L’atlas du cerveau des otaries permettra de mieux comprendre les effets de la pollution - La Semaine Vétérinaire n° 1414 du 27/08/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1414 du 27/08/2010

Mammifères marins

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Stéphanie Bourgeois

Cet atlas permettrait de mesurer les changements induits par les substances toxiques au niveau de l’encéphale.

La première carte anatomique détaillée du cerveau d’un mammifère marin vivant vient d’être réalisée par une équipe de chercheurs américains(1). C’est la première fois qu’une étude utilise l’imagerie à résonance magnétique volumétrique chez un animal sauvage. Cette technique permet de réaliser une reconstruction tridimensionnelle du cerveau et une analyse volumétrique de ses différentes structures. Les auteurs se sont notamment attachés à calculer le volume de l’hippocampe, structure du système limbique connue pour son rôle dans la mémoire spatiale et la navigation. L’animal utilisé pour l’étude était une femelle otarie de Californie (Zalophuscalifornianus) âgée d’environ un an. Recueilli par un centre de soins à la suite d’une fracture de la nageoire antérieure droite, l’animal présentait un bon état général et un examen neurologique normal. « Cette étude est une étape importante dans la neuro-imagerie des mammifères aquatiques. Mais nous avons des objectifs beaucoup plus larges », a déclaré Eric Montie, qui a dirigé ces travaux. En effet, l’atlas ainsi créé pourrait être utilisé pour étudier les capacités cognitives et sensorielles des otaries, mais aussi pour comprendre l’impact neurologique des polluants et des toxines présents dans l’environnement marin. La morphologie normale du cerveau des otaries, son évolution aux différents stades de la vie, mais aussi les variations entre mâles et femelles sont encore inconnues. Leur étude est indispensable pour pouvoir apprécier l’impact des facteurs de stress environnementaux.

Les rejets de DDT du siècle dernier restent une source de contamination

Les otaries de Californie sont particulièrement exposées aux polluants d’origine humaine au niveau de leur site de reproduction, dans l’archipel des Channel Islands, au sud de la Californie. De nombreuses études ont montré que les eaux sont particulièrement contaminées en dichlorodiphényltrichloroéthanes (DDT) et polychlorobiphényls (PCB). Malgré une diminution de la concentration en DDT dans le tissu adipeux des otaries depuis la fermeture du plus gros producteur mondial de pesticides dans les années 70, les taux mesurés actuellement restent supérieurs au seuil de toxicité. Les femelles et les jeunes sont les plus exposés. En effet, après la période des naissances, en mai et juin, arrive celle des accouplements en juillet et août. Au total, les femelles restent dans la zone pendant six à onze mois pour allaiter. Les échanges placentaires et le lait sont des sources majeures de contamination pour les jeunes, au moment où leur système nerveux est en pleine maturation.

Les marées d’algues toxiques engendrent des intoxications massives

Les otaries sont régulièrement exposées à un autre type de facteur de stress, l’acide domoïque. Cette neurotoxine est produite massivement lors des efflorescences algales (ou marées rouges) et contamine la chaîne alimentaire des otaries. Elle est associée à des symptômes nerveux (épilepsie) et à des troubles de la reproduction. Des études comportementales ont également montré une incidence de l’acide domoïque sur l’agressivité, l’orientation et la navigation chez les adultes. En outre, le taux de mortalité parmi les animaux transportés vers les centres de soins et de réhabilitation est d’environ 70 %. Les autopsies des animaux qui ont survécu plusieurs mois révèlent une atrophie de l’hippocampe. Les marées d’algues toxiques sont en augmentation, probablement à cause de la pollution des océans et du réchauffement des eaux. L’impact de l’acide domoïque sur les populations d’otaries californiennes est loin d’être négligeable et pourrait être amplifié par les taux élevés de pesticides. Une équipe s’est intéressée à l’effet de l’exposition simultanée à ces polluants environnementaux(2). Des expérimentations menées chez le poisson zèbre ont permis de montrer qu’une exposition précoce au DDT pendant le développement cérébral prédispose à des crises d’épilepsie induites par une exposition à l’acide domoïque à l’âge adulte. Les deux toxiques environnementaux ont une action synergique, qui aboutit à une sensibilité plus grande des animaux aux troubles neurologiques induits par l’acide domoïque.

L’atlas anatomique devrait permettre de mieux comprendre les mécanismes de cette neurotoxicité, en mesurant les changements subtils induits par ces substances toxiques dans la structure du cerveau des otaries. Les chercheurs seront ainsi en mesure de déterminer si les symptômes sont liés à une exposition aiguë ou chronique et de situer l’émergence des désordres neurologiques entre le stade fœtal et le stade adulte. Ces études constituent un grand pas vers la compréhension des interactions entre polluants environnementaux, véritable challenge pour la recherche en santé environnementale.

  • (1) Eric W. Montie et coll. : « Neuroanatomy and volumes of brain structures of a live California sea lion (Zalophus californianus) from magnetic resonance images », Anat. Rec., 2009, vol. 292, pp. 1523-1547.

  • (2) J.A. Tiedeken et J.S. Ramsdell : « Zebrafish seizure model identifies p, p´-DDE as the dominant contaminant of fetal california sea lions that accounts for synergistic activity with domoic acid », Environ. Health Perspect., 2010, vol. 118, n° 4.

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