Divers facteurs contribuent au développement de la cellulite du poulet de chair - La Semaine Vétérinaire n° 1354 du 03/04/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1354 du 03/04/2009

Elevage avicole

Formation continue

FILIÈRES

Auteur(s) : Karim Adjou*, Khaled Kaboudi**

La cellulite est une maladie secondaire à l'infection (par des souches d'E. coli principalement) d'égratignures profondes, qui se produit en fin d'élevage chez des poulets dont la peau est insuffisamment protégée.

La cellulite, également appelée processus inflammatoire (inflammatory process), est une maladie souvent diagnostiquée chez les poulets de chair dans les abattoirs. Elle se caractérise par un épaississement jaunâtre de la peau et la présence d'un exsudat fibrinocaséeux dans les tissus sous-jacents. Cette affection est décrite pour la première fois en 1976, en Grande-Bretagne, comme une “nouvelle” maladie de la peau chez les volailles, lorsque des lésions marquent occasionnellement les carcasses de poulets dans les abattoirs. Par la suite, une “dermite profonde” analogue, dont la prévalence augmente rapidement, est décrite en Allemagne, en France et aux Etats-Unis, sous le nom de dermite nécrotique.

La cellulite engendre des pertes substantielles dans l'industrie du poulet de chair, en raison des saisies à l'abattoir. Elle représente 30 % des causes de saisies des viandes de volaille.

Une composante microbienne est souvent incriminée dans cette maladie dont l'étiologie est multifactorielle, complétée par d'autres facteurs favorisants et/ou aggravants. Ces derniers sont à prendre en compte dans la prévention de l'affection.

E. coli est retrouvé dans 80 à 100 % des lésions de cellulite

Différentes espèces bactériennes ont été isolées et cultivées à partir des lésions de cellulite. Cependant, Escherichia coli se démarque des autres par sa fréquence et sa constance. Selon diverses études, E. coli est retrouvé dans 80 à 100 % des lésions écouvillonnées et il s'agit souvent de la seule espèce bactérienne présente. Cette constance et le succès obtenu dans la reproduction expérimentale de la maladie avec E. coli isolé de lésions de cellulite rendent son implication dans le développement lésionnel presque certaine. Les organes profonds du poulet sont rarement contaminés.

Le sérotypage des souches d'E. coli montre que le sérotype O78 domine, suivi du O2 et du O1. De nombreux autres ont également été identifiés. L'étude des biotypes et des profils d'antibiorésistance met en évidence une assez grande variété, bien que Peighambari et son équipe (1995) soulignent une multirésistance exprimée par les souches isolées. Ces quelques données sur les souches impliquées dans la cellulite ressemblent à celles qui ont été rapportées dans le cadre des autres colibacilloses.

Outre E. coli, plusieurs autres germes ont été isolés à partir des lésions de cellulite, agissant seuls ou, le plus souvent, en synergie. Il s'agit généralement de Streptococcus dysgalactiae, Staphylococcus aureus, Pasteurella multocida, Manhemia haemolytica, Lactobacillus spp. et Proteus vulgaris.

Les facteurs de risque impliqués concernent l'animal et les conditions d'élevage

Bien que la présence d'E. coli apparaisse essentielle au développement de la cellulite, les résultats d'études et de sondages réalisés en Europe, au Canada et aux Etats-Unis semblent indiquer que la cellulite aurait une origine multifactorielle. Des facteurs de risque hypothétiques ont donc été proposés ; certains reliés à la gestion des couvoirs et d'autres à celle des élevages.

• Les facteurs liés à l'animal

Le premier est la croissance rapide. La production du poulet de chair est en effet fondée sur l'utilisation de souches d'animaux à croissance rapide. Cette dernière s'accompagne souvent de problèmes d'ascite et de valgus qui semblent également favoriser l'apparition des cellulites. De même, les animaux élevés selon un mode intensif ont un abdomen proéminent, ce qui les expose davantage à la litière, par conséquent aux blessures. Vaillancourt et Barnes (2003) évoquaient également l'influence de la nervosité importante observée chez certaines souches de poulet. Ce comportement agressif augmente certainement le risque d'égratignures et de blessures cutanées chez les oiseaux.

Le deuxième facteur de risque est l'état d'emplumement. Les plumes protègent la peau contre diverses agressions. Toute anomalie de l'emplumement conduit à exposer davantage les animaux aux blessures, donc aux cellulites. Cela peut justifier la corrélation positive entre les lésions de cellulite et le mauvais emplumement, établie par Elfadil et son équipe (1996).

L'influence du sexe dans le développement des cellulites est aussi évoquée. Le mâle semble ainsi plus exposé que la femelle à la maladie. Cette observation est à mettre en rapport avec la vitesse de l'emplumement, plus lente chez les oiseaux mâles, qui présentent en outre une agressivité et un poids supérieurs.

• Les facteurs liés à l'élevage

Le premier est la litière. Dans les poulaillers où elle est de mauvaise qualité, humide et croûtée, le risque de cellulite est multiplié par trois. En effet, il ne semble pas possible de distinguer les colibacilles qui proviennent de la litière et ceux isolés à partir des carcasses de poulets en se fondant sur le biotypage, ce qui suggère que la litière reste la principale source de germe impliquée dans les cellulites. L'augmentation de l'humidité de la litière peut être due au type d'abreuvoirs présents. Pour une litière plus sèche, les tétines sont à préférer aux auges.

La densité constitue également un facteur de risque au niveau de l'élevage. Lorsqu'elle est supérieure à 27 kg/m2, les animaux ont plus de risque de développer la cellulite que les volatiles élevés à une moindre densité. D'autres variables associées à ce facteur peuvent aussi être impliquées dans le développement de la maladie, comme les conditions d'élevage qui favorisent les comportements compétitifs entre les poulets, notamment au niveau des mangeoires et des abreuvoirs. Elles augmentent d'ailleurs le contact entre les volatiles.

Le programme lumineux est également à considérer. Certains suggèrent qu'un allumage intermittent représente un risque potentiel, car les oiseaux se dirigent tous en même temps vers les mangeoires lorsque la lumière s'allume.

Pour sa part, le rôle de l'alimentation dans l'apparition des lésions de cellulite n'est pas bien élucidé. Cependant, la composition de la ration semble intervenir indirectement. Ainsi, une carence en acides aminés, notamment en cystéine et en méthionine, incite les animaux à la nervosité et à l'excitation, et entraîne un mauvais emplumement chez les poulets. De même, une ration énergétique favorise le dépôt de graisse au niveau de la peau qui devient plus sensible aux égratignures et aux lésions.

La pression d'infection et les infections intercurrentes sont le dernier facteur de risque suggéré au niveau de l'élevage. Une mauvaise désinfection du bâtiment avant l'arrivée des poussins aura pour conséquence une plus ample pression d'infection environnementale en faveur de l'apparition de cellulite.

Par ailleurs, l'incidence de la maladie concorde avec les polysérosites et d'autres affections systémiques. Dans ce même contexte, Elfadil et son équipe (1996) ont constaté l'association de la cellulite avec des lésions de l'abdomen, des cas d'ascite et de la cyanose.

L'ancienneté des lésions oriente la prévention

L'absence de traitement de la cellulite s'explique par l'occurrence ubiquitaire d'E. coli. La prévention reste alors le seul moyen de contrôle.

L'identification du type des lésions observées peut orienter les grandes lignes de la prophylaxie. En effet, la mise en évidence de lésions aiguës, avec un fluide séro-sanguinolent, témoigne d'une infection récente, par exemple à la faveur d'un transport sur une longue distance (pour l'abattoir). En revanche, des lésions caséeuses chroniques, qui s'installent vingt-quatre heures après l'infection, conduisent à suspecter que l'origine du problème se trouve dans l'élevage. Des mesures préventives doivent alors être mises en œuvre.

La prévention de l'apparition de la cellulite dans un élevage de poulets de chair passe nécessairement par la bonne maîtrise de sa conduite. L'utilisation d'une litière de qualité est également indispensable, tout en limitant le dégagement d'ammoniac par le maintien d'un pH inférieur à 7. Le traitement de la litière reste envisageable pour réduire l'incidence de la cellulite.

La maîtrise de l'ambiance dans les bâtiments est un point crucial pour limiter les facteurs de risque qui conduisent à l'installation des lésions “primaires”, porte d'entrée des germes.

Le recours aux traitements préventifs est aussi rapporté. Dans ce cas, l'administration de certaines vitamines, par exemple l'ajout de vitamine E dans la ration, prévient l'apparition de la cellulite. L'expérience conduite par Downs et son équipe en 2000 met en évidence une amélioration statistiquement significative du nombre de poulets sans cellulite (62 %) recevant une ration alimentaire avec 48 UI de vitamine E/kg et 40 ppm de zinc, par rapport au lot témoin non traité (tous les animaux présentaient des égratignures provoquées au niveau du derme de l'abdomen afin d'inciter l'apparition de cellulite). Cela pourrait s'expliquer par le rôle que jouent la vitamine E et le zinc dans le bon développement de l'immunité et la maintenance de la qualité de la peau.

  • La bibliographie de cet article est disponible sur WK-Vet.fr (rubrique “Semaine Vétérinaire” puis “Compléments d'articles”).

Description macroscopique

La cellulite est une affection qui concerne particulièrement l'inspection des viandes. En effet, les signes cliniques sont absents durant l'élevage des poulets. Les lésions de dermite, accompagnée d'une accumulation sous-cutanée d'exsudat caséeux, sont généralement masquées par les plumes. En outre, l'état général des oiseaux reste bon. Ce n'est qu'à l'abattoir, après la plumaison, qu'elles sont observées. Les lésions présentent des caractéristiques communes, mais leur niveau de sévérité varie. Elles se localisent principalement dans la région péricloacale (83 %), où un épaississement cutané et une décoloration cutanée jaunâtre à jaune citrin sont observés. Des lésions similaires peuvent être notées sur le dos de l'animal et la face latérale des cuisses.

La mise en évidence de lésions périombilicales à l'abattoir suppose l'éventuelle infection de l'ombilic chez les poussins à la suite d'une défaillance de contrôle au couvoir. Il s'agit alors d'une cellulite de “type 1”. Elle a été reproduite expérimentalement en frottant les nombrils mal fermés de poussins avec des cultures d'E. coli. La cellulite de “type 2” est la résultante de la contamination d'égratignures que les oiseaux s'infligeraient entre eux pendant l'élevage.

Quel que soit le type de cellulite, l'incision cutanée révèle des lésions exsudatives moyennes de 1 à 12 m de diamètre. L'espace sous-cutané au niveau de la lésion est en général occupé, totalement ou en partie, par un exsudat ou une combinaison d'exsudats variant de séreux à fibrino-caséeux. Il est organisé le plus souvent en plaques libres dans l'espace sous-cutané. Des pétéchies ou des suffusions marquent les surfaces musculaires dans les zones affectées.

K. A. et K. K.
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