Les vétérinaires européens pro-actifs face à l'antibiorésistance - La Semaine Vétérinaire n° 1362 du 29/05/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1362 du 29/05/2009

Stockholm. Assemblées générales de l'UEVP et de la FVE

Actualité

Auteur(s) : Karin de Lange

Outre la stratégie communautaire en matière de santé animale, les spécificités de la Suède, pays d'accueil de l'assemblée, ont été largement abordées.

Notre profession devrait être plus proactive en matière d'usage raisonné des antibiotiques », estime Henk Vaarkamp (Pays-Bas), professeur en pharmacie à la faculté vétérinaire d'Utrecht, qui représente la profession au sein du bureau exécutif de l'Agence européenne du médicament (EMEA). Il s'adressait aux délégués de l'Union européenne des vétérinaires praticiens (UEVP) lors de son assemblée générale, le 21 mai dernier à Stockholm (Suède). C'est un fait, l'usage d'antibiotiques mène à la résistance des micro-organismes, « même s'il n'y a aucune preuve que les vétérinaires soient les seuls responsables », a-t-il rappelé. Christophe Buhot (France), président de l'UEVP, a renchéri sur cette nécessité d'être proactifs, bien que les praticiens ne soient en aucun cas les “acteurs uniques” de ce problème. En effet, mieux vaut agir plutôt « qu'attendre qu'une interdiction d'utiliser certains antibiotiques nous soit imposée ».

Cette urgence a été rappelée le lendemain, à l'occasion de l'assemblée générale de la Fédération vétérinaire européenne (FVE), dont l'UEVP est la section majeure. Au regard de l'augmentation de la prévalence des souches bactériennes multirésistantes, « nous arriverons bientôt au point où une pyodermite ne pourra plus être traitée avec des antibiotiques », a prévenu Christina Greko, microbiologiste vétérinaire à l'Institut national vétérinaire en Suède. Selon elle, aucune solution miracle n'existe pour infléchir cette tendance, mais seulement une approche durable, qui inclut une surveillance accrue, une diminution du besoin et un usage correct des antibiotiques, ainsi qu'un arrêt de tout emploi “non médical”. L'intervenant a décrit l'expérience suédoise, caractérisée par une diminution des prescriptions d'antibiotiques, « grâce aux éleveurs qui, très tôt, ont compris l'importance d'un usage raisonné ». Le pays observe par ailleurs depuis trois ans une baisse des prescriptions antimicrobiennes chez les animaux de compagnie. Cela pourrait être lié à l'observation, fin 2005, des premiers cas de Staphylococcus intermedius résistant à la méthicilline (Sirm) chez des chiens, a-t-elle suggéré. Par la suite, les hôpitaux vétérinaires ont en effet adopté une politique stricte en matière d'antibiotiques et de mesures d'hygiène. « Il est urgent d'agir, afin que les générations actuelles et futures, humaines et animales, aient accès à un traitement efficace contre les infections bactériennes. » Dans cette optique, un changement d'état d'esprit pourrait intervenir « en arrêtant de considérer les antibiotiques comme la solution à un problème, mais plutôt comme un outil lorsque les autres moyens de traitement ont échoué », a plaidé Christina Greko.

L'exception britannique sur le transport des animaux répond au principe de précaution

Les deux assemblées ont également permis à Harvey Locke (Royaume-Uni), vice-président de l'UEVP, de présenter les conclusions du séminaire sur les risques induits par les voyages avec des animaux de compagnie en termes de santé publique et animale, organisé lors du congrès de la British Small Animal Veterinary Association (Bsava)(1). Dans ce domaine également, mieux vaut prévenir que guérir. C'est d'ailleurs la ligne de la nouvelle stratégie communautaire de santé animale, mais aussi celle qui guide la dérogation au règlement sur le transport des animaux de compagnie appliquée au Royaume-Uni, en Irlande, en Finlande et à Malte. Ces pays continuent en effet d'exiger la vaccination contre la rage et un traitement prophylactique contre les tiques et les ténias pour tous les chiens et les chats qui entrent sur leur territoire. Même si l'assouplissement de certaines mesures est envisageable, leur abrogation totale « pourrait avoir des conséquences sévères pour la santé publique des pays concernés », selon Harvey Locke. Il a notamment cité l'introduction d'Echinococcus multilocularis, « à l'origine de l'hydatidose, l'une des plus graves zoonoses connues aujourd'hui », vers des zones actuellement indemnes.

S'ils ont parlé “chiens et chats”, les participants n'ont pas oublié les chevaux, notamment en abordant la révision de la législation communautaire sur les limites maximales de résidus. Jan Vaarten, directeur exécutif de la FVE, a ainsi souligné ses résultats positifs sur la disponibilité des médicaments pour les équidés. La liste des « principes actifs essentiels » pour le traitement des chevaux destinés à la chaîne alimentaire vient en effet d'être étendue à ceux « qui peuvent apporter des avantages cliniques » comparés aux autres traitements disponibles. En collaboration avec la Fédération européenne des associations vétérinaires équines (Feeva), la FVE examine actuellement les substances susceptibles de figurer dans cette liste étendue.

Une situation unique en matière d'assurance animalière

A tout seigneur tout honneur. Organisée à Stockholm, l'assemblée générale de l'UEVP ne pouvait manquer de se pencher sur la situation particulière de la Suède. Avec une couverture de 78 % des chiens, 27 % des chats et 74 % des chevaux, le pays fait notamment figure d'exception en matière d'assurance animalière. Elle ne concerne “que” 25 % des chiens, 30 % des chevaux et 1 % des chats dans les autres pays scandinaves. Les avantages de cette situation unique ont été présentés par notre confrère Pekka Olson, directeur exécutif adjoint d'Agria, la plus ancienne et importante compagnie d'assurances dédiée aux animaux. Selon lui, cette large couverture, ainsi que la collaboration étroite avec les propriétaires, les éleveurs et les praticiens permettent à la Suède d'avoir « probablement le plus haut niveau de soins vétérinaires par habitant en Europe ». Elle compte en effet plus de vingt grands hôpitaux pour animaux de compagnie, dont le chiffre d'affaires « dépend à 49 % d'Agria ». Selon lui, tout le monde s'y retrouve. En outre, 4 ‰ des gains nets sont investis dans la recherche. La base de données d'Agria fournit par ailleurs nombre d'informations en termes d'affections, de traitements, etc.

Dans le domaine de la science, tradition ne signifie pas efficacité

Prenant un peu de “hauteur”, Dan Larhammar, professeur au département de neurosciences de l'université d'Uppsala, a abordé la science et la non-science. Des traitements controversés comme l'homéopathie « sont une excellente occasion, pour les étudiants, d'exercer leur esprit critique, a-t-il souligné. Cependant, dès que les études scientifiques sur son efficacité donnent un résultat négatif, ils m'accusent d'être trop critique ! ». Le fait qu'un traitement ait une longue tradition ne signifie pas nécessairement qu'il fonctionne, et la médecine fondée sur des données probantes (evidence-based medicine) est essentielle pour le bien-être de l'animal, a rappelé l'intervenant. Soulignons qu'en Suède, les médecins ont l'interdiction d'utiliser des traitements homéopathiques chez les enfants, et les vétérinaires chez les animaux.

L'assemblée générale de Stockholm a permis d'aborder bien d'autres sujets, de la stratégie communautaire en matière de santé animale au bien-être des animaux à l'abattoir en passant par la disponibilité des médicaments ou l'évaluation des écoles vétérinaires. Tjeerd Jorna, président de l'Association mondiale vétérinaire (AMV)(2), a notamment rappelé la prochaine conférence de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) sur l'enseignement vétérinaire, du 12 au 14 octobre à Paris. Pour sa part, l'UEVP se réunira de nouveau en assemblée générale à Bruxelles (Belgique) les 13 et 14 novembre 2009, puis à Bâle (Suisse) du 10 au 12 juin 2010.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1357 du 24/4/2009 en page 14.

  • (2) L'AMV a accepté unanimement l'offre de la FVE de gérer son secrétariat, à partir du 1er/1/2010.

Présidence suédoise

La Suède présidera l'Union européenne à compter du 1er juillet prochain. Invité d'honneur, Leif Denneberg, chef des services vétérinaires suédois, a présenté ses priorités. Dans le domaine agricole, la présidence suédoise se focalisera sur l'impact du changement climatique, la lutte contre la faim dans le monde et le bien-être animal (chez les animaux de rente, de laboratoire, de boucherie, mais également l'étiquetage et la protection des animaux pendant le transport). « Ce sont les axes définis, mais il faut savoir faire preuve de flexibilité. Des crises peuvent survenir à tout moment », a-t-il rappelé, citant la menace pandémique due au virus H1N1 et la crise économique.

K. de L.
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