Un vent de modernité souffle sur la pratique vétérinaire irlandaise - La Semaine Vétérinaire n° 1350 du 06/03/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1350 du 06/03/2009

Irlande

Éclairage

INTERNATIONAL

Auteur(s) : Valérie Teppe

Avec une croissance économique sans précédent, le pays a subi une profonde mutation, qui touche également la profession vétérinaire.

Patrick Jones, vétérinaire dans la banlieue de Dublin (Irlande), aurait-il pensé il y a dix ans que son métier et sa vie changeraient autant ? « Depuis quelques années, la pratique en clientèle mixte s’est modifiée de manière drastique. Il y a huit ans, sur une journée de travail, nous recevions huit appels en rurale pour deux consultations en canine. Actuellement, la tendance s’est inversée, avec plutôt huit à dix consultations en canine pour une ou deux en rurale. » La profession en terre celte s’est aussi féminisée. Les femmes représentent environ 80 % des jeunes diplômés de l’UCD (l’école vétérinaire irlandaise basée à Dublin), ouverte en 2002. Longtemps resté un pays agricole, l’Irlande a tiré son épingle du jeu économique en devenant l’un des Etats les plus riches et prospères de l’Europe. Beaucoup de paysans se sont reconvertis, vendant leurs terres pour une fortune. Elles deviennent alors des zones commerciales, des zones industrielles, ou forment de nouveaux quartiers autour des villes.

De la rurale vers la canine

Dans ce contexte, le métier de vétérinaire a changé durant la dernière décennie. Ainsi, il ne travaillait qu’en rurale et ne soignait qu’occasionnellement le chien ou le chat de la ferme. Désormais, des cliniques canines toutes neuves fleurissent dans les villes. L’animal de compagnie est en plein essor. Les Irlandais vaccinent leur chien, le vermifugent, le traitent contre les parasites. Souvent, les propriétaires inexpérimentés viennent à la clinique pour confier au praticien ces actes élémentaires. « Les clients sont devenus plus exigeants en matière d’équipement et de soins et ils sont disposés à payer pour un travail sérieux », constate un praticien dublinois. Et Patrick Jones de renchérir : « Le nombre de fermes laitières a diminué. Les troupeaux comptent maintenant quelque quatre-vingts bêtes, alors qu’auparavant les fermes de quarante à cinquante vaches constituaient notre principale clientèle. Depuis peu, les vétérinaires doivent aussi investir dans des équipements coûteux et sont parfois confrontés à une gestion difficile des emplois du temps, par exemple quand un vêlage exige leur présence alors qu’ils sont en consultation à la clinique. »

Un business florissant

La vente de pet-food au sein des cliniques est en plein essor depuis un an. En outre, leurs rayons sont fournis en accessoires divers tels que colliers, laisses, matériel d’éducation, produits d’hygiène et de couchage. Cela représente un volume non négligeable dans le bénéfice des structures.

D’un autre côté, la profession est confrontée à quelques restrictions en matière de médicaments. Les autorisations de mise sur le marché coûtent cher et la petite taille du pays en fait une contrée peu rentable pour les laboratoires pharmaceutiques. Les praticiens doivent se débrouiller avec peu de spécialités.

Le problème des animaux errants

Les vétérinaires travaillent aussi en partenariat avec les sociétés de protection animale locales. Même si les animaux de compagnie sont désormais choyés au sein de la famille, l’Irlande doit faire face à un grave problème de chiens errants. Près de vingt-cinq mille sont abandonnés chaque année et plus de la moitié seront euthanasiés. Les chiens de ferme et de chasse divaguent et donnent naissance à de nombreuses portées sauvages. Les vétérinaires se chargent de soigner les animaux recueillis, les stérilisent et en identifient un maximum pour responsabiliser leurs propriétaires.

Une veille sanitaire minimale

La brucellose et la tuberculose chez les bovins, et un peu la tremblante chez les ovins, tel est le dépistage minimal. Les éleveurs exportent leurs génisses (souvent croisées avec des limousines en raison de leur rusticité et de la facilité du vêlage) en septembre et en octobre.

L’Irlande est actuellement protégée des maladies émergentes. Avec l’épidémie de fièvre catarrhale ovine, les paysans irlandais ont vendu à bon prix leurs bêtes en France et en Italie. Lors de la vente d’une vache, le vétérinaire effectue un dépistage de la brucellose et de la tuberculose. Il envoie en amont une demande au département d’agriculture (direction des services vétérinaires locale) qui vérifie si l’élevage n’a pas eu de résultats positifs pour ces maladies. Un dépistage négatif autorise l’éleveur à vendre dans les trente jours, sinon la transaction est annulée.

Une pénurie palliée par les confrères d’Europe de l’Est

Avec cinq millions d’ovins et six de bovins, il reste du travail pour les vétérinaires ruraux. Or l’évolution de la profession vers la canine pose un problème d’effectifs. Les jeunes diplômés partent souvent faire leurs premières expériences en Angleterre. Les associés ou les salariés se font rares. Le travail est difficile et certaines habitudes ont la vie dure : le vétérinaire est appelé pour tout et n’importe quoi, comme obtenir un produit contre les mammites à 23 h ou une urgence qui ne peut plus attendre une minute, alors que l’animal a traîné toute la journée. Le client veut être servi dans l’instant. Certains praticiens se découragent et quittent l’exercice. Pour faire face à la pénurie, il est fait appel aux étrangers. Beaucoup viennent d’Europe de l’Est. Quelque cinq cents vétérinaires étrangers exercent ainsi en Irlande, sur un effectif total de deux mille cinq cents environ.

  • (1) Données UCD.

CHIFFRES

• 2 545 vétérinaires en république d’Irlande

- 485 dans le service public

- 1 571 dans le secteur privé

• Féminisation(1)

- 2006 : 53 femmes sur 66 diplômés

- 2007 : 53 femmes sur 86 diplômés

- 2008 : 46 femmes sur 69 diplômés

• Auxiliaires

- 1er janvier 2008 : reconnaissance de la profession.

L’ouest irlandais à la traîne

Depuis une vingtaine d’années, l’industrie et les nouvelles technologies ont pris le pas sur l’agriculture, qui représente encore 10,5 % du produit intérieur brut. Le pays compte 143 900 exploitations. Mais dans l’ouest de l’Irlande, l’essor économique a été plus tardif que dans l’est et la région de Dublin, où l’agriculture s’est modernisée. Ainsi, de nombreuses fermes sont devenues des entreprises à grande échelle. Les Irlandais de l’Ouest, eux, ont gardé en moyenne une dizaine de bêtes par exploitation. Ils pratiquent l’agriculture plutôt comme un hobby et sauvegardent ainsi leurs traditions. 47 % des exploitations font moins de 20 ha. A côté, les entreprises s’installent, génèrent de l’argent, des emplois. Etre plombier, charpentier ou taxi est devenu plus rentable pour vivre et nourrir sa famille. Le niveau de vie s’est élevé et avec lui de nouvelles habitudes s’installent.

V. T.
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