LE PET-FOOD SOUS LA LOUPE EUROPÉENNE - La Semaine Vétérinaire n° 1422 du 22/10/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1422 du 22/10/2010

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Auteur(s) : Stéphanie Padiolleau

L’alimentation des animaux de compagnie doit être équilibrée et exempte de danger pour la santé de l’animal, mais aussi pour l’homme. Contrôlé en amont, au cours du processus de fabrication, mais aussi après sa mise sur le marché, le pet-food est rarement incriminé pour sa nocivité. Cependant, il est, comme l’alimentation humaine, susceptible de contamination, par des microbes ou des éléments indésirables.

Le pet-food concentre plusieurs enjeux, relatifs à la santé de l’animal, mais également à la santé publique. En ce qui concerne le premier volet, l’aliment doit être équilibré, ne pas comporter d’élément dangereux et être exempt de risque pathogène. Cet aspect contribue à protéger le maître, car certaines affections peuvent être transmises à l’homme directement par l’aliment, ou indirectement par l’animal contaminé par sa nourriture.

Pour s’assurer d’une bonne qualité de l’aliment, les contrôles sont effectués par les industriels tout au long de la chaîne de fabrication, selon la méthode HACCP(1). L’instauration du “paquet hygiène” a renforcé l’importance de ces autocontrôles et la responsabilité du fabricant. Les contrôles de conformité des règles d’hygiène, de conformité du produit à l’étiquetage, l’analyse de composition, la recherche d’additifs, de substances indésirables et interdites sont effectués par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). L’aspect sanitaire est pris en charge par les services vétérinaires. Le risque peut provenir d’un mauvais respect des règles d’hygiène, de pratiques défectueuses ou de matières premières de mauvaise qualité, mais également d’une fraude délibérée (ajout de mélamine pour augmenter le taux de protéines). Les produits qui présentent un risque sont alors retirés de la vente, et l’information relayée au niveau européen via le Réseau d’alerte rapide pour l’alimentation humaine et animale (RASFF, voir article en page 35).

Un “tueur de bébés” dépisté par le RASFF

Les méthodes utilisées sont soit ciblées pour la recherche d’un ou plusieurs agents pathogènes précis (fréquents ou majeurs), soit des analyses multicritères non ciblées pour rechercher des contaminants inhabituels. Ce dernier cas a trouvé une illustration récente dans la mélamine, qui a contaminé les aliments pour chiens avant de faire la une des journaux comme “tueur de bébés” en Chine. Ce produit, qui n’est pas un aliment, permet d’augmenter artificiellement le taux protéique du produit fini. En 2007, cette fraude alimentaire a été responsable de cas d’insuffisance rénale chez des chiens aux Etats-Unis, provoquant des troubles sévères pouvant entraîner la mort de l’animal. La mélamine a été découverte dans le gluten de maïs importé de Chine pour fabriquer des aliments pour chiens. Des rappels ont aussi été effectués en Europe durant cette période, mais par mesure de précaution.

Historiquement, l’Europe distingue, d’un point de vue réglementaire, les alimentations animale et humaine, au contraire des Etats-Unis où les deux sont traitées de la même façon depuis 1972. Au cours du dernier symposium de nutrition Waltham, Robert Buchanan, professeur et directeur du centre pour la sécurité alimentaire et des systèmes de sécurité de l’université du Maryland, rapportait que la Food and Drug Administration (FDA) recevait plus d’appels de consommateurs liés aux animaux de compagnie que pour les bébés.

1 % des alertes européennes concernent le pet-food

C’est un peu différent en Europe, mais la réglementation y est en cours d’évolution. Le RASFF reçoit des notifications à propos du pet-food depuis 2006. Auparavant, seule l’alimentation des animaux producteurs de nourriture pour l’homme était traitée par ce service. Les notifications concernant le pet-food tendent à se multiplier (voir tableau), mais restent rares en Europe par rapport aux Etats-Unis ou à l’Australie. En 2009, 25 % des notifications relatives à l’alimentation animale concernaient le pet-food, soit environ 2 % des alertes et 1 % des informations relayées par le RASFF. La raison est-elle une carence de déclarations ou au contraire des contrôles efficaces tout au long de la chaîne de fabrication ? La question peut se poser. Il est cependant à noter que les affections provoquées directement par le pet-food, à l’animal consommateur ou à son maître, sont rares, et cela quel que soit le pays considéré. Les produits ou lots à risque sont repérés avant que des affections ou troubles cliniques se développent. Des exceptions se sont cependant produites, hors d’Europe.

La moitié des notifications sont liées à des contaminations microbiologiques de l’aliment, souvent des matières premières, essentiellement par les salmonelles et les entérobactéries. Viennent ensuite les mycotoxines, aflatoxines le plus souvent (pour lesquelles le nombre de signalements est cent fois inférieur pour le pet-food que pour les noix et produits dérivés), puis les OGM (graines de lin et maïs), plus rarement les contaminants industriels (voir histogramme). Depuis le début de l’année, quarante-huit notifications ont été émises par le RASFF. Trente rapportent une contamination par les salmonelloses et douze par des aflatoxines.

Le problème des mycotoxines est complexe, car ce sont des produits secondaires du métabolisme fongique de natures diverses. La contamination se fait via les graines, noix ou céréales utilisées dans la fabrication de l’aliment. Les effets toxiques sont généralement limités à l’animal, même si une contamination humaine est toujours possible. En 2006, la contamination d’aliments pour chiens par des aflatoxines a été signalée au RASFF après la mort aux Etats-Unis de vingt-trois animaux. Des lots d’aliments suspects avaient été importés dans dix pays de l’Union européenne. Le rappel des produits contaminés s’est effectué rapidement, et aucun animal malade n’a été signalé en Europe. Le problème des salmonelles est un peu plus préoccupant, car l’homme peut se contaminer par simple manipulation. En 2009, les Etats-Unis ont procédé au rappel de plus de mille produits en raison d’une contamination par les salmonelles de cacahuètes incluses dans la composition des aliments pour animaux.

  • (1) HACCP : Hazard Analysis Critical Control Point, traduit en français par “système d’analyse des dangers-points critiques pour leur maîtrise”.

  • (2) G. Child et coll. : « Ataxia and paralysis in cats in Australia associated with exposure to an imported gamma-irradiated commercial dry pet-food », AVJ, 2009, vol. 87, n° 9, pp. 349-350.

La qualité du pet-food, une responsabilité partagée

La Fédération européenne de l’industrie des aliments pour animaux familiers publie un guide des bonnes pratiques, qui permet aux industriels de veiller à la sécurité sanitaire des aliments produits en application du règlement n° 183/2005. Un guide de recommandations est également disponible, pour veiller à l’équilibre nutritionnel des aliments.

L’aspect sanitaire est du ressort du ministère de l’Agriculture (en application du règlement n° 1774/2002 établissant les règles de contrôles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine). L’Anses peut être saisie ponctuellement pour un avis consultatif, mais cela est rare pour les aliments destinés aux animaux de compagnie, et c’est alors souvent pour des modifications de la réglementation.

La DGCCRF veille à la conformité des aliments, notamment à la prise en compte des règlements n° 1831/2003, relatif aux additifs en alimentation animale, et n° 767/2009, concernant la mise sur le marché et l’utilisation des aliments pour animaux, ainsi que les règles d’étiquetage des OGM en alimentation animale.

S. P.

Nouveaux aliments, nouvelles technologies : un vrai défi

Utiliser de nouveaux produits ou de nouvelles technologies dans l’alimentation animale n’est pas anodin. Si certains sont connus et utilisés en alimentation humaine, rien, sauf l’expérience, n’indique l’innocuité pour les animaux. La conservation par irradiation en est un exemple criant. Ce procédé, aussi appelé ionisation, consiste à exposer un aliment à un flux de rayonnements ionisants générés par une source radioactive, du cobalt 60 ou parfois du césium 137. Il est autorisé en Europe pour certains produits ou matières premières : abats de volaille, ail, blanc d’œufs, caséine, épices, herbes aromatiques séchées, sang séché, plasma, viande de volailles, etc. La France est le troisième pays de l’Union européenne à traiter des aliments par irradiation, après la Belgique et les Pays-Bas. En Australie, l’irradiation, obligatoire depuis plus de dix ans sur les aliments secs pour animaux, est levée depuis 2009. Elle est même interdite pour les aliments destinés aux chats : plusieurs ont en effet été affectés de troubles neurologiques entre juin 2008 et mars 2009, et une trentaine sont morts, après l’ingestion d’aliments secs gamma-ionisés(2). La dose élevée de rayonnements ionisants utilisée (plus de 36 kGy) est suspectée de provoquer une leuco-encéphalopathie chez le chat, d’où son interdiction pour cette espèce. La difficulté du contrôle lors d’irradiation est liée au fait que la méthode provoque une modification des composants. Il est donc malaisé de savoir a priori ce qu’il faudra rechercher après l’irradiation. Ce sujet est actuellement à l’étude par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) qui devrait rendre un avis relatif à l’ouverture de cette technique à d’autres produits que ceux actuellement visés par la directive 1999/3/CE et document 2006/C 112/05 du Journal Officiel de l’Union européenne.

S. P.
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