Les systèmes herbagers sont globalement plus vertueux - La Semaine Vétérinaire n° 1423 du 29/10/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1423 du 29/10/2010

Impact environnemental des systèmes d’élevage en bovin allaitant charolais

Formation continue

RURALE

Auteur(s) : Serge Trouillet

Des modélisations montrent le rôle prépondérant des animaux dans les émissions de gaz à effet de serre.

Manger de la viande bovine contribue-t-il à “tuer” la planète ? Ces dernières années, à travers notamment le protocole de Kyoto entré en vigueur en 2005, ou le rapport de la FAO sur l’impact de l’élevage sur l’environnement (Livestock’s long shadow, 2006), la filière viande a été mise sous les projecteurs de l’actualité. Le méthane est considéré à l’échelle nationale comme le troisième gaz à effet de serre (GES) responsable du dérèglement climatique, après le gaz carbonique (CO2) et le protoxyde d’azote (N2O). Il est imputable, à hauteur de 79 %, à l’agriculture, et plus particulièrement à l’élevage de bovins. Des essais menés à l’Institut national de la recherche agronomique de Clermont-Ferrand-Theix montrent qu’un apport de 6 % de lipides issus de graines de lin réduit la production de méthane des vaches laitières de 30 % en moyenne(1).

Une autre équipe clermontoise de l’Inra, spécialisée en économie et gestion d’exploitation d’élevage(2), s’est intéressée à l’évaluation environnementale de plusieurs systèmes d’élevage. Il s’agissait de vérifier la réalité de ces émissions, et d’apprécier les différences significatives entre les systèmes. Patrick Veysset, ingénieur de recherche, rapporte : « Nos évaluations économiques nous ont conduits à collecter tous les intrants et les sorties d’une exploitation. En plus de les passer au filtre de l’économie, avec un modèle de pondération en euros, nous les avons soumis à une grille environnementale, Planète, qui est un modèle d’évaluation des consommations d’énergie non renouvelable (ENR) et des GES. Cet outil traduit ces données en bilans énergie et carbone, donc en coût environnemental du kilo de viande ou de céréales produit par l’exploitation. » Les résultats montrent que l’interprétation publiée des émissions de gaz à effet de serre, rapportée au kilo de viande produit, dépend des paramètres pris en compte.

Bien différencier les émissions nettes des émissions brutes de GES

A l’échelle de l’exploitation, le méthane représente 60 % des émissions de GES, quand la part du CO2 issu de la combustion du gasoil ou de l’électricité nécessaire au fonctionnement de l’élevage est de l’ordre de 3 à 4 %! Le reste est principalement constitué de N2O, qui vient de l’épandage des engrais azotés, mais également des déjections animales. Ainsi, les animaux sont responsables, à eux seuls, de 75 % des émissions de GES, ce qui limite la marge de manœuvre. L’équipe de Patrick Veysset a par ailleurs fait tourner ses modèles afin d’effectuer l’évaluation productive, économique et environnementale de quatre grands types d’exploitation, caractéristiques de la zone charolaise (Saône-et-Loire, Nièvre, Allier, Creuse et Puy-de-Dôme) : producteurs de maigre (broutards) en zone tout herbe ; producteurs de maigre en polyculture-élevage, avec de grandes surfaces en culture ; naisseurs-engraisseurs intensifs de taurillons gras avec du maïs ; naisseurs-engraisseurs de bœufs en cycle long avec de l’herbe.

Selon Patrick Veysset, « pour évoquer les émissions de GES, il faut savoir à quoi se rapporter. Pour un système engraisseur intensif, il s’agit de 14,3 t équivalent CO2 par tonne de viande vive produite. Pour un système maigre tout herbe, de 17,1 t (+ 20 %). Mais, si le stockage de carbone sous prairie est intégré, la compensation est de 13 % pour le premier, et de 22 % pour le second. Au final, les émissions nettes sont de 12,5 t pour le premier et de 13,4 t pour le second (+ 7 %). Un système engraisseur de bœufs à l’herbe présente des émissions brutes plus élevées de 4 % qu’un engraisseur intensif de taurillons au maïs, mais des émissions nettes plus faibles de 8 % ! De ce point de vue, les systèmes herbagers sont comparables aux systèmes intensifs. Les GES, cependant, ne sont pas les seuls indicateurs environnementaux. Quels doivent être les résultats des analyses d’eau, de biodiversité sous et sur les sols sur lesquels sont engraissés les animaux des feed lots américains ? » Le chercheur rappelle qu’en France, 60 % de la viande bovine est produite par les élevages allaitants, situés majoritairement en zones herbagères, avec des vaches qui pâturent pendant six à sept mois de l’année et un chargement qui ne dépasse pas 1,5 UGB !

Seules des incitations économiques ciblées auront un impact sur l’environnement

Les modèles ont par ailleurs l’avantage de permettre de faire varier les paramètres. Dans un contexte d’augmentation forte du prix des intrants (l’énergie notamment) et de faible hausse des produits agricoles (projection à quinze ans de la FAO et de l’OCDE), les agriculteurs seront contraints d’adapter leurs systèmes pour limiter la baisse de leurs revenus, voire l’optimiser. Ils le feront avec des marges d’autant plus grandes que leur activité sera diversifiée, mais le bénéfice environnemental, sur la consommation d’ENR et les émissions de GES, sera toujours marginal. Selon Patrick Veysset, « pour que l’impact sur l’environnement soit réel, il faut explorer d’autres voies (animales, réorganisation de systèmes, etc.). Sur le réseau d’exploitations que nous suivons, notre constat est que les éleveurs sont réactifs aux incitations économiques dont ils bénéficient. Leur ciblage doit être pertinent. Par exemple, en direction de la désintensification des systèmes hyperintensifs à base de maïs et de céréales, préjudiciables entre autres aux eaux de percolation… ».

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1349 du 27/2/2009.

  • (2) Cette équipe appartient à l’unité de recherche sur les herbivores (URH).

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