Comment se gère la propriété partagée d’un animal ? - La Semaine Vétérinaire n° 1370 du 04/09/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1370 du 04/09/2009

Propriétaires multiples

Gestion

QUESTIONS/RÉPONSES

Auteur(s) : Céline Peccavy

Fonctions : Avocate au barreau de Toulouse

Lorsqu’un animal de compagnie appartient à plusieurs propriétaires, le régime à appliquer est celui de l’indivision.

Le terme de “copropriété” est utilisé couramment par les éleveurs d’animaux de compagnie pour désigner la propriété partagée d’un animal. Il n’est toutefois pas le plus approprié, et surtout pas le plus juste juridiquement. En effet, il suffit de chercher ce mot dans l’index alphabétique du Code civil pour constater qu’il renvoie à la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Si l’article 1 évoque la propriété partagée, l’animal est un bien meuble et nullement un immeuble.

Où trouver alors les règles qui régissent les rapports entre plusieurs propriétaires d’un seul animal ? La réponse réside dans l’appellation de cette propriété particulière, qu’il ne faut pas nommer “copropriété”, mais “indivision”. La recherche dans le Code civil se révèle alors fructueuse et conduit à la lecture des articles 815 et suivants, revisités par la loi 2006-728 du 23 juin 2006.

1 COMMENT SE MET EN PLACE L’INDIVISION ?

Certaines indivisions prennent naissance sans que les coïndivisaires aient à effectuer des démarches spécifiques. C’est le cas de l’indivision successorale, qui naît entre les cohéritiers et dure depuis le jour du décès jusqu’à celui du partage de l’hérédité. De la même manière, le droit de l’indivision a vocation à s’appliquer lors d’un divorce à la communauté conjugale dissoute, quelle que soit la cause de cette dissolution.

D’autres indivisions sont voulues par les indivisaires et mises en place lors d’une coacquisition. Tel est le cas pour l’achat commun d’un animal.

2 LE FINANCEMENT SE FAIT-IL À PARTS ÉGALES ?

La pluralité de propriétaires pose en premier lieu la question du financement. L’indivision entre deux personnes ne rime pas systématiquement avec un partage à égalité. Ainsi, il est tout à fait possible de créer une indivision où l’un des propriétaires de l’animal posséderait 90 % des droits indivis, tandis que l’autre n’en aurait que 10 %. Cela peut rappeler la situation des actionnaires qui détiennent des actions dans une société. Si la comparaison entre une société et un chien ou un chat peut paraître peu opportune, les deux ne sont pourtant pas si éloignés. Tout comme une société l’exige, l’indivision nécessite une organisation des pouvoirs. Par ailleurs, le financement n’est pas obligatoirement en corrélation avec la proportion de droits indivis détenus. En effet, l’achat peut être financé exclusivement par l’un des deux acquéreurs, alors que les droits indivis seront partagés par moitié. Comme le démontre un arrêt rendu par la Cour de cassation le 17 janvier 1995, l’acte d’acquisition est prioritaire : « La cour d’appel qui constate que l’acte d’acquisition indique que le bien a été acquis conjointement et indivisément, justifie légalement, par ce seul motif, sa décision retenant que les parties à l’acte sont propriétaires indivises. Et le fait que l’une d’elles alléguait avoir financé elle-même cette acquisition, sans dire en quoi cette circonstance aurait contredit les termes de l’acte, est un simple argument dépourvu de toute portée. »

3 DE QUELLE FAÇON PROUVER LA PROPRIÉTÉ MULTIPLE ?

Si l’animal appartenait auparavant à une tierce personne, les deux acquéreurs indivis seront alors mentionnés dans l’attestation de cession, qui fait preuve de propriété.

Si une personne cède à une autre la moitié de la propriété qu’elle détient sur un animal, les choses sont un peu plus compliquées. Certes, les deux noms apparaîtront sur le pedigree et sur la carte d’identification. Toutefois, cette dernière n’est pas reconnue comme un titre officiel de propriété, mais comme une simple présomption de propriété. Aussi, pour éviter tout litige, les parties auront tout intérêt à rédiger un acte de cession qui mentionne la quote-part de propriété cédée.

4 QUELS SONT LES MODES D’ORGANISATION ?

La vie d’une indivision peut obéir à deux types de règles : soit les coïndivisaires décident eux-mêmes d’organiser l’indivision dans une convention, soit la loi rend applicable une organisation résiduelle de base à défaut de convention ou en cas de convention incomplète.

L’organisation conventionnelle est expressément prévue par les articles 1873-1 et suivants du Code civil. La convention des parties se doit d’être la plus détaillée possible, donc d’envisager les diverses obligations des coïndivisaires, mais aussi les sanctions (autres que le partage) en cas de non-respect.

Pour sa part, le régime légal est organisé par les articles 815 et suivants du Code civil. Il incite les parties à désigner un mandataire qui sera doté d’un mandat général d’administration (suivi vétérinaire de l’animal, suivi du régime alimentaire, inscription à des concours de beauté ou de travail, etc.). En revanche, la vente ou la donation de l’animal requiert le consentement de tous. Un indivisaire peut toutefois légalement vendre sa quote-part. Dans un tel cas, l’autre dispose d’un droit de préemption pendant un délai d’un mois.

5 COMMENT SORTIR DE L’INDIVISION ?

C’est le droit le plus fondamental et le plus absolu de tout indivisaire. Il est consacré par l’article 815, qui dispose que « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ». Si la propriété commune d’un bien immobilier n’est pas toujours facile à gérer, celle d’un animal de compagnie donne lieu à un contentieux non négligeable. La fin amiable de l’indivision existe bien, mais elle est plutôt rare en l’espèce. L’aspect affectif et l’impossibilité de “couper” l’animal en deux mènent le plus souvent à la procédure judiciaire. Le tribunal décide alors qui aura la propriété pleine et entière de l’animal et qui percevra une indemnité compensatrice.

Questions fréquentes

• Existe-t-il un délai au-delà duquel le partage ne peut plus être demandé ?

Non. Le droit de demander le partage est imprescriptible (arrêt de la Cour de cassation du 12 décembre 2007).

• Le droit de préemption des indivisaires en cas de cession s’applique-t-il aux donations ?

Non. Ce droit ne concerne que les cessions à titre onéreux, selon les termes de l’article 815-14 du Code civil.

• La vente de parts indivises sans respect du droit de préemption est-elle nulle ?

Oui. L’action en nullité se prescrit, en outre, par cinq ans.

C. P.

PRÉCISIONS PRATIQUES

• Indivision, portées et saillies. Selon l’article 815-11 du Code civil, tout indivisaire peut demander sa part annuelle dans les bénéfices, déduction faite des dépenses entraînées par les actes auxquels il a consenti ou qui lui sont opposables. La vente de chiots ou de chatons et les saillies pouvant générer un bénéfice, ce dernier devra être réparti entre les indivisaires, proportionnellement à leurs droits (sauf accord contraire entre les parties).

• Dettes d’un indivisaire. Les créanciers de l’un des indivisaires ne peuvent pas obtenir le paiement en saisissant sa part dans le bien indivis. Néanmoins, ils ont la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d’intervenir dans le partage provoqué par lui. Le partage peut néanmoins toujours être arrêté par le paiement des dettes par l’autre indivisaire.

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