Le ralentissement du transit nécessite un traitement agressif - La Semaine Vétérinaire n° 1401 du 16/04/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1401 du 16/04/2010

Affections digestives du lapin

Formation continue

FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Julie Brackman

Réhydratation, antidouleur, réalimentation et stimulation du transit sont à associer.

Lesaffectionsdigestives représentent la majorité des motifs de consultation chez le lapin. « L’alimentation et le stress jouent un rôle essentiel dans leur apparition, d’où l’importance de la prévention et des conseils prodigués lors des consultations vaccinales », indique notre consœur Véronique Mentré. L’examen dentaire complet (avec un otoscope) est fondamental, quitte à tranquilliser l’animal, car un problème dentaire est souvent à l’origine des troubles digestifs. La palpation des mandibules peut orienter le diagnostic. Le pylore est étroit, ce qui favorise la rétention gastrique. Le lapin ne peut pas vomir, car le cardia ne s’ouvre pas. Il n’est donc pas nécessaire de le mettre à jeun longtemps avant une anesthésie. Le cæcum est particulièrement volumineux. Le lapin pratique la cæcotrophie, ce qui signifie qu’il mange ses premières crottes, molles, luisantes et malodorantes, riches en nutriments, qui subissent une seconde digestion. Cet élément est à prendre en compte si la mise en place d’une collerette pendant quelques jours est nécessaire.

Le ralentissement du transit est le trouble digestif le plus fréquent

Le ralentissement, voire l’arrêt du péristaltisme intestinal, peut être primaire (corps étranger) ou secondaire (douleur, notamment problème dentaire). Il s’agit du trouble digestif le plus fréquent. Cela ne prend pas la forme d’une constipation (accumulation de selles dures). La douleur et l’anorexie en sont à la fois les causes et les conséquences. Une prise en charge rapide et agressive est nécessaire. « Un arrêt de transit depuis vingt-quatre heures est une urgence », prévient notre consœur. Le diagnostic est d’abord clinique (anorexie, abattement, absence ou faible quantité de selles, douleur abdominale) et peut être confirmé par la radiographie (dilatation aérique ou tube digestif vide). Le pronostic dépend de la durée du ralentissement (car l’anorexie provoque une déshydratation et une lipidose hépatique) et de la localisation de la stase (les localisations cæcales sont plus graves que les gastriques). Même s’il est souvent possible de relancer le transit, il faut rester réservé devant le propriétaire.

Le traitement associe plusieurs axes. Il doit d’abord être étiologique (origines dentaires, vésicales et utérines). Le réchauffement de l’animal est souvent inutile (risque d’hyperthermie). Une réhydratation (100 ml/kg/j + volume lié aux pertes, par voie sous-cutanée, intraveineuse ou intra-osseuse) est fréquemment nécessaire. La gestion de la douleur est indispensable, pour rompre le cercle vicieux douleur-anorexie-stase-douleur. Véronique Mentré encourage l’utilisation du méloxicam (0,1 à 0,3 mg/kg, une à deux fois par jour) ou de la buprénorphine (0,1 à 0,15 ml/kg). La réalimentation est un autre point essentiel. Elle se fait, si possible, avec un aliment adapté, Critical Care® (« mais, au pire, mieux vaut de la soupe de légumes que rien si les propriétaires ne peuvent pas amener l’animal à la clinique immédiatement ! »), jusqu’à ce que le lapin se nourrisse seul. Une sonde naso-œsophagienne peut être mise en place, mais pas plus de quelques jours (le lapin respire par le nez). Le métoclopramide (0,5 mg/kg par voie sous-cutanée ou per os, deux à trois fois par jour) stimule le transit, ainsi que l’exercice et les massages abdominaux. Les hépatoprotecteurs peuvent être employés lors de lipidose hépatique. Le traitement doit être maintenu jusqu’à la reprise d’un transit normal.

Le jus d’ananas aide à la dissolution des trichobézoards

La présence de poils dans l’estomac du lapin est normale. La formation de trichobézoards est souvent la conséquence d’une déshydratation ou d’une alimentation pauvre en fibres. Le traitement peut inclure du jus d’ananas frais (10 ml/j), qui apporte de la broméline, une enzyme qui dissout la matrice protéique des poils. Des comprimés de broméline sont disponibles et peuvent être employés en prévention. Féligastryl® peut aussi être utilisé. La décision chirurgicale est difficile à prendre, car le pronostic de la gastrotomie est plus réservé que chez les carnivores.

Les antidiarrhéiques sont à éviter, en raison de la grande sensibilité aux arrêts de transit

Il convient de ne pas confondre une diarrhée avec des cæcotrophes collés en région périanale (syndrome des selles molles). En effet, la prise en charge est médicale dans le premier cas, alimentaire dans le second. Le syndrome des selles molles, souvent rencontré chez les lapins obèses, est lié à un manque de cellulose et à un excès de glucides. Le traitement passe par l’arrêt de la verdure le temps de la récupération, puis par sa réintroduction progressive, ainsi que par l’administration de foin et de granulés à plus de 18 % de cellulose. Le pronostic est bon.

Les diarrhées du jeune sont souvent des coccidioses, au pronostic réservé. Chez l’adulte, la diarrhée chronique, rare, peut être parasitaire (oxyures, giardia), métabolique (insuffisance rénale), bactérienne (clostridiose, rare chez le lapin domestique, mais grave), virale (VHD, rare mais grave) ou iatrogène (alimentation ou antibiothérapie inadaptée). Le traitement comprend la réhydratation, les pansements intestinaux et le réensemencement de la flore (probiotiques). Le fenbendazole peut être utilisé. Les antidiarrhéiques sont à éviter, car les lapins sont particulièrement sensibles aux arrêts de transit.

Les affections digestives du lapin nécessitent donc un traitement précoce, agressif et complet. La prévention est essentielle : donner du foin de bonne qualité (70 % de l’alimentation), des granulés purs à plus de 18 % de cellulose (30 à 40 g/j), de la verdure riche en fibres (cresson, roquette, etc., à raison de 3 à 4 % du poids vif du lapin), et éventuellement un peu de fruits. Le pain et les graines sont à proscrire. La prévention du stress est également importante.

CONFÉRENCIÈRE

Véronique Mentré, consultante exclusive NAC à Montigny-lès-Cormeilles (Val-d’Oise), chargée de consultation à l’ENVA.

Article rédigé d’après la conférence « Principales affections digestives du lapin », présentée lors d’une formation organisée par l’Afvac Ile-de-France, en janvier 2010.

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