Les chats aussi souffrent de myasthénie grave - La Semaine Vétérinaire n° 1416 du 10/09/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1416 du 10/09/2010

Affections neuromusculaires

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Yseult Baeumlin

Les jonctionopathies, les neuropathies et les myopathies sont les trois types de lésions neuromusculaires.

Les affections neuromusculaires se définissent comme une lésion du système musculaire et/ou de ses connexions nerveuses. Lorsqu’un vétérinaire est confronté à un animal atteint, il se heurte à trois difficultés : déterminer si les symptômes sont effectivement le résultat d’une atteinte neuromusculaire (car ils sont communs à d’autres maladies systémiques), établir un diagnostic différentiel et mettre en place un traitement approprié.

Les désordres neuromusculaires sont classés selon la localisation du problème au niveau de l’unité motrice. Trois types de localisation sont distingués : les affections des nerfs périphériques ou racines nerveuses (neuropathies-radiculopathies), les affections des jonctions neuromusculaires (jonctionopathies) et les affections musculaires (myopathies). Les affections neuro- musculaires sont congénitales ou acquises. Toutefois, « des troubles métaboliques, toxiques ou endocriniens peuvent aussi être à l’origine d’une faiblesse musculaire », souligne notre confrère Sébastien Behr.

Une ventroflexion de la tête est le signe d’une faiblesse neuromusculaire généralisée

Ces maladies sont caractérisées par des degrés variables de parésie (faiblesse) détectables au niveau des membres antérieurs et/ou postérieurs, d’une atrophie ou hypertrophie musculaire, d’une baisse du tonus musculaire et, éventuellement, d’une diminution des réflexes appendiculaires ou des nerfs crâniens (voir encadré). Une ventroflexion au niveau de la jonction cranio-cervicale est le signe d’une faiblesse neuromusculaire généralisée et sévère. Les anomalies neurologiques sont de type motoneurone périphérique. Le tonus musculaire est diminué et un retard ou une absence de retrait du membre concerné est noté, lié au déficit moteur. Certains nerfs crâniens moteurs peuvent également être concernés par des affections neuromusculaires. Seront alors mises en évidence une flaccidité de la mandibule, une dysphagie, une amyotrophie des muscles de la mastication. Une baisse des réflexes, du tonus musculaire, et un déficit des réflexes posturaux sont associés aux lésions des nerfs périphériques. Les atteintes des jonctions neuromusculaires s’accompagnent d’une variété de signes cliniques, qui vont de la flaccidité musculaire à une faiblesse induite à l’exercice.

La recherche étiologique passe par les examens complémentaires

Un bilan sanguin complet est recommandé, comprenant une biochimie avec ionogramme et un comptage cellulaire (ce dernier est cependant souvent non spécifique). Une augmentation des créatine kinases est en faveur d’une affection musculaire (myosite, par exemple). Des analyses sérologiques (toxoplasmose et FIV) et une recherche d’antigénémie du virus de la leucose sont également indiquées, bien que ces maladies soient rarement à l’origine de troubles neuromusculaires. « Il est fréquent de trouver des anticorps anti-toxoplasme chez le chat, ainsi que de déceler le parasite dans le muscle, sans pour autant que celui-ci soit responsable des symptômes », rappelle Sébastien Behr. La toxoplasmose, dans sa forme généralisée chez le chat, provoquera des symptômes digestifs et respiratoires et, plus rarement, des signes d’atteinte du système nerveux. En outre, des recherches d’anticorps anti-récepteur à acétylcholine confirment le diagnostic de myasthénie grave.

Des clichés thoraciques sont utiles dans la détection d’un mégaœsophage, et éventuellement d’une tumeur médiastinale comme le thymome, qui peut entraîner une myasthénie paranéoplasique. La détection d’une pneumonie par aspiration associée impose un traitement spécifique. Une échographie abdominale est aussi conseillée.

L’électromyographie permet de localiser plus précisément l’origine du trouble neuromusculaire (nerf périphérique, jonction neuromusculaire ou muscle). Attention, un animal anesthésié ne présente normalement pas d’activité électrique spontanée (ligne horizontale sur l’écran).

L’analyse du liquide cérébro-spinal lombaire n’est pas spécifique d’une affection neuromusculaire en particulier, mais une dissociation albuminocytologique (élévation de la concentration en protéine sans pléocytose associée) est fréquente lors de polyradiculonévrite idiopathique.

Bien qu’invasives, les biopsies musculaires sont facilement réalisables avec un peu de pratique. Concernant la biopsie musculaire, il est conseillé de prélever dans deux muscles différents, identifiés lors de l’examen électromyographique ou neurologique, si le problème est localisé. La biopsie nerveuse, plus délicate, est réalisée sur le nerf tibial ou sur un nerf localisé lors de l’examen si le problème n’est pas généralisé. Les prélèvements sont envoyés sous vingt-quatre heures au laboratoire, dans une solution de formol à 2,5 % et également frais, non fixés.

Une polyneuropathie oriente vers une affection systémique

La majorité des neuropathies félines sont acquises et chroniques. Des désordres au niveau de la transmission neuromusculaire (myasthénie grave, toxicité aux organophosphorés, envenimation) et les myopathies font partie du diagnostic différentiel. Bien que l’arsenal thérapeutique soit limité dans le cas des neuropathies félines, une recherche étiologique permet de traiter la cause sous-jacente éventuelle (voir encadré). Les cas de polyneuropathie idiopathique peuvent répondre favorablement à un traitement à base de corticostéroïdes. Dans de nombreux cas, notamment chez les chats jeunes de moins d’un an, la guérison est spontanée, mais la période de récupération est longue (quatre à six semaines).

Quelques cas de neuropathies sont rarement rapportés à la suite d’une infection par le virus de la leucose féline (FeLV). Une atteinte du nerf ciliaire peut donner lieu à une anisocorie avec une forme de la pupille en D inversé.

Les chats abyssins et somalis sont prédisposés à la myasthénie acquise

A l’instar des chiens, les chats souffrent également de myasthénie grave. Il s’agit d’une diminution de la transmission nerveuse secondaire à une atteinte des récepteurs nicotiniques à acétylcholine au niveau des jonctions neuromusculaires.

Des cas rares de myasthénie congénitale (chaton de moins de six mois) sont rapportés, pour lesquels le dosage d’anticorps anti-acétylcholine est normal.

Les cas de myasthénie acquise, diagnostiqués chez des chats adultes de plus de trois ans, sont en général à médiation immunitaire. Les chats abyssins et somalis y sont prédisposés. La myasthénie est également un syndrome paranéoplasique du thymome et une masse médiastinale craniale est à rechercher sur les clichés radiographiques.

L’incidence du mégaœsophage chez le chat est plus faible que chez le chien lors de myasthénie acquise. L’injection d’un agent anticholinestérasique de courte durée (édrophonium, Tensilon®, 0,22 mg/kg par voie intraveineuse) donne lieu à une amélioration immédiate, mais passagère, des symptômes de faiblesse musculaire. Cette réaction permet un diagnostic présomptif de myasthénie, mais n’est pas spécifique (d’autres jonctionopathies et certaines myopathies répondent positivement à l’injection).

Chez le chien, quelques rémissions spontanées sont observées, mais leur incidence chez le chat est inconnue. Le traitement s’applique sur trois fronts : viser l’affection sous-jacente (par exemple, opération en cas de thymome), augmenter la quantité d’acétylcholine libre au niveau de la jonction neuromusculaire via un traitement anticholinestérasique, induire une immunosuppression.

Le diagnostic de certitude d’une myopathie passe par une biopsie

Une élévation des créatine kinases sanguines et un électromyogramme anormal sont en faveur d’une polymyopathie. La confirmation nécessite la réalisation d’une biopsie. Une infection bactérienne (Clostridium chauvei), à protozoaire (toxoplasmose), virale (leucose) ou à médiation immunitaire peut être à l’origine de l’affection. Un traitement à base de corticostéroïdes est indiqué lors de polymyosite à médiation immune. Sinon, un traitement étiologique est à mettre en place.

  • Source : P.J. Dickinson, R.A. Le Couteur, Vet. Clin. Small Anim., 2004, n° 34, pp. 1307-1359.

  • Source : P.J. Dickinson, R.A. Le Couteur, Vet. Clin. Small Anim., 2004, n° 34, pp. 1307-1359.

CONFÉRENCIER

Sébastien Behr, Diplomate de l’European College of Veterinary Neurology, Willows Referral Service, Solihull (Royaume-Uni).

Article rédigé d’après la conférence « Neuromuscular inflammatory diseases », présentée lors du congrès Afvac-Fecava 2009.

Signes cliniques lors d’affection neuromusculaire

• Faiblesse musculaire localisée ou généralisée

• Manifestations fonctionnelles

– parésie/paralysie

– démarche anormale

– faiblesse après l’effort

– dysphagie

– régurgitation

– dyspnée

– dysphonie

• Manifestations physiques

– atrophie musculaire

– hypertrophie musculaire

– déformation du squelette

Y. B.

Neuropathies félines acquises

• Polyneuropathie aiguë : idiopathique

• Polyneuropathie chronique :

– idiopathique

– endocrinienne : diabète, hyperthyroïdisme ;

– infectieuse : FeLV, FIV ;

– toxique : organophosphorés, métaux lourds ;

– alimentaire : déficit en tyrosine/phénylalanine.

• Mononeuropathie

– idiopathique : paralysie laryngée ;

– traumatique : fracture, avulsion du plexus brachial ;

– néoplasique : primaire (tumeur nerveuse) ou secondaire (lymphome, sarcome) ;

– infectieuse : mycobactéries.

Y. B.
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