Pour les zoonoses “négligées” comme la rage, l’approche One Health est primordiale

La féminisation – un phénomène largement répandu au sein de la profession vétérinaire dans toute l’Europe – est plutôt la conséquence d’un désintérêt grandissant des hommes que d’une croissance d’intérêt des femmes, selon Muriel Surdez, professeur en sociologie à l’université de Fribourg. Lors de l’assemblée générale de l’Union européenne des vétérinaires praticiens (UEVP), le 9 juin dernier à Bâle (Suisse), elle présentait les résultats d’une étude sur ce sujet réalisée à la demande de la Société vétérinaire suisse.

Lors de la discussion, Lynne Hill (Royaume-Uni) a cité en exemple une enquête effectuée en 1949 dans les écoles vétérinaires britanniques : 75 % des candidats étaient des femmes, même si seulement 10 à 20 % étaient finalement admises.

Pour Muriel Surdez, les organisations professionnelles devraient définir leur objectif – une hausse du taux d’étudiants masculins ou une augmentation du taux de vétérinaires ruraux ? – afin de pouvoir formuler leur stratégie à long terme.

Un focus sur la formation en bien-être animal

La législation européenne sur le bien-être animal devrait être réévaluée cette année, a annoncé Nancy de Briyne, directrice exécutive adjointe de la Fédération vétérinaire européenne (FVE), avec une pertinence particulière pour la profession vétérinaire. Un des éléments clés de la nouvelle stratégie est la volonté d’un renforcement des mesures, dans un domaine où les vétérinaires ont un rôle important à jouer. La nouvelle stratégie va également se focaliser sur la formation en bien-être animal, à la fois pendant le cursus initial et au niveau de la formation continue des confrères diplômés. « La législation est encore à rédiger, c’est donc le moment d’agir », a rappelé Nancy de Briyne.

Les vétérinaires seraient « reconnus » pour une espèce donnée

Le thème du vétérinaire « reconnu » (acknowledged veterinarian), un nouveau titre postuniversitaire de reconnaissance des connaissances, a été abordé par l’assemblée de l’UEVP. Le diplôme se situerait à un niveau intermédiaire, « quelque part entre les compétences de base et le niveau de spécialiste », selon Andrew Robinson (Royaume-Uni, vice-président de l’UEVP). La formation, théorique et pratique, serait sanctionnée par un diplôme délivré par les autorités nationales compétentes et supervisée au niveau européen. A priori, les vétérinaires seraient « reconnus » pour une espèce donnée, même si certains délégués ont proposé une division en disciplines, en particulier pour les animaux de compagnie. Afin de coordonner tout cela et d’avoir une meilleure vision des formations diplômantes qui existent en Europe, un Conseil européen de formation permanente vétérinaire sera créé. Il regroupera des représentants de l’European Coordinating Committee for Veterinary Training (ECCVT), des statutory bodies et de la Federation of European Companion Animal Veterinary Associations (Fecava). Des représentants d’autres domaines, comme les vétérinaires équins et ruraux, ont également annoncé leur intérêt pour ce projet.

Pendant l’assemblée générale de la FVE, qui s’est tenue à la suite, les 11 et 12 juin, la délégation française a annoncé un léger remaniement. La Fédération des syndicats vétérinaires de France (FSVF) remplace désormais le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL) au niveau européen. La FSVF regroupe en effet un éventail plus large de la profession, représentant les secteurs publics et privés, a expliqué son président Benoît Assémat.

L’apport des vétérinaires à la santé publique est démontré

Lors de sa conférence, Juan Lubroth, directeur vétérinaire de la Food and Agriculture Organization (FAO), a annoncé l’éradication de la peste bovine. L’annonce officielle était prévue en juin 2011, soit dix ans après le dernier cas recensé de cette maladie “dévastatrice”. Concernant le concept One Health (une seule santé), il a souligné que « le virus H5N1 a beaucoup aidé à démontrer la pertinence de la contribution vétérinaire dans la santé publique ».

Cette approche multidisciplinaire de l’épidémie de H5N1 devrait être appliquée à toutes les zoonoses, a estimé Simone Magnino, vétérinaire au département de sécurité alimentaire et zoonoses de l’Organisation mondiale de la santé, lors de sa présentation. En particulier pour les zoonoses “négligées” comme la rage, l’échinococcose et la leishmaniose, une approche One Health est primordiale, selon notre confrère.

Le troisième intervenant sur le sujet des zoonoses était Phil Craig (professeur à l’université de Salford, Royaume-Uni), qui a abordé l’échinococcose. Même si le parasite n’a que peu d’impact sur la santé animale, l’hydatidose « est une zoonose importante, qui peut provoquer une insuffisance hépatique et nécessite un traitement à long terme, voire une résection ou une transplantation du foie ». L’infection est « mortelle dans 95 % des cas en l’absence de traitement », a-t-il ajouté. Entre 1982 et 2000, cinq cent trente-deux cas humains ont été diagnostiqués en Europe, dont une majorité dans l’est de la France, le sud de l’Allemagne, la Suisse et l’Autriche (ce foyer est en cours d’expansion).

L’hôte principal du parasite est le renard, mais les chiens sont également de « bons hôtes ». Ainsi, le chien représente un facteur de risque important pour l’infection de l’homme. Etant donné que les options de lutte sont limitées une fois que le parasite est installé, Phil Craig a souligné que la prévention reste la meilleure approche pour les pays indemnes.

Trois ans pour réduire les prescriptions d’antibiotiques

Rens van Dobbenburgh (vice-président de l’UEVP) a annoncé la création, aux Pays-Bas, d’une base de données numérique sur l’usage des antibiotiques, afin de surveiller les quantités prescrites par les vétérinaires et achetées par les éleveurs. Ensemble, avec les filières, les vétérinaires néerlandais se sont engagés à diminuer de moitié la consommation d’antibiotiques en 2013 par rapport à 2009. En cas d’échec, la profession pourrait perdre son droit de prescrire.

Les autres sujets abordés à Bâle ont concerné le plan stratégique de la FVE, les médicaments, la santé publique et la structure des organisations professionnelles. La prochaine assemblée générale de la FVE est prévue à Bruxelles, les 12 et 13 novembre 2011.