L’échographie de contraste est une technique d’avenir - La Semaine Vétérinaire n° 1378 du 30/10/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1378 du 30/10/2009

Imagerie médicale

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Pascaline Pey

Fonctions : résidente en imagerie médicale à l’université de Gand (European College of Veterinary Diagnostic Imaging, ECVDI)

Cet examen utilise un agent de contraste peu habituel : des microbulles de gaz. Il apporte des possibilités diagnostiques complémentaires.

L’échographie trouve désormais de nouvelles applications, grâce à la possibilité de réaliser cet examen avec un produit de contraste. Cette méthode permet d’étudier la microvascularisation des lésions nodulaires focales et de caractériser les lésions bénignes et malignes selon une sémiologie et une fiabilité proches de celles de la tomodensitométrie. Son utilisation nécessite une adaptation des équipements classiques.

L’échographie de contraste utilise des microbulles constituées d’un gaz, stabilisé par un surfactant (sucre, albumine ou lipide, selon les produits). Dans la circulation sanguine, le surfactant se délite lentement et le gaz diffuse avant d’être résorbé. Plusieurs propriétés pharmacologiques de ces microbulles méritent d’être signalées :

– leur taille définit leur utilisation : en effet, pour être utilisables en pathologie hépatique par exemple, les microbulles doivent avoir un diamètre inférieur à 9 µm afin de franchir les capillaires pulmonaires après leur injection intraveineuse périphérique ;

– leur stabilité dépend de l’encapsulant, et surtout du gaz qui les composent : les perfluorocarbones, gaz inertes, sont moins diffusibles et ont une durée de vie plus longue.

De nombreux produits de contraste, dont la tolérance est bonne, sont actuellement utilisés dans le monde, qu’ils soient commercialisés ou en phase d’étude clinique. Seuls le Lévovist® (Schering) et le SonoVue® (Bracco) disposent aujourd’hui d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) en France. Un flacon de 5 ml de SonoVue®, d’un coût d’environ 70 €, permet de réaliser trois à quatre examens chez des chiens de taille moyenne. Une fois en solution, le produit doit toutefois être utilisé dans les six heures qui suivent, ce qui implique une bonne organisation.

Le signal réfléchi peut être jusqu’à cent fois supérieur à celui du sang normal

Le mécanisme essentiel du rehaussement engendré par les microbulles est le même que pour tout écho de réflexion : l’augmentation du signal ultrasonore réfléchi est proportionnelle à la différence d’impédance acoustique entre deux structures. L’air, ou un autre gaz, a une impédance acoustique particulièrement élevée comparativement au sang et aux tissus humains. La quantité de signal ultrasonore réfléchie par les tissus dont la microvascularisation contiendra ces microbulles sera donc notablement accrue. Le signal réfléchi peut être jusqu’à cent fois supérieur à celui du sang normal.

Le second mécanisme générateur de signal est la destruction des microbulles soumises à une pression acoustique élevée. L’index mécanique affiché par la plupart des échographes est le reflet de cette pression. Lorsque l’index mécanique est supérieur à 0,7, ce qui est toujours le cas quand l’appareil est réglé pour un examen échographique standard, les microbulles sont détruites par le faisceau ultrasonore. Cette destruction entraîne l’émission d’une quantité extrêmement importante de signal et la production d’un nombre important d’harmoniques (voir figure).

La circulation des produits de contraste échographiques est intravasculaire pure, sans passage interstitiel. La possibilité de voir en continu toute la dynamique de rehaussement permet la visualisation directe des vaisseaux et des microvaisseaux, ce qui apporte des possibilités diagnostiques complémentaires aux techniques de référence (tomodensitométrie, imagerie par résonance magnétique), voire supérieures dans certains cas. Cela permet notamment de détecter l’artérialisation des lésions avec une grande sensibilité. Le diagnostic lésionnel repose donc sur une nouvelle sémiologie, fondée sur la dynamique, et surtout l’architecture de rehaussement liée à l’arborescence vasculaire.

Réaliser deux injections intraveineuses successives de gaz de contraste

L’injection du produit de contraste est réalisée en bolus par voie intraveineuse (0,3 ml/10 kg, plusieurs réinjections possibles : jusqu’à quatre fois 0,5 ml pour un chien de moins de 20 kg) par l’intermédiaire d’un cathéter et d’un robinet à trois voies. Le bolus doit être immédiatement suivi d’une injection de 3 à 5 ml de soluté physiologique. La veine céphalique est généralement la plus utilisée. La manipulation est facilitée lorsque l’opérateur est aidé par une seconde personne pour l’injection. Au moment de l’injection, le déclenchement d’un chronomètre affiché à l’écran est indispensable pour le suivi et la relecture de l’examen. Ce dernier doit durer au moins deux minutes pour apprécier une phase tardive. Entre deux examens chez un même animal, il est important de détruire les microbulles piégées dans les organes comme la rate ou le foie, en “balayant” l’abdomen crânial pendant deux à trois minutes avec une puissance acoustique maximale, de telle sorte que les ultrasons détruisent la capsule des microbulles. Il est préférable de pratiquer deux injections consécutives pour un même organe étudié. La qualité de l’examen est généralement meilleure lors de la seconde injection. L’examen doit ensuite faire l’objet d’une nouvelle visualisation et d’une analyse par phases (artérielle, parenchymateuse et tardive).

Parmi les indications, l’examen est surtout intéressant en pathologie hépatique

Au niveau hépatique (voir photo 1), l’échographie de contraste est nettement supérieure à l’échographie seule, surtout pour la détection de métastases qui sont souvent isoéchogènes au foie en échographie simple. Par ailleurs, la plupart des carcinomes hépatocellulaires montrent une phase artérielle précoce et apparaissent hypoéchogènes en phase tardive. Quant aux lésions bénignes, elles conservent la même échogénicité que le parenchyme hépatique voisin, en phase tardive.

Pour la rate (voir photo 2), les résultats sont nettement plus décevants. En effet, la distinction bénin/malin reste difficile, même avec l’utilisation d’un produit de contraste. Toutefois, l’hémangiosarcome splénique montre parfois un rehaussement particulier, pathognomonique de cette tumeur. Il s’agit d’un anneau vasculaire hyperéchogène bordant une cavité hypoéchogène. Cet anneau persiste généralement en phase tardive.

Pour le rein (voir photo 3), l’échographie de contraste est utile dans l’étude de la perfusion rénale, mais elle accroît surtout la capacité de l’opérateur à détecter des lésions focales et à distinguer les lésions malignes primaire ou secondaires et bénignes.

Au niveau pancréatique, seul l’aspect du pancréas normal est pour le moment décrit. Les données de médecine humaine laissent de bons espoirs quant à la distinction inflammatoire/néoplasique, mais aussi dans la détection de nodules pancréatiques (insulinome).

Pour les nœuds lymphatiques, des études montrent la capacité de l’échographie de contraste à identifier ceux qui sont infiltrés par un processus néoplasique. L’utilisation de cette technique se révèle donc intéressante dans le cadre des bilans d’extensions.

En dernier lieu, la technique trouve une application vasculaire. Elle se révèle en effet utile pour déceler un shunt porto-systémique. En médecine humaine, elle est employée dans la détection de thrombus, surtout en cardiologie.

Trois domaines de développement peuvent être envisagés

L’avenir des produits de contraste à ultrasons est passionnant à envisager, avec trois applications potentielles :

– le ciblage, qui permet la fixation des microbulles sur des structures comme les caillots sanguins, en plaçant des anticorps spécifiques à la surface des microbulles ;

– la délivrance locale de médicaments ou de gènes transportés par les microbulles et libérés par la destruction des bulles au moyen d’une onde ultrasonore de moyenne puissance ;

– l’aide à la thérapie ultrasonore en augmentant l’effet des ultrasons de haute intensité par un effet de cavitation et par la libération locale de substances cytotoxiques.

BIBLIOGRAPHIE

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  • • K. Kurata, K. Asano, A. Kito, K. Teshima, Y. Kato, Y. Saski, K. Edamura, H. Shibuya, T. Sato : « Contrast harmonic imaging of canine hepatic tumors », J. Vet. Med. Sci., 2006, vol. 68, n° 5, pp. 433-438.
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