Retour sur l’épidémie de grippe équine à Grosbois en 2009

Ces dernières années, des épisodes sévères de grippe équine ont touché le Japon et l’Australie. La situation française est surveillée par le Réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine (Respe) et la vigilance des vétérinaires sentinelles. Malgré la vaccination, des cas de grippe sont identifiés tous les ans. L’année 2009 a vu un foyer, ayant pour point de départ le centre d’entraînement de Grosbois, se transformer en véritable épizootie, avec une ampleur plus marquée que précédemment.

Dix départements atteints sur une période de cinq mois

L’épisode a débuté mi-février avec un prélèvement positif chez un trotteur qui présentait un syndrome fébrile, avec jetage nasal mucopurulent. Une semaine plus tard, les premiers cas sont identifiés en Normandie, suivis par d’autres recensés sur l’hippodrome de Cagnes-sur-Mer. Un mois après, un foyer chez des trotteurs dans le Tarn-et-Garonne est signalé puis, début avril, des cas sont identifiés en région parisienne et à Chantilly chez des chevaux de sport et des pur-sang. Les derniers cas rattachés au foyer de Grosbois apparaissent en Ille-et-Vilaine, fin juin, soit plus de quatre mois après le début de l’épizootie.

Au total, dix-neuf foyers seront déclarés, répartis sur les départements des Alpes-Maritimes, du Calvados, d’Ille-et-Vilaine, de Mayenne, de l’Oise, de l’Orne, des Pyrénées-Atlantiques, du Tarn, du Tarn-et-Garonne et du Val-de-Marne.

Les informations remontées par les vétérinaires sentinelles lors des déclarations au Respe et les contacts téléphoniques de suivi ont permis de proposer un schéma de liens épidémiologiques avérés ou suspectés entre les différents foyers. Si le point de départ initial n’a pu être déterminé, la quasi-totalité des foyers semblent être reliés au foyer primaire de Grosbois ou reliés entre eux (^{voir figure}). Les premiers ont été identifiés dans les grands centres ou régions d’entraînement, mais aussi autour des hippodromes. Le passage du virus du trotteur à d’autres races a pu avoir lieu sur des sites regroupant les différentes races. Une enquête menée à Grosbois, dix jours après le premier cas, a montré que 62 % des écuries étaient touchées.

La détection des protéines virales sur écouvillon nasal a montré des limites

A l’heure actuelle, la recherche de protéines virales à partir de sécrétions nasales ou de liquide de lavage trachéal est la technique de diagnostic la plus couramment utilisée pour la grippe équine. Ce test rapide et économique reste le premier choix sur des effectifs naïfs, peu ou pas vaccinés et en pleine phase clinique. En revanche, la technique a montré des limites, avec un défaut de sensibilité en début et en fin d’épisode grippal, mais aussi chez des chevaux vaccinés (plus de 50 % de chevaux infectés détectés comme négatifs par le test rapide). Il est vraisemblable que, dans les conditions décrites, la charge virale ait été faible.

La comparaison des souches a confirmé les liens épidémiologiques entre les foyers

Des techniques de biologie moléculaire ont servi à réaliser un typage des souches virulentes circulantes par amplification et séquençage des souches identifiées, ce qui a permis ensuite de les comparer et de confirmer les liens épidémiologiques entre les foyers. Ainsi, ceux de Cagnes-sur-Mer et du Tarn-et-Garonne étaient bien liés à celui de Grosbois. Il en est de même pour Chantilly avec Grosbois et Pau. Ce typage a aussi permis de suivre l’évolution du virus grippal au cours du temps et de le comparer à ceux présents dans d’autres pays. La souche française mise en évidence est proche du lignage Ohio 2003 qui domine ces dernières années (épisodes japonais et australien).

L’enquête épidémiologique sur le domaine de Grosbois a confirmé les déclarations du Respe selon lesquelles les chevaux vaccinés contre la grippe étaient moins infectés et présentaient une forme moins sévère. Les entraîneurs interrogés ont estimé que les jeunes chevaux (deux ou trois ans) récemment vaccinés se sont révélés davantage atteints que les plus âgés, qui avaient reçu plusieurs rappels successifs. En outre, d’après les entraîneurs et les vétérinaires, les symptômes sont restés relativement modérés, avec une phase clinique courte de trois à quatre jours.

Cet épisode remet en lumière l’importance des contrôles et des règles sanitaires lors de tout rassemblement de chevaux (concours, hippodromes, centres d’entraînement, etc.).

• Source : P.-H. Pitel : « Le point sur l’épidémiologie de grippe Grosbois 2009 », conférence présentée aux journées annuelles de l’Avef, Deauville 2009.