Les bases de la chirurgie oncologique en dix règles - La Semaine Vétérinaire n° 1390 du 29/01/2010
La Semaine Vétérinaire n° 1390 du 29/01/2010

Cancérologie

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Philippe Zeltzman

Suivre quelques principes fondamentaux permet d’éviter les mauvaises surprises, de réduire le risque de récidive et d’améliorer le pronostic.

Les meilleures chances de succès en matière de chirurgie oncologique sont réunies lors de la première exérèse d’une tumeur. Dès la toute première intervention, l’objectif est d’obtenir des marges saines et d’assurer une cicatrisation optimale.

1 FAIRE LE BILAN.

Même si une tumeur a de “fortes chances” d’être bénigne, il est important de réaliser un bilan d’extension systématique avant toute intervention chirurgicale, par exemple trois clichés radiographiques du thorax. Cela permet d’éviter les surprises désagréables.

2 PRÉPARER L’ANIMAL.

Il est primordial de tondre l’animal de manière généreuse. L’auxiliaire doit se sentir libre de tondre bien au-delà des bords d’une tumeur cutanée. De même, pour éliminer tout doute dans l’esprit des praticiens, la totalité de la peau rasée devrait aussi être savonnée. Le but de cette double règle est la possibilité d’étendre l’incision cutanée selon les besoins, sans être limité par la présence de poils ou de peau non lavée.

3 PRÉPARER SON APPROCHE.

Prenons le cas d’un fibrosarcome sur la cuisse d’un chat. Si l’exérèse se révèle difficile, ou si une suture cutanée sans tension est impossible (option 1), il est important de réfléchir à l’éventualité d’un lambeau pédiculé (option 2), voire d’une amputation (option 3).

Cet exercice mental est capital avant même de commencer l’intervention. En fait, la réflexion débute durant la consultation et les différentes options doivent être expliquées au propriétaire pour éviter toute mauvaise surprise.

4 PLANIFIER L’INCISION.

Lors de l’exérèse d’une tumeur cutanée, l’incision devrait être parallèle aux lignes de tension. Celles-ci sont semblables aux rayures d’un zèbre. Réaliser une incision perpendiculaire aux lignes de tension risque de conduire à une déhiscence de la plaie.

5 PROTÉGER LES TISSUS.

Les tissus sains doivent être protégés des cellules cancéreuses. Quelles que soient la tumeur et sa localisation, le praticien peut imaginer qu’elle est couverte de pus afin de se rappeler de l’importance de ce concept. Il est ainsi possible de couvrir la tumeur de champs en tissu ou de demander à un assistant d’isoler la tumeur des tissus environnants.

6 DOUCEUR ET DÉLICATESSE.

De même, il convient d’éviter de rompre l’intégrité de la tumeur afin de protéger les tissus sains des tissus cancéreux. Pour cela, ces derniers sont manipulés avec délicatesse, en particulier lors de l’extériorisation d’une tumeur splénique. Sa rupture conduirait à une contamination de la cavité abdominale.

7 EXCISER LE TRAJET DE BIOPSIE.

Si une biopsie a été réalisée avant l’exérèse, le site de prélèvement doit être éliminé en même temps que la tumeur. Il est donc important de garder cette règle à l’esprit lors de la réalisation de la biopsie. Autrement dit, le trajet de la biopsie est déterminé afin de pouvoir l’exciser ultérieurement.

8 RESPECTER LES AUTRES RÈGLES CHIRURGICALES.

Les règles chirurgicales fondamentales s’appliquent aussi à la chirurgie oncologique. Elles incluent le respect de l’asepsie, la préservation des vaisseaux sanguins, la réduction de l’espace mort, l’absence de sutures sous tension ou encore la manipulation délicate des tissus.

9 TOUT CHANGER.

Toujours dans l’esprit de protéger les tissus sains, les gants et les instruments sont changés avant de procéder à la fermeture du site chirurgical. Des champs propres peuvent être disposés par-dessus les champs souillés.

10 ETRE AGRESSIF.

La crainte d’être trop invasif et le manque d’équipement ou d’expérience risquent fort d’entraîner la récidive de la tumeur. C’est particulièrement vrai pour les tumeurs des mâchoires comme les épulis. Une exérèse conservatrice, telle qu’un simple curetage, est souvent réalisée, alors qu’une mandibulectomie ou une maxilectomie partielle offre des chances de succès, voire de guérison, bien supérieures. Les résultats cosmétiques et fonctionnels sont, le plus souvent, excellents.

Même si ces principes de base sont loin d’être exhaustifs, ils devraient permettre de réaliser des interventions chirurgicales dans de meilleures conditions, de réduire le risque de récidive et donc d’améliorer le pronostic et la survie de l’animal.

Quatre types d’exérèse tumorale

A chaque tumeur correspond une exérèse : intracapsulaire, marginale, large ou radicale. Déterminer quel type est envisageable est la condition sine qua non pour savoir s’il sera possible d’obtenir des marges généreuses. En effet, les cellules les plus agressives (à index mitotique le plus élevé) sont situées aux pourtours de la tumeur. La première intervention est logiquement celle qui offre le plus de chances de succès. En effet, la seconde est plus compliquée parce qu’il est difficile, sinon impossible, de savoir à quel point être invasif pour obtenir des marges saines.

• L’exérèse intracapsulaire ne permet que la cytoréduction d’une tumeur. La capsule est constituée de cellules cancéreuses comprimées, mais bel et bien vivantes, et ne représente pas des marges saines. Le but n’est pas de guérir l’animal de son cancer, mais de prolonger sa survie et d’augmenter son confort en réduisant la masse tumorale. C’est par exemple le cas lors de tumeurs infiltrantes des membres distaux.

• L’exérèse marginale permet l’ablation de la tumeur de sa capsule sans possibilité d’obtenir des marges saines généreuses. Cela inclut les tumeurs de la glande thyroïde chez le chien. Dans les deux situations ci-dessus, il doit être parfaitement clair pour le propriétaire que l’exérèse n’est pas complète et que la tumeur récidivera en l’absence de chimiothérapie ou de radiothérapie.

• L’exérèse large permet le retrait de la tumeur avec des marges saines dans toutes les directions. Une récidive est donc improbable si l’opération est réalisée dans de bonnes conditions, c’est-à-dire en respectant les principes fondamentaux de la chirurgie oncologique, par exemple en cas de mastocytome ou de fibrosarcome.

• L’exérèse radicale requiert l’ablation de la structure entière, par exemple lors de l’amputation d’un doigt ou d’un membre. Si la récidive est presque impossible, le risque de métastase demeure bel et bien présent.

Au final, il est important de consacrer le temps nécessaire à la préparation de l’exérèse d’une tumeur, afin de choisir le meilleur traitement chirurgical possible. Si les marges ne sont pas saines, il faudra conseiller la chimiothérapie ou la radiothérapie pour maximiser les chances de succès.

Ph. Z.
Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr