux d’invalidité pour un pouce hors d’usage sera estimé à 10 %, alors qu’un organisme spécialisé pourra considérer – selon un barème dit professionnel ou, plus souvent, une expertise – ce handicap à 100 %.

« Il y a trois familles de risques (voir glossaire) en matière de prévoyance santé du vétérinaire, explique Christian Homassel. L’incapacité temporaire totale (ITT) pour laquelle il est possible de se couvrir afin de percevoir des indemnités journalières, l’incapacité permanente partielle ou totale (IPP ou IPT) qui ouvre droit à une rente d’invalidité, et la perte totale et irréversible d’autonomie (PTIA) qui est assimilée au décès. Cependant, il y a souvent confusion entre les garanties invalidité et PTIA. Or cette dernière ne couvre pas l’invalidité, même totale ! » Et Jacqueline Foulquier de préciser : « Pour ces différents risques, il convient de se couvrir selon sa situation. D’abord pour pallier l’absence de revenus et couvrir ses propres besoins avec des indemnités journalières. Dans ce cadre, différentes formules sont possibles : la garantie peut débuter dès le quinzième jour d’arrêt de travail et aller jusqu’au trois cent soixante-cinquième, afin de couvrir la période de carence de la CARPV. Ensuite, il peut être utile d’opter pour une garantie d’indemnités journalières de longue durée, afin de compléter la rente versée par la CARPV. Ou encore de choisir une garantie invalidité, qui permet de compenser une perte de revenus partielle ou totale. » Car si la CARPV prend en charge l’invalidité de plus de 66 %, c’est sur la base d’un barème croisé professionnel et fonctionnel.

Rien n’est prévu pour la reconversion des jeunes ou la maternité des femmes

Une autre nécessité absolue consiste à couvrir les frais professionnels, les charges comme les salaires des collaborateurs, les factures d’électricité, etc. Pour évaluer le montant à assurer, il convient de se reporter à la déclaration fiscale ou au prévisionnel. Il faut également souscrire une rente invalidité en cas d’IPP ou d’IPT, ainsi qu’un capital décès-PTIA. « Toutefois, là encore, ce capital n’est versé qu’au conjoint marié, pas pacsé. C’est le cas également pour la pension de réversion. »

Quant aux « jeunes diplômés, ils ont également intérêt à prévoir un capital reconversion au cas où ils seraient amenés à changer de métier, note Jacqueline Foulquier. Les femmes doivent souscrire une couverture maternité, en veillant à la prise en charge d’une éventuelle grossesse pathologique. Enfin, il y a naturellement la responsabilité civile professionnelle. Les cotisations sont faibles, mais c’est indispensable. »

Jacqueline Foulquier lance un autre avertissement à propos des pactes d’associés, les contrats d’exercice en groupe, notamment dans le cadre des sociétés d’exercice libéral (SEL). En effet, l’imprécision dans la rédaction du contrat peut empêcher une bonne couverture assurantielle. « Pour construire un règlement intérieur, il faut s’adresser à un avocat spécialisé ou au Conseil supérieur de l’Ordre qui propose des contrats types. »

L’assurance santé en cas d’emprunt est une autre lacune à combler

Depuis le 1er septembre dernier, la banque prêteuse ne peut refuser que l’assurance de l’emprunt soit souscrite auprès d’un autre organisme. Cette possibilité de délégation d’assurance est essentielle. En effet, les garanties d’emprunt généralistes, qui ne tiennent pas compte des spécificités de la profession, reposent sur le barème fonctionnel et considèrent que, même privé d’un pouce ou d’un index, un vétérinaire peut exercer sans réel problème son activité… « Vraiment, il est essentiel que les confrères s’adressent à des mutuelles ou à des compagnies spécialisées qui connaissent réellement notre spécificité, insiste Philippe Journet. En plus, les tarifs de ces assurances supplémentaires ne sont pas si élevés qu’on pourrait le craindre. Surtout dans le cadre du dispositif Madelin, qui permet 40 % de déduction de ce coût ! » Jacqueline Foulquier apporte cependant une nuance : « Pour un jeune vétérinaire, le cadre Madelin n’est pas forcément le plus adapté, car c’est un engagement à cotiser tous les ans jusqu’à la retraite. Mieux vaut peut-être privilégier une assurance-vie classique. » Mais là, il s’agit de fiscalité, plus de prévoyance…

Glossaire

• ITT (incapacité temporaire de travail ou incapacité temporaire totale) : impossibilité physique ou psychique d’exercer.

• PTIA (perte totale et irréversible d’autonomie) : impossibilité absolue et définitive d’exercer toute activité et nécessité de l’assistance d’une tierce personne pour accomplir les actes de la vie courante.

• IPP (invalidité – ou incapacité – permanente partielle) : à la suite d’un accident ou d’une maladie, le vétérinaire est devenu partiellement invalide, mais peut quand même exercer une activité qui lui procure gain ou profit.

• IPT (invalidité – ou incapacité – permanente totale) : à la suite d’un accident ou d’une maladie, le vétérinaire est devenu invalide à un taux supérieur à 66 % et ne peut plus exercer une activité lui procurant gain ou profit.

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