Quand les comportementalistes rencontrent des psychiatres…

De la synapse à la thérapie, de l’hérédité à l’environnement, du médicament à l’enseignement : le thème original de la transmission a été abordé sous tous ses angles, lors des Journées annuelles de l’association Zoopsy. Elles ont réuni soixante-dix participants à La Toussuire (Savoie), du 6 au 9 janvier dernier, autour de douze conférences sur ce sujet, nécessitant une confrontation d’expérience et d’expertise entre la médecine comportementale vétérinaire et la psychiatrie ou la psychologie. A titre d’exemple, Philippe Raymondet et François Legros ont abordé la folie transmise à travers une analyse saisissante de cas cliniques issus des annales de la psychiatrie (du double meurtre commis par les sœurs Papin sur leurs patronnes dans les années 30 jusqu’au suicide collectif des adeptes du Temple du Peuple en 1978).

D’autres aspects ont suivi, traités par des psychiatres et des psychologues : le référé, la “transmission” de l’estime de soi des parents aux enfants, la révolte de l’enfant doué ou la transmission du traumatisme dans les situations spécifiques des violences conjugales.

Le thème de la transmission a également reçu un éclairage vétérinaire

Notre consœur comportementaliste Catherine Mège a évoqué le rôle de vecteur du vétérinaire dans l’éducation du chien, décliné en trois domaines : éducation et vie en société, éducation et dressage, éducation et citoyenneté. L’objectif, pour le vétérinaire comme pour les autres acteurs, est de savoir transmettre au propriétaire ce que ce dernier devra lui-même apprendre au chien. Cette transmission nécessite explications, démonstrations, utilisation de métaphores et mises en situation.

La transmission par les métaphores (« je vous conseille de vous comporter avec votre chien comme s’il était votre colocataire, de garder vos distances pour maintenir une relation sans ambiguïté ») est un outil puissant. Son intérêt pour décrire une situation ou une thérapie et pour communiquer a été démontré par Gérard Muller : « L’objectif n’est pas de dire le vrai, mais de provoquer un ressenti et de faire comprendre. »

Ont également été présentés au cours de ces journées les hypothèses actuelles sur la transmission des troubles du développement chez le chiot, d’origine génétique ou via la mère (in utero, attachement, apprentissage) ; la mise en cause de la relation simpliste entre affection psychiatrique et dysfonctionnement d’un système de neurotransmission ; les temps princeps de la transmission au cours de la consultation (apprendre, écouter, sélectionner, transférer, valider, finir), ainsi que la transmission au grand public, c’est-à-dire la communication à un large auditoire d’informations dans le but d’agir sur des représentations communes et de transmettre au plus grand nombre le savoir, pour une appropriation individuelle et collective.

Des ateliers interactifs en binômes et des mémoires

Par ailleurs, ces journées ne sont pas uniquement consacrées aux conférences, mais offrent aussi un véritable laboratoire d’échanges pendant trois jours. Elles proposent en effet aux congressistes des ateliers interactifs, supervisés et animés par des binômes vétérinaire comportementaliste/psychiatre (ou psychologue) qui reposent sur des mises en situation à travers des jeux de rôles : par exemple, une consultation en présence d’un propriétaire avec un questionnement des participants à tour de rôle.

Ces journées sont en outre une vitrine professionnelle des mémoires du diplôme de vétérinaire comportementaliste. Elles permettent aux étudiants de partager leurs résultats avec leurs futurs pairs, mais aussi avec les élèves actuellement en formation. Ces mémoires, qui ont souvent demandé à leurs auteurs un travail considérable, méritent aussi d’être “transmis” au monde professionnel, toujours demandeur de recherches scientifiques de qualité face aux questions sans réponses suscitées par la pratique quotidienne.

Ces journées restent un bon indicateur du dynamisme de la médecine comportementale en France.