Une souche de rage des chauves-souris s'est adaptée aux mammifères terrestres

Au cours de la dernière décennie, de multiples cas de rage ont été décelés chez des mouffettes (Mephitis mephitis) et des renards (Urocyon cinereoargenteus) de la région de Flagstaff, dans le nord-est de l'Arizona. La découverte de dix-neuf mouffettes enragées début 2001 a révélé que la souche rabique est génétiquement similaire à celle associée à la grande chauve-souris brune (Eptesicus fuscus). Les cas isolés de mammifères terrestres contaminés par une souche de Lyssavirus des chauves-souris ne sont pas rares, mais ils jouent habituellement un rôle de cul-de-sac épidémiologique, incapables de transmettre le virus à leurs congénères, sauf exceptionnellement. En raison de l'ampleur de l'épizootie, dans une région auparavant indemne de rage chez les mammifères terrestres, il est improbable que toutes les mouffettes aient été contaminées à partir d'une chauve-souris. La mutation survenue en Arizona est remarquable, car elle a permis, en un court laps de temps, l'adaptation d'une souche rabique à une nouvelle espèce de mammifère, ainsi que l'acquisition d'une capacité de transmission au sein de l'espèce par simple contact.

Les animaux domestiques de la région sont mis en quarantaine

Entre janvier et avril derniers, la présence du variant de la grande chauve-souris brune est confirmée chez quatorze renards enragés. Cette adaptation multispécifique laisse craindre un risque de transmission à l'homme, en raison de la grande proximité avec les espèces infectées. « L'expansion de Flagstaff au cours des dernières décennies a offert à la rage une opportunité parfaite de muter par saut d'espèce », explique Charles Rupprecht, chef du programme “rage” au Centre de contrôle et de prévention des maladies (CDC). L'urbanisation croissante a en effet permis aux mouffettes et aux renards de trouver de nouvelles zones d'alimentation et d'habitat.

Les autorités municipales ont immédiatement réagi en déclarant une quarantaine de trois mois, qui a pris effet le 8 avril, afin de ralentir la propagation de la maladie. Les chiens et les chats doivent être vaccinés et confinés. D'autres restrictions s'appliquent à la faune sauvage.

La mise en évidence de cette épizootie souligne l'importance d'un programme de surveillance des maladies de la faune sauvage, y compris en l'absence de contamination humaine. Un tel système est fondamental en santé publique pour une évaluation précoce du risque et des mesures de prévention efficaces.

• Sources : A. Minard : « New, fast-evolving rabies virus found and spreading », National Geographic News, 4/5/2009 ; M.A. Leslie, C.E. Rupprecht et coll. : « Bat-associated rabies virus in skunks », Emerging Infectious Diseases, 2006, vol. 12, n° 8, pp. 1 274-1 277.