Le pouvoir tampon d’un aliment peut être prédit à partir de celui des matières premières

Outre les critères nutritifs des aliments (caractéristiques énergétiques, azotées, minérales, vitaminiques) et leurs impacts sur les animaux, relativement faciles à mesurer, les fabricants et leurs formulateurs sont aussi intéressés par de nouveaux indicateurs qui portent notamment sur les propriétés physico-chimiques des aliments, comme leur pouvoir tampon. Ce dernier est la capacité d’une solution contenant une quantité donnée de l’aliment à résister à une variation de pH lors de l’addition d’un acide ou d’une base. Ce pouvoir tampon, mieux étudié chez le porc, est peu évalué chez les volailles. Une étude⁽¹⁾ a donc été mise en place pour mesurer celui des principales matières premières des aliments pour volailles et examiner la possibilité de prédire le pouvoir tampon de l’aliment à partir de celui des matières premières qui le constituent.

Le pouvoir tampon des matières premières (maïs, blé, triticale, orge, différents tourteaux, etc.), des prémix (minéraux et vitamines) et des aliments finaux est déterminé par l’addition de 150 ml d’eau à un échantillon de 20 g, le mélange étant mis à incuber pendant quarante-cinq minutes à 37 °C. Après la mesure du pH initial, le pouvoir tampon est calculé à partir de la quantité d’acide chlorhydrique (HCl) nécessaire pour abaisser le pH de 1 kg à une valeur égale à 3, et rapporté à un changement d’une unité pH. Par exemple, lorsque le pH initial est de 5 et que 50 ml de HCl sont ajoutés pour obtenir une valeur de 3, le pH varie donc de deux unités. Le pouvoir tampon est donc 50 ml/2 = 25 ml.

Le pouvoir tampon des minéraux est fortement corrélé à la teneur en calcium

Le pouvoir tampon des céréales est compris entre 40 et 60 meq/kg, alors que celui de leurs sous-produits est en moyenne deux fois supérieur (par exemple, 129 pour le son). Celui des matières premières protéiques (graines et tourteaux) est globalement plus élevé (entre 120 et 300 meq/kg) que celui des céréales et de leurs sous-produits. La teneur en protéines des matières premières organiques est positivement et fortement corrélée avec le pouvoir tampon (coefficient de corrélation de 0,94). Aucune autre relation avec d’autres critères de composition des matières premières n’est observée.

Les minéraux constituent la catégorie qui présente les valeurs les plus fortes (entre 1 100 et 3 000 meq/kg). La teneur en calcium des matières premières minérales est positivement et fortement corrélée avec le pouvoir tampon (coefficient de corrélation de 0,96).

Une diminution du pouvoir tampon des aliments finaux du poulet et du dindon est observée avec l’âge des animaux (l’aliment de démarrage a le plus fort, l’aliment de finition le plus faible). Celui des aliments pour poules pondeuses (entre 500 et 600 meq/kg) est supérieur à celui des aliments pour volailles de chair (entre 170 et 250 meq/kg).

L’étude démontre également que les valeurs de pouvoir tampon calculées (obtenues en multipliant le taux d’incorporation de chaque matière première dans l’aliment par leur valeur individuelle de pouvoir tampon) sont comparables à celles qui sont mesurées. Donc, au final, le pouvoir tampon des aliments et prémix pour volailles peut être prédit à partir de celui de chacune de leurs matières premières et ingrédients.

La possibilité de prédire le pouvoir tampon d’un aliment à partir de ses éléments constitutifs permettra d’intégrer ce critère pour formuler les aliments. Les taux de protéines et de calcium expliquent probablement les différences de valeur entre les aliments distribués selon l’âge des animaux, mais aussi le type de production (le pouvoir tampon des aliments pour poules pondeuses, qui contiennent plus de calcium, est plus élevé que celui des volailles de chair).

• (1) J.M. Gomez, A. Corniaux : « Effet du pouvoir tampon de l’aliment sur les performances zootechniques du poulet et du dindon », 8^e journées de la recherche avicole, 2009, pp. 239-243.

• Voir aussi « Un aliment à fort pouvoir tampon dégrade les performances des volailles », paru dans La Semaine Vétérinaire n° 1396 du 12/3/2010 en page 36.