Les corticoïdes entrent dans le traitement et la prévention de la pousse équine - La Semaine Vétérinaire n° 1422 du 22/10/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1422 du 22/10/2010

Maladie obstructive des voies respiratoires profondes

Formation continue

ÉQUIDÉS

Auteur(s) : Anne Couroucé-Malblanc

Deux études récentes ont évalué l’efficacité de différentes molécules et voies d’administration chez les chevaux poussifs.

Les corticoïdes font partie de l’arsenal thérapeutique pour le traitement de la maladie obstructive des voies respiratoires profondes (MOVRP ou “pousse”), mais également lors d’autres affections de l’appareil respiratoire profond telles que la maladie inflammatoire des voies respiratoires profondes (MIVRP ou IAD en anglais) ou la pneumonie interstitielle par exemple. Ils peuvent être administrés par voie orale, injectable, par inhalation (aérosol) ou nébulisation.

Efficacité de la dexaméthasone et de la prednisolone par voie orale

L’étude de Mathilde Leclere et son équipe(1) s’intéresse à l’efficacité de la dexaméthasone et de la prednisolone en présence d’allergènes. Les auteurs ont formulé trois hypothèses :

– ces deux molécules, administrées par voie orale, améliorent la fonction pulmonaire chez des chevaux poussifs, même lorsqu’ils sont maintenus dans un environnement contenant des allergènes ;

– la dexaméthasone, administrée par voie orale à la dose de 0,05 mg/kg une fois par jour, est plus efficace que la prednisolone, administrée par la même voie, à la dose de 2 mg/kg ;

– la prednisolone entraîne moins de suppression du cortisol endogène après sept jours de traitement.

Sept chevaux poussifs de 20 ans (± 1,2 an) sont retenus dans cette étude. Ceux qui étaient préalablement au pré, pendant six semaines au minimum, sont placés dans des box avec une litière de paille et nourris avec du foin de mauvaise qualité. Les chevaux 1, 3, 5 et 7 sont traités en premier lieu avec de la dexaméthasone, les chevaux 2, 4 et 6 avec de la prednisolone. Ce premier traitement est suivi d’une période de washout de deux semaines. Le second traitement est ensuite effectué chez les chevaux 1, 3, 5 et 7 avec la prednisolone et chez les chevaux 2, 4 et 6 avec la dexaméthasone.

L’étude met en évidence que les deux molécules améliorent la fonction pulmonaire du cheval, la dexaméthasone étant néanmoins plus efficace que la prednisolone aux doses utilisées ici. En outre, ces travaux démontrent que de faibles doses de dexaméthasone administrées par voie orale sont efficaces. Cette bonne efficacité, non observée dans de précédentes études, peut être due, d’une part, à la modalité d’administration du médicament (les chevaux sont nourris soixante à quatre-vingt-dix minutes après le traitement, et non immédiatement après) et, d’autre part, à la forme galénique de la dexaméthasone (la présente étude utilise une poudre destinée à la voie orale, alors que les précédentes avaient choisi une forme injectable).

Ainsi, la dexaméthasone et la prednisolone administrées par voie orale aux doses respectives de 0,05 et 2 mg/kg, une fois par jour, le matin de préférence, améliorent la fonction pulmonaire chez des chevaux poussifs, même soumis de façon continue à des allergènes. La première est néanmoins plus efficace que la seconde, dont il faudrait augmenter la dose afin d’obtenir une réponse anti-inflammatoire comparable. En outre, selon les auteurs, le fait qu’il y ait moins d’effets secondaires perceptibles avec la prednisolone peut être lié à une efficacité moindre aux doses ou à la fréquence d’administration communément utilisées.

Efficacité de la fluticasone par aérosol pour la prévention ou le traitement de la pousse

L’étude de N. Edward Robinson et ses collaborateurs(2) s’intéresse à l’efficacité de la fluticasone administrée par aérosol (EquineHaler, http://equinehaler.com, voir photo 1).

Neuf chevaux poussifs de 24,7 ans (± 6 ans) sont inclus dans cette étude, au cours de laquelle l’efficacité de la fluticasone (administrée par voie aérosol aux doses de 3 et 6 mg par cheval, deux fois par jour) est comparée à celle de la dexaméthasone (administrée par voie intraveineuse, une fois par jour, à la dose de 0,1 mg/kg), d’abord pour le traitement, puis pour la prévention de la pousse.

Ces travaux mettent en évidence que la fluticasone, administrée à forte dose (6 mg, deux fois par jour) avec l’EquineHaler, a des effets bénéfiques pour le traitement initial de la pousse et qu’elle peut être utilisée pour la prévention de l’apparition d’une crise chez des animaux poussifs en rémission.

Lors de l’évaluation de l’effet préventif, les chevaux ont été traités trois jours avant d’être mis au box, et pendant quatre jours après.

Les auteurs concluent que cette dose de 6 mg de fluticasone par cheval, administrée deux fois par jour, est aussi efficace que la dexaméthasone administrée par voie intraveineuse une fois par jour pour la prévention des crises, mais semble moins efficace pour le traitement de courte durée. La dose de 3 mg ne permettait pas, quant à elle, d’améliorer le score clinique de l’animal.

Selon les auteurs, pour améliorer l’efficacité de la fluticasone et éventuellement diminuer la dose utilisée, il serait intéressant de traiter le cheval dans les minutes qui précèdent le traitement avec un bronchodilatateur (comme le salbutamol, par exemple).

En pratique, quels corticoïdes et quelles voies utiliser ?

Les voies d’inhalation par nébulisation, ou par flacon pressurisé avec valve doseuse, nécessitent un matériel spécifique, mais présentent l’avantage de diffuser le principe actif directement dans les voies respiratoires profondes et de limiter les effets secondaires des corticoïdes.

• L’administration par voie orale

La dexaméthasone (0,05 à 0,1 mg/kg) et la prednisolone (1 à 2 mg/kg) sont disponibles sous forme de poudre ou de comprimés dans la pharmacopée humaine ou vétérinaire (Mégasolone® 20). Il convient de préparer des doses journalières et d’administrer cette poudre en la mélangeant avec une poignée de granulés humidifiés (pour éviter que le cheval ne souffle dessus), avec de la compote de pomme par exemple, ou encore dans une seringue avec de l’eau pour la faire avaler directement. L’administration du médicament a lieu le matin de préférence, et avant le repas : il convient de prévoir de nourrir le cheval soixante à quatre-vingt-dix minutes après. Selon la molécule, le coût journalier varie :

– avec Megasolone® 20, environ 19 € pour un cheval de 500 kg (dose de 1 mg/kg) ;

– avec la prednisolone (flacon de 5 g), 3,4 € pour un cheval de 500 kg (dose de 1 mg/kg) ;

– avec la dexaméthasone (flacon de 5 g), 0,5 € pour un cheval de 500 kg (dose de 0,1 mg/kg).

• L’administration par voie injectable (intraveineuse ou intramusculaire)

La dexaméthasone (0,05 à 0,1 mg/kg en dose d’attaque) en forme injectable, par voie intraveineuse ou intramusculaire, est à administrer le matin de préférence (entre 8 h et 10 h).

Le coût journalier du Dexadreson®, par exemple, est d’environ 12,5 € avec la dose d’attaque de 0,1 mg/kg pour un cheval de 500 kg.

• L’administration par aérosol

Les molécules disponibles pour cette voie d’administration sont la béclométasone, à raison de 500 µg par cheval, deux fois par jour (Béclométasone® Teva ou Bécotide® 250 µg par exemple, flacon pressurisé avec embout buccal et valve doseuse de 250 µg/dose) ou le fluticasone à la dose de 1 à 6 mg par cheval, deux fois par jour (Flixotide 250® flacon pressurisé avec valve doseuse de 250 µg/dose).

L’administrationse fait au moyen d’un masque “adaptateur” entre le flacon pressurisé avec valve doseuse et le naseau du cheval (Equine Aeromask® ou l’EquineHaler®, voir photos).

Le coût journalier est d’environ 0,6 € par cheval pour un traitement avec la béclométasone, deux fois par jour (deux pressions matin et soir), et de 17 € par cheval pour un traitement avec une dose de 6 mg de fluticasone deux fois par jour (vingt-quatre pressions matin et soir) ou 8,5 € avec une dose de 3 mg deux fois par jour (douze pressions matin et soir).

• L’administration par nébulisation

Les molécules disponibles sont la budésonide, à raison de 800 µg par cheval, deux fois par jour (Pulmicort® nébulisation 1 mg/2 ml ou budésonide Biogaran® 1 mg/2 ml, par exemple), et la fluticasone, à la dose de 6 mg par cheval, deux fois par jour (Flixotide® Diskus 500 : poudre pour inhalation, distributeur de soixante doses, par exemple).

Ces suspensions pour inhalation s’administrent au moyen d’un masque de nébulisation avec plusieurs cupules (gamme Nébul® de Vétoquinol [voir photo 2] ou nébulisateur Horseneb Greenpex®).

Le coût journalier est de 3,8 € par cheval pour un traitement avec la budésonide (1 mg) deux fois par jour, et de 17 € par cheval en cas de traitement avec le fluticasone (6 mg) deux fois par jour.

  • (1) M. Leclere, J. Lefebvre-Lavoie, G. Beauchamp, J.-P. Lavoie : « Efficacy of oral prednisolone and dexamethasone in horses with recurrent airway obstruction in the presence of continuous antigen exposure », Equine Veterinary Journal, 2010, vol. 42, n° 4, pp. 316-321.

  • (2) N.E. Robinson, C. Berney, A. Behan, F.J. Derksen : « Fluticasone propionate aerosol is more effective for prevention than treatment of recurrent airway obstruction », J. Vet. Intern. Med., 2009, vol. 23, pp. 1247-1253.

POUR EN SAVOIR PLUS

• D.H. Duvivier, D. Votion, S. Vandenput, P. Lekeux : « Aerosol therapy in the equine species », The Veterinary Journal, 1997, vol. 154, pp. 189-202.

• E. van Erck et P. Lekeux : « Doses of common drugs », 2005, In : « Equine Respiratory Diseases », International Veterinary Information Service, Ithaca NY (www.ivis.org).

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