Les relations hôtes-salmonelles sont encore loin d’être expliquées - La Semaine Vétérinaire n° 1425 du 12/11/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1425 du 12/11/2010

Rencontre internationale. Symposium I3S

Actualité

Auteur(s) : Florence Humbert

Pourquoi les salmonelles s’installent, ou non, en portage sain chez les volailles ? Pourquoi certaines souches provoquent une maladie, ou a contrario aucun symptôme ? La première session du symposium international I3S, qui s’est tenu du 28 au 30 juin dernier à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), a tenté de répondre à ces questions, en s’appuyant sur plusieurs expérimentations. Celles-ci ont notamment concerné l’étude de la colonisation de poussins par Salmonella Senftenberg, un sérotype qui, bien qu’il soit présent massivement dans certains couvoirs, semble “disparaître” de l’aval de la filière ; les relations entre macrophage, anticorps et bactérie pour tenter de comprendre la persistance de S. Typhimurium chez le porc ; la caractérisation de gènes de virulence (chromosomiques ou îlots de pathogénicité) chez les isolats retrouvés chez l’homme, etc.

D’autres présentations ont rappelé l’extrême diversité génomique des salmonelles (comparaison de quarante souches entièrement séquencées) et l’instabilité d’une bonne partie de ce génome, surtout dans le cas des hypermutants (exemple d’une Salmonella Heidelberg où hypermutation et adhésion renforcée aux cultures cellulaires vont de pair). Les relations hôtes-salmonelles sont donc encore loin d’être expliquées !

En termes d’antibiorésistance, les salmonelles se comportent comme E. coli

Pour la session « identification, typage et détection des salmonelles », les méthodes traditionnelles de culture bactérienne (milieux, température d’incubation, facteurs sélectifs, etc.) ont été passées en revue.

Comme les résultats de toutes ces cultures ne donnent qu’une réponse de type “présence/ absence”, la technique polymerase chain reaction (PCR) en temps réel est proposée pour moderniser celle du nombre le plus probable et donner la quantité de salmonelles contenues dans un échantillon.

Dans cette session, les techniques de caractérisation moléculaire (PCR multiplex, analyses du polymorphisme, typage MLVA(1), etc.) ont supplanté les présentations consacrées au typage traditionnel (phages par exemple).

En pratique et du côté de l’échantillonnage, la meilleure façon de contrôler une usine d’aliments du bétail reste d’analyser des poussières et des débris de fabrication prélevés à proximité des points critiques de la chaîne de fabrication. L’analyse des échantillons d’aliment est bien moins sensible.

Concernant l’antibiorésistance, les salmonelles se comportent comme E. coli (résistance aux céphalosporines de troisième génération, présence de β-lactamases). Le problème est “sans frontières” : il y a émergence en France du sérotype S. Kentucky résistant à la ciprofloxacine qui a pour origine des poulets importés d’Afrique, et similitude entre les populations de S.Virchow mutirésistantes isolées de patients en Grande-Bretagne et de poulets en Pologne. De plus, des résistances croisées entre désinfectants et antibiotiques sont décrites : certaines salmonelles, entraînées au laboratoire à résister aux ammoniums quaternaires, présentent une moindre sensibilité aux β-lactamines, phénicolés et quinolones.

La lutte contre les rongeurs et le nettoyage désinfection sont primordiaux

Les rongeurs restent un facteur de risque particulièrement important de la contamination des élevages de volailles ou de porcs. Des chercheurs anglais ont montré, d’une part, que les salmonelles isolées chez les animaux d’un élevage sont totalement identiques à celles des rongeurs piégés dans ce même élevage et, d’autre part, qu’il existe une forte corrélation entre le nombre de souris piégées et le niveau de contamination par les salmonelles d’une exploitation. En outre, les rongeurs piégés en élevage et transférés en animalerie continuent de multiplier et d’excréter la même salmonelle pendant plus de quinze mois (période au terme de laquelle ils sont euthanasiés).

Les chercheurs belges, quant à eux, se sont intéressés aux sites de ponte, où S. Enteritidis persiste malgré la vaccination (qui diminue l’excrétion sans assurer l’élimination). A raison de cent échantillons par élevage, une faible contamination résiduelle après nettoyage-désinfection (1,5 % de positifs) repart à la hausse dès le début de la ponte du lot suivant (22,5 %). C’est donc le nettoyage et la désinfection qui pèchent, concluent-ils.

En médecine humaine, vers le début d’un calcul coût/bénéfice ?

Une présentation allemande a quantifié les conséquences des infections humaines par les salmonelles et celles dues à cinq autres affections gastro-intestinales. Comparées aux Campylobacter, Listeria, norovirus, rotavirus et E. coli STEC, les salmonelles sont responsables du plus fort taux de décès, mais n’arrivent qu’au quatrième rang en perte d’années de vie de travail, compte tenu de l’âge (très) avancé des patients qui décèdent de salmonellose. Selon les auteurs, le taux de mortalité n’est pas le meilleur indicateur pour établir des priorités en termes de santé publique, surtout lorsque les crédits sont en baisse.

Il a aussi été question, lors de ce symposium, des salmonelloses chez les jeunes enfants, associées à la détention de reptiles, et des jus de fruits frais en tant que vecteur alimentaire de salmonelles.

  • (1) Multiple locus variable number of tandem repeats analysis.

L’I3S en bref

Le symposium international I3S, qui a lieu régulièrement tous les quatre ans à Saint-Malo, est le rendez-vous de tous ceux qui travaillent sur la « problématique salmonelle », que ce soit dans les différentes filières animales (reptiles et nouveaux animaux de compagnie compris), en médecine humaine, et même chez les végétaux où les salmonelles participent à un modèle de colonisation des laitues.

F. H.
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