La communication est aussi chimique dans le règne animal - La Semaine Vétérinaire n° 1428 du 03/12/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1428 du 03/12/2010

Phéromones. 15e anniversaire de Phérosynthèse

Actualité

Auteur(s) : Marine Neveux

La sémiochimie et l’éthologie appliquée étaient à l’honneur du 19 au 20 novembre dernier à Apt (Vaucluse).

La communication chimique est fondamentale dans la relation entre les êtres vivants », a souligné notre confrère Patrick Pageat en introduction d’un événement d’ampleur : le premier symposium international sur la communication chimique en France. Il était organisé par Phérosynthèse et Ceva, à l’occasion du quinzième anniversaire de l’institut de recherche créé par Patrick Pageat avec Hugues Lucas de Leyssac. Un challenge en 1995, pour une discipline qui, en plus d’une décennie, a conquis des adeptes, même s’il reste encore beaucoup de pistes à explorer. L’activité de l’institut est pérenne, comme en témoignent aujourd’hui les nombreux projets de recherche en cours, mais aussi l’intérêt des quelque deux cents congressistes venus de tous les coins du monde à ce symposium. Le thème des sémiochimiques (dont font partie les phéromones) a été abordé dans toutes les espèces animales, aussi bien domestiques que sauvages.

L’organe voméro-nasal est exploré, mais pas seulement

L’organe voméro-nasal a fait l’objet de plusieurs études. Les expériences de Kenneth K. Booth (université de Pretoria, Afrique du Sud) montrent ainsi, chez la brebis et l’agneau, l’implication de cet organe dans la reconnaissance mère-petit.

« En dix ans, nous avons recueilli des preuves de plus en plus nombreuses de l’existence des phéromones chez les oiseaux », a souligné pour sa part Iltud Madec (Madagascar). A l’issue de ces travaux, les sécrétions des glandes uropygiales de la poule pourraient ainsi être considérées comme une phéromone. « Les poussins nouveau-nés sont comme attirés et ils semblent les percevoir comme une protection. »

Les études sur les phéromones prennent donc une nouvelle dimension dans le contexte du bien-être animal, ou du moins de la bien-traitance. Il devient en effet envisageable de diffuser une phéromone chez des sujets qui n’ont jamais été en contact avec la mère. Cela serait en outre intéressant en termes de gain de poids.

L’exemple dans l’espèce porcine peut aussi témoigner de ces potentielles applications au niveau des filières. « La phéromone maternelle de la truie est la première aux vertus apaisantes qui a été décrite », a souligné Patrick Pageat. Cette phéromone maternelle apaisante est identifiée en 1997 à partir des sécrétions sébacées mammaires : « Elle joue un rôle important dans l’interaction truie-porcelets, permet aussi une diminution des agressions et semble être un acteur majeur des relations sociales. » La phéromone du verrat (androsténone) a été la première commercialisée dans cette espèce pour la reproduction.

« Les phéromones, avec d’autres facteurs comme les contacts sociaux et l’expérience, permettent de comprendre le comportement chez les canidés », a expliqué Jaume Fatjo (département de psychiatrie, université de Barcelone, Espagne). En outre, « certaines phéromones ont une transmission directe, d’autres sont abandonnées dans l’environnement ». Bien entendu, les sécrétions animales comprennent également des hormones et des métabolites. Ainsi, pour comprendre le profil chimique d’un individu, il faut aussi prendre en compte sa flore microbienne, l’environnement et les signaux des autres espèces.

De multiples applications chez les carnivores domestiques

Chez l’animal de compagnie, les phéromones ont déjà plusieurs applications concrètes et les praticiens disposent de produits commercialisés. « L’anxiété est le trouble le plus fréquent », estime notre consœur australienne Kersti Seksel (service de comportement animal de Sydney). Le traitement a trois composantes : l’environnement, la modification du comportement, et la médication. Cette dernière peut ainsi faire appel aux phéromones F3, F4 et DAP (dog appeasing pheromon) sur l’environnement et les objets qu’il contient. Plusieurs publications abordent l’emploi de ces phéromones. « J’utilise Feliway® et DAP® lorsque le chaton ou le chiot est nouvellement introduit dans la maison, lors de transport, dans la salle d’attente de la clinique, la salle de consultations, durant les situations potentiellement stressantes, dans les cages d’hospitalisation, etc., témoigne notre consœur. Je choisis des phéromones d’apaisement lors d’agressivité entre chats, en prévention de la peur et du stress. Les phéromones sont délivrées au client avec des conseils de comportement. »

D’autres conférenciers sont venus témoigner de ces applications chez l’animal de compagnie.

Mais qu’en est-il chez l’homme ? Le sujet peut paraître plus délicat à aborder. Patrick Pageat a néanmoins lancé des travaux, en collaboration avec le service de pédiatrie de l’hôpital de La Seyne-sur-Mer. « L’utilisation d’analogues de synthèse de sécrétions odorantes maternelles apparaît comme une technique prometteuse. » Rendez-vous est d’ores et déjà donné à la sémiochimie appliquée et clinique dans deux ans, pour un autre symposium international.

Les phéromones : une pierre pour bâtir le bien-être ?

Xavier Manteca (école vétérinaire de l’université de Barcelone) a replacé les phéromones dans le contexte de la recherche sur le bien-être chez les animaux de production. En effet, l’absence d’un état émotionnel négatif, mais aussi la possibilité d’exprimer un comportement normal pour l’espèce, font partie des composantes du bien-être animal. La Commission européenne a d’ailleurs lancé le projet Welfare quality pour les animaux d’élevage. Le comportement y est inclus : expression de comportements sociaux, relations harmonieuses avec l’homme, statut émotionnel de l’animal satisfaisant, etc. A ce titre, Xavier Manteca estime que l’environnement de l’animal va bien au-delà du bâtiment d’élevage, même s’il est important d’agir sur la formation, les locaux, la génétique, etc. Les recherches sur les phéromones pourraient être intéressantes dans ce contexte.

M. N.
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