Les erreurs zootechniques et les traumatismes sont les premières causes de dermatoses - La Semaine Vétérinaire n° 1420 du 08/10/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1420 du 08/10/2010

Dermatologie des reptiles

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Gwenaël Outters

Les affections dermatologiques sont courantes chez les reptiles. Si des origines infectieuses existent, les causes sont le plus souvent à rechercher dans les conditions de captivité.

Les affections dermatologiques des reptiles en captivité sont courantes. Une altération du revêtement cutané suscite l’inquiétude des propriétaires de reptiles, souvent attachés à l’aspect esthétique de leur animal. Chez ces animaux, une altération de la peau est souvent le reflet d’une atteinte générale, elle-même souvent due à un problème environnemental (température, luminosité, qualité de l’éclairage, hygrométrie, substrat). Le temps de la consultation devrait donc toujours inclure l’analyse des conditions zootechniques.

Comme dans toutes les espèces, le diagnostic dermatologique est d’ordre anamnestique, clinique, microbiologique et histologique. L’examen est effectué en premier lieu à distance. Des troubles de la mue, souvent révélateurs d’une affection sous-jacente, sont recherchés. A l’examen rapproché, la recherche s’étend aux ectoparasites, aux lésions cutanées de type nodulaire, hémorragique, nécrotique, érosif ou dyschromique, ou encore aux érythèmes, aux papules, pustules, croûtes, abcès, abrasions, excoriations ou ulcères.

Distribuer des proies vivantes aux serpents est déconseillé

La surpopulation de tortues en aquarium entraîne des lésions. L’eau souillée par les multiples déjections et les traumatismes créés par les animaux eux-mêmes sont responsables d’une surinfection des plaies et d’ulcérations de la carapace. Chez les tortues terrestres, les attaques de chiens sont fréquentes, de même que les coups de carapace du mâle lors des parades nuptiales (lésions localisées aux écailles marginales). Ces traumatismes peuvent entraîner une atteinte profonde du derme, voire de la cavité cœlomique. Des myiases secondaires sont souvent associées. Les morsures de congénères sont également fréquentes (animaux solitaires, qui supportent parfois mal la cohabitation). Celles occasionnées par des rongeurs sont limitées aux faces antérieures des membres antérieurs (seules parties visibles quand la tortue s’escamote). Les serpents ne tuent leur proie que s’ils ont faim : des morsures de rongeurs sont ainsi observées sur les serpents nourris alors qu’ils n’avaient plus faim (un serpent anorexique se laisse dévorer par sa proie). Il faut donc préférer des proies fraîchement sacrifiées ou congelées.

La brûlure est la conséquence courante d’une mauvaise conception du terrarium

Les brûlures sont fréquentes et doivent être suspectées pour toute lésion dermatologique, notamment chez les serpents en terrarium. Les systèmes de chauffage sont souvent surdimensionnés ou mal utilisés, sans une couche de substrat suffisante par-dessus. Face à ce type de lésion, il faut toujours se demander si le gradient de température dans le terrarium est respecté : ces accidents arrivent souvent lorsque le point froid est à 21 °C et le point chaud à 40 °C. Ces brûlures se compliquent souvent de pyodermite ventrale. La présence de taches noires sur une peau de serpent signifie que les chromatophores (dans la couche dermique) sont lésés : elles signent une atteinte grave.

Sont également rencontrées des abrasions rostrales, signes d’une automutilation sur les parois en verre. L’idéal est de concevoir des terrariums avec des parois opaques de sorte que l’animal ne cherche pas à s’évader. Il existe des dermatites de contact, notamment chez les serpents qui peuvent renverser leur gamelle d’eau et se retrouver sur un substrat trop humide et riche en urine (acide urique). Une dermite ventrale par macération apparaît alors.

Le traitement des pyodermites bactériennes fait appel aux quinolones

Les dermatites bactériennes sont souvent dues à des bacilles Gram négatif (flore saprophyte opportuniste), Gram positif (par exemple Devriesea agamarum), des mycobactéries ou des germes anaérobies (bactéroïdes, Clostridium, etc.). Ces atteintes revêtent différents aspects, dont des ulcérations qui peuvent se compliquer en septicémie. Elles sont souvent le reflet de conditions environnementales inadéquates. Par exemple, pour les tortues, les filtres doivent assurer la filtration de dix fois le volume d’eau par heure, ce qui est supérieur aux modèles pour aquarium.

Le traitement des pyodermites bactériennes fait généralement appel à l’enrofloxacine (l’un des seuls antibiotiques non néphrotoxique chez les reptiles). En traitement topique, il est possible d’utiliser la sulfadiazine argentique, la polyvidone iodée et la chlorhexidine. Pour les tortues aquatiques, il faut laisser la tortue au moins deux heures hors de l’eau après l’application du topique. Pour certaines tortues à carapace molle, qui se déshydratent rapidement, l’emploi des pansements liquides, qui forment un film aquarésistant, permet la cicatrisation. Les dermatites bactériennes peuvent évoluer en abcès (ferme, nodulaire, à pus caséeux organisé sous forme concentrique et lamellaire). Un débridement chirurgical est alors nécessaire.

Les dermatites fongiques chez les reptiles sont presque toujours secondaires à un traumatisme. Elles sont traitées avec de l’itraconazole (à raison de 5 mg/ kg/j) ou du kétoconazole (15 à 20 mg/kg/j). Les traitements antimycosiques par voie générale sont hépatotoxiques (l’ictère est vert chez les reptiles). Une dermatite fongique primitive a été découverte il y a cinq ans, provoquée par Chryptosporium Anamorph of Nannizziopsis Vriesi (CANV). Elle se manifeste par de petites lésions au niveau des lèvres, une prostration et une anorexie, qui témoignent d’une atteinte profonde de tous les viscères. Elle est mortelle dans tous les cas.

Le chromatophorome est émergent chez le caméléon

Le parasite le plus habituel chez les reptiles est l’agent de la pseudo-gale des serpents (Ophionyssus natricis). Cet acarien hématophage provoque une dermatite prurigineuse. Le traitement le plus efficace et le moins neurotoxique est le fipronil, associé au nettoyage du terrarium. La présence de tiques est fréquente, mais elles sont difficiles à voir (elles miment les écailles). La virologie chez les reptiles n’en est, quant à elle, qu’à ses balbutiements, avec la découverte progressive des viroses (herpèsvirose et poxvirose). La papillomavirose du lézard vert européen, qui se présente sous forme de nodules, est bien décrite. Un érythème squamocrouteux peut être la manifestation d’une iridovirose chez la tortue. Les reptiles peuvent enfin présenter des néoplasies à expression cutanée. Le chromatophorome est de plus en plus rencontré chez le caméléon, probablement lié à une mauvaise qualité des ultraviolets.

Veiller aux injections d’enrofloxacine par voie intramusculaire stricte

Deux types de dermatites iatrogènes peuvent être rencontrés : lésions à l’emporte-pièce associées à des injections d’enrofloxacine non réalisées par voie intramusculaire stricte et lésions desquamantes de xérodermie associées notamment à des injections de vitamine A (qui ne sont justifiées que chez les tortues aquatiques et qui sont toxiques pour les tortues terrestres).

L’allergologie et l’otologie sont deux domaines inconnus chez les reptiles, qui ne possèdent pas d’oreille externe. Certains n’ont pas même de tympans (serpents, caméléons). Les tortues ont un tympan avec une caisse tympanique, un système acoustique en profondeur avec une oreille interne. Les seules otites décrites chez les reptiles sont des pyogranulomes du tympan qui se produisent à partir d’une contamination de la cavité buccale. Le traitement est une chirurgie de paracentèse tympanique.

CONFÉRENCIER

Lionel Schilliger, praticien à Paris.

Article rédigé d’après la conférence « Principales affections dermatologiques des reptiles », présentée au congrès Fecava 2009, à Lille.

Fragilité cutanée

Il existe un syndrome de fragilité cutanée acquise, dont l’origine est inconnue. Chez des serpents cachectiques, la peau se déchire lors d’une simple manipulation. De nombreuses hypothèses sont avancées : déficit en vitamine C, troubles trophiques, lésions de septicémie hémorragique, etc. Il faut donc manipuler les serpents maigres avec précaution. Ce syndrome est retrouvé chez le gecko léopard qui a été sélectionné génétiquement pour sa robe claire. Est alors observée une dermite délabrante, possible conséquence d’une intolérance aux ultraviolets, qui se caractérise par l’apparition de petites croûtes dorsales éparses et une peau qui s’affine et se déchire en lambeaux.

G. O.

Physiologie et anatomie de la peau des reptiles

La peau des reptiles est recouverte d’écailles kératinisées particulièrement solides (fonction protectrice). Elle est dépourvue de glandes sébacées et sudoripares, d’où son aspect sec. Les reptiles sont ectothermes, poïkilothermes et captent la chaleur de sources externes. La structure et la couleur du tégument jouent un rôle essentiel dans l’absorption calorifique. Le tégument a également un rôle sensitif et social (lors des parades nuptiales, par exemple). En outre, il permet la synthèse de la vitamine D3. La peau des reptiles est composée des strates histologiques classiques avec cependant un hypoderme quasi inexistant.

Chez les tortues, le derme, ossifié, est constitué d’une cinquantaine de plaques ostéodermiques, recouvertes d’épiderme (écussons de kératine), conférant une grande solidité à l’ensemble.

Les reptiles muent, certains de façon spectaculaire (squamates : lézards et serpents). Les tortues aquatiques muent avec des filaments de gélatine. Les tortues terrestres muent au niveau du “T-shirt” et du “short”.

L’œil des serpents est recouvert d’une écaille imperméable qui protège la cornée de la dessication (ce qui rend inutile toute application de collyre).

G. O.
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