Le hérisson nantais sous l’œil des vétérinaires

Après les rapaces et les abeilles, le centre vétérinaire de la faune sauvage et des écosystèmes de l’école de Nantes planche sur le hérisson européen. Une espèce dite “parapluie”, dont le domaine vital est fréquenté par de nombreux animaux comme le renard, le lapin, la chauve-souris, les oiseaux, les insectes, etc. Or les services d’urbanisme de la ville de Nantes, qui mènent une étude paysagère depuis 2008, ont mis en évidence la présence de corridors biologiques et écologiques empruntés par la faune sauvage. Dans quelle proportion, sur quel cheminement, avec quelle fréquence ? Pour le savoir, la municipalité a sollicité les services de l’école vétérinaire. En effet, à l’exception d’études canadiennes et australiennes et de la thèse de Pauline Hubert sur les « effets de l’urbanisation sur une population de hérissons européens » (2008), la bibliographie sur Erinaceus europaus, une espèce protégée par la loi de 1976, est pauvre.

Avec le concours d’étudiants, la démarche vise à observer l’animal pendant près de dix mois, dans les quartiers Dervallières-La Durantière et Saint-Joseph-de-Porterie. Si l’un est urbain et l’autre plus résidentiel, tous deux bénéficient de la proximité de cours d’eau(la Chézine et l’Erdre) et de coulées vertes susceptibles de concentrer une forte densité de mammifères. « Le hérisson d’Europe est un bon indicateur de la biodiversité en ville. Considéré comme une “espèce parapluie” en milieu urbain, sa présence garantit celle de nombreuses autres espèces, de telle sorte que favoriser ses déplacements et entretenir sa présence dans un espace revient à protéger l’ensemble du biotope associé », souligne-t-on du côté de la mairie. Ces travaux devraient enrichir les études et les projets en vue d’aménagements futurs dans une agglomération où le seul projet urbain de l’Ile-de-Nantes (337 ha) concentre actuellement une soixantaine de chantiers. « Représentative, l’espèce est aussi aimée du public », précise Olivier Lambert, responsable technique du centre vétérinaire de la faune sauvage et des écosystèmes, qui compte sur la participation de la population. « En une semaine, nous avons reçu une vingtaine d’appels de particuliers pour nous signaler la présence de hérissons », indique-t-il.

Une action pédagogique dans les écoles et les associations de quartier

Si aucun prélèvement d’animaux vivants n’aura lieu, tous seront en revanche auscultés, mesurés, pesés et marqués par un code couleur en quelques minutes, de manière à suivre leurs pérégrinations, qui peuvent varier de 2 à 4 km par nuit. Il s’agira de spécifier les modes de vie de l’animal (mortalité, reproduction, etc.) et les dangers qui le guettent. Des analyses toxicologiques seront effectuées chez les animaux morts pour mesurer l’exposition à des produits chimiques, ainsi qu’une étude parasitaire. Les excréments seront disséqués pour connaître leur régime alimentaire.

Ralentie pendant la période d’hibernation, l’étude doit se poursuivre jusqu’à l’été 2010. « Les observations nous permettront d’accroître nos connaissances sur la biodiversité et la faune sauvage en milieu urbain, se félicite Olivier Lambert. En France, la prise de conscience de l’importance de la biodiversité est récente. Ça commence à bouger. Tant mieux, car les enfants en savent souvent plus sur le lion et l’éléphant que sur le renard. Or les problèmes de biodiversité et de faune sauvage ne concernent pas seulement l’Afrique. » Il s’agira d’ailleurs de l’un des volets pédagogiques de l’étude, qui comprend des animations dans les écoles et les associations de quartier.