Les encéphalites n'ont pas toutes une issue défavorable - La Semaine Vétérinaire n° 1362 du 29/05/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1362 du 29/05/2009

Neurologie

Formation continue

Animaux de compagnie

Auteur(s) : Gwenaël Outters

Les corticoïdes sont indispensables à leur prise en charge, même lors d'origine bactérienne, car ils diminuent les lésions et permettent une meilleure diffusion de l'antibiotique.

Les encéphalites étaient traditionnellement abordées avec gravité, en raison d'un pronostic souvent sombre, avec 100 % de mortalité lors d'encéphalites associées à la rage et à la maladie d'Aujeszky, une forte mortalité pour les encéphalites liées à la maladie de Carré ou à la péritonite infectieuse féline (PIF). D'autres encéphalites sont désormais reconnues, dont certaines ont un pronostic d'évolution nettement plus favorable.

Les encéphalites infectieuses n'ont pas disparu, en particulier celles d'origine virale (rage, PIF, maladie de Carré). Concernant la rage, les événements récents ont une nouvelle fois démontré la grande vigilance dont les praticiens doivent faire preuve. Devant toute encéphalite à l'évolution aiguë, il faut se renseigner sur les déplacements de l'animal. La maladie de Carré est également toujours présente chez les chiens non vaccinés, voire vaccinés, dans sa forme traditionnelle, mais également dans d'autres, nerveuses. La forme sèche de la péritonite infectieuse féline est au premier rang des encéphalites chez le chat. Les virus immunodépresseurs arrivent loin derrière parmi les causes infectieuses d'encéphalite du chat. Celui de l'immunodéficience féline (FIV) peut se développer directement dans l'encéphale et provoquer une encéphalite.

Les virus dits “émergents” sont peu présents dans les cliniques françaises. Ils provoquent peu de morbidité et de mortalité. Ils sont cependant intéressants dans la mesure où ils illustrent la notion de rupture de la barrière d'espèce. Ces virus sont connus dans d'autres espèces, notamment chez l'homme (virus West-Nile, henipavirus, virus de la maladie de Borna).

Chez le chat, un nouveau groupe a été identifié, rassemblé sous le nom de méningo-encéphalites virales non associées à la péritonite infectieuse féline. Leur pronostic d'évolution semble nettement plus favorable.

Les encéphalites bactériennes sont liées à l'extension d'un processus infectieux

Les encéphalites bactériennes sont peu nombreuses. Elles proviennent généralement d'un foyer infectieux de voisinage ou à distance, qui a disséminé par voie hématogène. Il convient ainsi de penser aux complications potentielles des otites et les prévenir systématiquement lors d'épisodes à répétition. Il existe en outre des encéphalites parasitaires. Un cas lié à la migration larvaire d'angiostrongylose a été récemment observé. Des encéphalites associées à la toxoplasmose ou à la néosporose sont aussi décrites, mais elles sont rares.

Les encéphalites non infectieuses sont les plus fréquentes

Les encéphalites non infectieuses représentent la catégorie numériquement majeure. Leur pronostic est moins sombre. Il s'agit de syndromes dont la terminologie est encore mal définie. Leur dénomination fait référence à la localisation de la lésion (méningite, méningo-encéphalite), au caractère histologique (granulomateuse ou nécrosante), cytologique (suppurée, neutrophilique, éosinophilique) ou aux races préférentiellement atteintes.

La méningo-encéphalomyélite granulomateuse est fatale sans traitement

Les méningo-encéphalomyélites granulomateuses concernent principalement le chien. Elles sont caractérisées par une inflammation non suppurée qui prend la forme de granulomes isolés ou nombreux dans le système nerveux central. Il s'agit d'une maladie relativement bien identifiée, dans le monde entier, et qui représente, selon les publications, 5 à 25 % des encéphalopathies du chien.

Il existe une prédisposition raciale nette, avec une atteinte des races petites et moyennes, parmi lesquelles arrivent en tête les terriers et les caniches. Les individus touchés sont préférentiellement des jeunes adultes, avec une moyenne d'âge de cinq ans. Il s'agit plutôt de femelles. Des formes oculaire, focale et multifocale sont décrites. Les symptômes reflètent la distribution des lésions. L'évolution est aiguë et progressive. Cette maladie a une issue fatale en l'absence de traitement. L'imagerie ne suffit pas au diagnostic. La ponction de liquide céphalorachidien est indispensable pour mettre en évidence le caractère inflammatoire de l'affection : protéinorachie, pléiocytose modérée à dominante lymphocytaire. Le caractère immunopathologique de la maladie est maintenant admis, en raison de la présence d'anticorps anti-astrocytes et anti-GFAP (protéine des cellules gliales). Les scientifiques ignorent cependant si ces anticorps sont la cause ou la conséquence de la maladie. Ces caractéristiques conduisent à un traitement fondé sur l'administration de corticoïdes à dose immunosuppressive.

Les méningo-encéphalites nécrosantes touchent les chiens de race de petite taille…

La méningo-encéphalite nécrosante du carlin est caractérisée par les lésions inflammatoires et nécrotiques des méninges vers le cortex, avec une disparition de la limite entre la substance grise et la substance blanche. Elle touche de jeunes adultes des deux sexes. Les lésions étant périphériques au niveau des méninges, les symptômes sont souvent dominés par des crises convulsives. Le liquide céphalorachidien présente des signes d'inflammation (protéinorachie, pléiocytose mononucléée). Des formes similaires sont décrites chez le bichon maltais, le pékinois ou le boston terrier. Une méningo-encéphalite nécrosante est également observée chez le yorkshire, dont la description est quelque peu différente, ainsi que chez le chihuahua, le shitsu et le bouledogue français. Toutes ces encéphalites nécrosantes sont dues à des désordres immunopathologiques, mais répondent mal à la corticothérapie, en raison de la présence de zones nécrosées. Parmi les hypothèses étiologiques émises, une sensibilité particulière des races concernées à des argents infectieux (herpès virus) ou une fragilité astrocytaire génétiquement déterminée sont évoquées.

… contrairement au syndrome méningite aseptique

Le syndrome méningite aseptique du chien touche le même créneau d'âge, mais chez d'autres races. Il est observé chez des races de grande taille comme le bouvier bernois, les braques (allemand, de Weimar), le labrador et le boxer. Cliniquement, il se caractérise par un syndrome méningé, c'est-à-dire une cervicalgie et un syndrome fébrile. Les chiens atteints présentent rarement des symptômes nerveux majeurs. La ponction de liquide céphalorachidien se caractérise par une forte pléiocytose neutrophilique (d'où, parfois, l'appellation de méningite suppurée) et l'absence de germe.

Avec la mise en place d'une corticothérapie, l'évolution de ce syndrome est régulièrement favorable chez le labrador et le boxer, mais pas chez le bouvier bernois qui présente des rechutes fréquentes.

D'autres formes de ce syndrome sont décrites, comme les méningo-encéphalites éosinophiliques.

L'encéphalite des petits chiens blancs se caractérise par des tremblements continuels avec quelques vagues symptômes d'ataxie. Il s'agit davantage d'une cérébellite, marquée parfois par une hypermétrie.

Un certain nombre d'encéphalites sont répertoriées sous la dénomination “X”, en raison de leur caractère inclassable. Elles peuvent répondre favorablement à une thérapie symptomatique. La polio-encéphalomyélite du chat est de plus mauvais pronostic. Elle se caractérise par une atteinte diffuse dans l'ensemble du système nerveux central au niveau de la substance grise. Les symptômes sont variés, avec des crises convulsives, une dépression, de la stupeur, etc. Son évolution est plutôt chronique progressive. Une implication virale est fortement suspectée, au moins au départ.

La thérapeutique anti-inflammatoire est incontournable

Lors de suspicion d'encéphalite bactérienne, par exemple liée à une otite, l'idéal est de traiter selon les résultats de l'antibiogramme. Si ce n'est pas possible, il faut choisir une famille d'antibiotiques qui pénètre dans le système nerveux central (chloramphénicol ou sulfamides potentialisés). Lors d'inflammation, la barrière hémato-méningée est plus perméable et les -lactamines peuvent également être prescrites. Pour accélérer leur efficacité, il est conseillé de les administrer par voie intraveineuse en phase d'attaque du traitement. Les corticoïdes sont indispensables, même lors d'encéphalites bactériennes, car ils diminuent les lésions et permettent une meilleure diffusion de l'antibiotique. Ils sont aussi administrés par voie intraveineuse au début du traitement. Pour les encéphalites supposées immunopathologiques, l'objectif est l'immunosuppression. L'administration de corticoïdes doit donc être rapide, forte et sur une longue durée. Le risque de rechute existe cependant.

L'utilisation de prednisolone à dose immunosuppressive est envisageable, selon un protocole de corticothérapie à jours alternés (4 mg/ kg/j les deux premières semaines, 2 mg/kg/j les deux suivantes, 1 mg/kg/j pendant encore deux semaines, 0,5 mg/kg/j pendant deux semaines et enfin 0,5 mg/kg un jour sur deux pendant quatre à huit semaines). L'analyse du liquide céphalorachidien est le seul moyen de savoir, de façon non arbitraire, si les doses peuvent être diminuées. Il est parfois impossible de le mettre en pratique, d'où la proposition de ce protocole. Afin de s'affranchir des effets secondaires des corticoïdes administrés à ces doses, pendant d'aussi longues périodes, d'autres possibilités de traitement ont été envisagées. Des molécules sont citées seules ou en association, comme la cytosine arabinoside, la cyclosporine, la lomustine, la procarbazine.

Le praticien, qui doit garder à l'esprit les “vieilles” encéphalites infectieuses à l'évolution souvent dramatique, en découvre de “nouvelles”, actuellement majoritaires en termes de cas, dont le pronostic est souvent favorable et pour lesquelles l'administration de corticoïdes à dose immunosuppressive est réellement indiquée.

CONFÉRENCIÈRE

Dominique Fanuel-Barret, service de médecine interne des animaux de compagnie, école vétérinaire de Nantes.

Article rédigé d'après la conférence « Encéphalites : rarement infectieuses… », présentée au congrès de l'Afvac 2008, à Strasbourg.

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