Vers une cartographie nationale du “risque de charbon” ?

A la suite d’une saisine de la Direction générale de l’alimentation, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) s’est penchée sur les procédures relatives aux suspicions et aux foyers de fièvre charbonneuse. L’avis rendu cet été confirme l’intérêt d’avoir « connaissance des zones potentiellement contaminées par des spores ». L’agence recommande d’établir, à l’échelle départementale, « une carte localisant les communes où des cas ont été constatés » et un tableau regroupant, par ordre chronologique, ces mêmes communes, l’espèce atteinte, les exploitations concernées et le nombre de cas. Ces données sont utiles pour l’enquête épidémiologique qui suit l’apparition de foyers de charbon et peuvent constituer une aide aux décisions sanitaires, « notamment pour déterminer les zones de vaccination ».

La fièvre charbonneuse entre dans le diagnostic différentiel lors de mort subite

Outre un avis sur les procédures de gestion des cadavres et de désinfection, l’agence met l’accent sur une nécessaire sensibilisation des éleveurs au charbon, dans les zones historiquement à risque, les “champs maudits”. En effet, les cas de résurgence sont rares et inattendus. Il est toujours possible qu’un cas isolé de mortalité brutale ne soit pas immédiatement relié à la fièvre charbonneuse, ce qui augmente le risque de propagation. Le rôle des praticiens apparaît clairement ici, pour informer les éleveurs du risque et les inciter à signaler toute mortalité suspecte. L’instauration d’une gestion “à deux vitesses”, selon le niveau de suspicion, pourrait permettre, en stimulant les déclarations, de limiter le risque de non-détection des foyers.

En effet, l’agence recommande d’envisager deux niveaux de suspicion. Un « niveau faible » est défini pour les cas de « mort subite isolée, sans signe clinique évocateur, ou dans un cheptel sans lien épidémiologique avec un foyer ». Le « niveau fort » s’applique lors de « mort brutale avec écoulements hémorragiques par les orifices naturels, ou dans un cheptel à proximité d’un foyer récent ou en lien épidémiologique direct avec ce foyer ». Dans le premier cas, un diagnostic de laboratoire est conseillé, surtout s’il y a déjà eu des cas dans le passé, et les autopsies sont à réaliser avec précaution. Dans le second cas, les autopsies sont prohibées pour éviter la diffusion et la contamination humaine, et un arrêté préfectoral portant mise sous surveillance (APMS) est pris.

La gestion des suspicions fortes et celle des foyers comporte des mesures de restriction des mouvements (animaux, personnes et matériels) dont l’objectif est de réduire les risques d’extension du foyer. Les épisodes de charbon survenus ces dernières années ont une origine tellurique, la contamination des animaux ayant lieu par ingestion de spores avec le fourrage ou dans les pâtures. Le risque de diffusion vectorielle, mis en évidence en Afrique, aux Etats-Unis et en Inde, « est jugé anecdotique » en France, bien que des bacilles charbonneux aient pu être isolés ponctuellement sur des taons.