ÉVALUER DES FAITS, SANS DIAGNOSTIC NI TRAITEMENT - La Semaine Vétérinaire n° 1410 du 18/06/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1410 du 18/06/2010

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Auteur(s) : Marine Neveux

Diagnose, évaluation des chiens dits “dangereux”, évaluation comportementale des chiens mordeurs sont autant de situations où le praticien met en avant son expertise professionnelle. Les questions sont parfois complexes, les lois pas toujours simples et cohérentes non plus… Eclaircissement sur quelques cas de figure auxquels les confrères peuvent être confrontés.

Dans le doute, mieux vaut ne pas s’abstenir. » Voilà, selon Christian Diaz, l’attitude à adopter face au comportement dangereux d’un chien. Lors d’une consultation, si l’animal présente un danger, il sera prudent d’en informer les clients et de proposer, par écrit, que le chien passe une consultation comportementale. Le praticien peut être confronté, dans son exercice, à de telles situations et à bien d’autres encore. En outre, les différentes lois successives sur les chiens dangereux ou mordeurs ont créé de nouvelles obligations, parmi lesquelles l’évaluation comportementale, dont le vétérinaire est la cheville ouvrière.

Christian Diaz, président de l’Association francophone des vétérinaires praticiens de l’expertise (AFVE) et vétérinaire comportementaliste, et Christine Debove (conseil régional ordinal d’Ile-de-France et comportementaliste) ont abordé les aspects pratiques de ces questions lors d’un enseignement postuniversitaire organisé à Maisons-Alfort, le 17 mai dernier(1).

Le juge lit le droit, c’est aussi lui qui va dire le droit : « En tant que vétérinaire, nous sommes là pour informer et donner les procédures à suivre. » Le vétérinaire ne peut donc occulter ces aspects liés à son exercice. Il peut également s’inscrire sur les listes départementales de confrères qui réalisent les évaluations comportementales. Pour les praticiens, l’évaluation ne relève pas du mandat sanitaire, mais de la sécurité publique. En effet, si la mise sous surveillance des chiens mordeurs s’inscrit dans le cadre du mandat sanitaire du vétérinaire, l’évaluation comportementale de ces mêmes chiens est, en revanche, hors de ce mandat.

Ainsi, chaque partie joue un rôle différent dans l’évaluation comportementale. Le maire a le pouvoir de demander l’évaluation, de prescrire des mesures, d’exiger l’abattage ou l’euthanasie. C’est également lui qui délivre le permis de détention. Le rôle des Directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP ou DDPP) est d’enregistrer l’inscription des vétérinaires évaluateurs (liste départementale dressée). La DDPP reçoit aussi les Cerfa de mise sous surveillance sanitaire lors de morsure transmis par les vétérinaires, ainsi que les inscriptions des formateurs.

Une attestation d’aptitude pour les maîtres des chiens catégorisés

Depuis la loi du 20 juin 2008, une attestation d’aptitude est requise pour les propriétaires ou les détenteurs des chiens de première et deuxième catégories. C’est une étape nécessaire pour obtenir un permis de détention (voir encadré). Le propriétaire, le détenteur temporaire à la demande du propriétaire ou le détenteur doivent suivre une formation qui explique le fonctionnement d’un chien, etc. Elle consiste en sept heures de présence qu’il est possible d’effectuer en plusieurs fois. Une personne ne la passera qu’une seule fois pour tous ses chiens. Cette attestation d’aptitude n’est actuellement pas limitée dans le temps.

En outre, « tout fait de morsure d’une personne par un chien est déclaré par son propriétaire ou son détenteur ou par tout professionnel en ayant connaissance dans l’exercice de ses fonctions à la mairie de la commune de résidence du propriétaire ou du détenteur de l’animal ». Cela concerne donc les morsures de chiens uniquement (pas de déclaration pour celles de chats, ni pour les griffures, ni pour les morsures à un autre animal). Vétérinaires, médecins, assureurs, forces de l’ordre, etc., sont tous concernés. Une évaluation comportementale est aussi requise, à l’issue de laquelle le vétérinaire classera le chien dans l’un des quatre niveaux de risque. Il n’y a aucun rapport entre la catégorie du chien, qui ne fait pas entrer de critères comportementaux, et la dangerosité.

Le renouvellement est à la discrétion du vétérinaire et du maire mais, pour les chiens de catégories, la loi prévoit un délai maximal de renouvellement de l’évaluation (niveau 1 : rien d’imposé,niveau 2 : maximumtroisans, niveau 3 : maximum deux ans, niveau 4 : maximum un an). Concernant la tarification de l’évaluation comportementale, chacun est libre de facturer comme il l’entend, selon le principe de libre concurrence d’une profession libérale. L’entente sur les prix est bien entendu interdite.

De la difficulté des diagnoses de races

Le domaine des diagnoses est un territoire où l’incertitude et l’incohérence font parfois la loi… Comme les critères sont essentiellement morphologiques, le curseur n’est pas toujours aisé à positionner. La démarche du praticien devra donc être, là aussi, méthodique. Dans la diagnose de catégorie, seuls les faits doivent être inscrits. Il conviendra d’écrire « votre chien ne présente pas les caractéristiques de chien de catégorie ».

Au sens légal, la première catégorie repose sur des critères morphologiques. Mais tout n’est pas que mesure et mètre ruban. L’arrêté du 27 avril 1999 a introduit des précisions, comme le stop, la notion d’avant-main massive, avec une arrière-main comparativement légère, la hauteur de la truffe par rapport au menton, etc.

Il convient donc d’être précis et factuel sur les diagnoses, de s’appuyer sur des critères objectifs, car la responsabilité disciplinaire et civile du vétérinaire peut être mise en jeu.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1406 du 21/5/2010 en page 17.

Le permis de détention

• Justification de l’identification du chien.

• Vaccination antirabique.

• Assurance responsabilité civile spécifique.

• Stérilisation chirurgicale et irréversible pour les chiens de première catégorie.

• Attestation d’aptitude du propriétaire ou du détenteur.

• Evaluation comportementale du chien.

• Possibilité pour le maire de refuser le permis au vu de l’évaluation.

Questions/réponses

• Le propriétaire d’un chien mastiff sans papier (issu de mastiffs uniquement, non croisé) souhaite sortir son chien de la première catégorie. Est-ce envisageable ?

Il peut être conseillé à ce client de se rendre à une exposition canine pour faire confirmer son chien mastiff. S’il est reconnu conforme au standard de la race, il pourra être inscrit à titre initial au Livre des origines français (LOF). Une condition préalable est toutefois requise : le livre de la race doit être ouvert. Une fois confirmé à titre initial, le chien sort de fait de la première catégorie.

• Le tosa est-il un chien de première catégorie ?

Un tosa non inscrit au LOF est classé en première catégorie. Un tosa de race non, car cette race canine est inscrite dans un livre reconnu par le ministère de l’Agriculture. En effet, l’une des caractéristiques des chiens de première catégorie est qu’ils ne sont pas inscrits à un livre généalogique reconnu par le ministère. Le tosa de race sera classé en deuxième catégorie.

• Un boerboel avec des papiers sud-africains est-il catégorisé ?

Ce chien appartient au standard de race du Kennel Union of Southern Africa, reconnu par la Fédération cynologique internationale. Ce boerboel n’a donc pas à figurer en première catégorie.

• Un pitbull né après le 1er janvier 1999 est-il forcément illégal ?

S’il s’agit d’un chiot, même s’il est considéré comme croisé american staffordshire terrier, il est recommandé de mentionner « race indéterminée ». Seule une diagnose ultérieure, réalisée à l’âge adulte, permettra de déterminer si ce chien est catégorisé ou non. Les critères morphologiques de l’arrêté du 27 avril 1999 ne concernent que les adultes ; un chiot pitbull de première catégorie de moins de huit mois n’a pas d’existence légale.

• Une personne qui a un casier judiciaire peut-elle détenir un chien de catégorie ?

Non, la détention est interdite, mais la propriété est autorisée.

M. N.

POUR EN SAVOIR PLUS

• C. Diaz et C. Debove : L’évaluation comportementale, guide pratique et juridique, hors série au n° 1374 de La Semaine Vétérinaire du 2/10/2009.

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