L’observance est un travail d’équipe au service de l’animal - La Semaine Vétérinaire n° 1348 du 20/02/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1348 du 20/02/2009

Gestion de clientèle

Gestion

ENTREPRENDRE

Auteur(s) : Philippe Zeltzman

Seuls 23 % des propriétaires d’animaux affectés d’une maladie parodontale de stade II et plus reçoivent une recommandation explicite du praticien.

Les praticiens se font souvent de douces illusions quant à l’observance de leurs recommandations par les clients. Telle est l’une des conclusions d’une étude(1) menée aux Etats-Unis par l’American Animal Hospital Association (AAHA). Les auteurs mettent en évidence le véritable fossé qui existe entre la perception d’une recommandation par le praticien et celle qu’en a le propriétaire. Il s’explique principalement par l’absence de mesure de l’observance dans la plupart des cliniques. Le praticien se fie ainsi à une impression personnelle qui, souvent, se révèle grossièrement fausse. Une situation dommageable, puisque l’observance est ce qui permet à un animal de recevoir ce que le vétérinaire estime être le meilleur traitement.

Pour tenter d’y voir plus clair, l’étude de l’AAHA mesure précisément l’observance dans six domaines : détartrages, aliments thérapeutiques, examens gériatriques, vaccinations, analyses de sang préopératoires et tests pour la dirofilariose (ce dernier thème n’est pas abordé ici).

Le taux d’observance augmenterait lorsque la vie de l’animal est menacée

Les auteurs mettent en évidence plusieurs écueils à l’observance. Ils donnent l’exemple de cent animaux atteints d’embonpoint ou d’obésité. 74 % des praticiens recommandent un aliment de régime. Seuls 30 % des clients acceptent la suggestion. Mais seulement 21 % achètent effectivement l’aliment conseillé. Cela signifie que près de 80 % des animaux ne bénéficient pas des bienfaits de l’aliment de régime. Ces chiffres diminuent de manière notable quand la recommandation est répétée plusieurs fois.

Concernant les vaccinations, une première analyse pourrait expliquer le taux élevé d’observance dans ce domaine par l’envoi de rappels par les praticiens… parfois plusieurs fois de suite. La plupart des propriétaires sont conscients que les vaccins, comme en médecine humaine, protègent contre des maladies mortelles. Le taux d’observance pour les analyses de sang préopératoires (65 à 72 %) n’est pas négligeable. Une nouvelle fois, cela vient probablement du fait que les clients sont informés de l’utilité de cet acte pour réduire la morbidité et la mortalité de leurs animaux une fois anesthésiés.

Il semble donc que le taux d’observance augmente quand la vie de l’animal est potentiellement en danger. En revanche, les clients, et peut-être l’équipe vétérinaire elle-même, ne considèrent probablement pas les conséquences délétères de l’embonpoint ou du tartre sur la santé du chien ou du chat comme un danger imminent.

Les praticiens “oublient” des recommandations pourtant jugées importantes

Les auteurs de l’étude montrent toutefois que cela n’est pas si simple. Souvent, il s’agit d’un manque total de communication, ou en l’occurrence de recommandation. Ainsi, seulement 23 % des propriétaires dont l’animal est affecté d’une maladie parodontale de stade II et plus reçoivent une recommandation explicite du praticien. De même, une prise de sang de dépistage est conseillée à seulement 47 % des propriétaires d’animaux âgés.

Pourquoi tant de praticiens n’offrent-ils pas de recommandations, alors qu’ils sont intrinsèquement convaincus qu’elles sont importantes pour la santé des animaux qu’ils traitent ? Les raisons invoquées sont un défaut de communication, un problème d’éducation et un manque de temps. Ainsi, les vétérinaires ne peuvent communiquer qu’une certaine quantité d’informations au cours d’une même consultation.

L’aspect financier entre peu en ligne de compte pour choisir un vétérinaire

Une autre raison invoquée par les praticiens interrogés est leur conviction que les propriétaires refuseront leur conseil pour des raisons financières. Pourtant, de multiples études menées auprès de propriétaires depuis 1995 révèlent que la plupart considèrent leurs animaux comme des membres de la famille. Par conséquent, ils sont prêts à engager les dépenses nécessaires pour les garder en bonne santé. En outre, ces multiples recherches montrent que l’aspect financier est l’un des critères les moins importants dans le choix d’un vétérinaire ou la détermination du niveau de satisfaction d’un service offert.

Les auteurs de l’étude de l’AAHA ont demandé à des propriétaires de chiens et de chats de choisir entre deux affirmations :

- je veux que mon vétérinaire offre toutes les options thérapeutiques recommandées pour mon animal, même si je ne peux accéder à certaines pour des raisons financières ;

- je veux que mon vétérinaire ne me parle que des traitements recommandés dont il pense qu’ils ne sont pas trop chers pour moi.

Les résultats sont nets : 90 % des clients choisissent la première option.

Le suivi des recommandations du praticien est souvent faible

Certes, il s’agit d’une étude américaine. Or il existe de profondes différences culturelles et économiques entre les Etats-Unis et la France. Le rapport à l’animal est potentiellement différent des deux côtés de l’Atlantique (même si cela reste à démontrer). Il serait donc facile d’ignorer ses résultats. Il est toutefois certainement plus constructif et raisonnable de se pencher sur leur adaptation aux cliniques vétérinaires françaises. Idéalement, le chef d’entreprise curieux pourrait mettre en place un système de mesure de l’observance au sein de sa structure. En effet, l’un des résultats principaux de cette étude n’est pas discutable : le suivi des recommandations du praticien est souvent faible, et la seule façon de s’en assurer est de mesurer objectivement l’observance.

  • (1) « The path to high-quality care. Practical tips for improving compliance », collectif, American Animal Hospital Association, 2003.

Taux d’observance selon les domaines

L’étude de l’American Animal Hospital Association révèle notamment les résultats suivants :

détartrages : 15 % d’observance pour les chiens et les chats atteints de maladie parodontale de stade I, et 35 % lors de stade plus avancé ;

aliments thérapeutiques : 18 % d’observance pour les chats et 19 % pour les chiens. Chez ces derniers, les aliments étudiés concernent les maladies rénales, les calculs urinaires, les allergies alimentaires, les affections gastro-intestinales et l’obésité. S’y ajoutent celles de l’appareil urinaire bas pour les chats ;

examens gériatriques : il s’agit, a minima, d’une prise de sang et d’une analyse d’urine. L’étude indique 32 % d’observance chez le chien et 35 % chez le chat ;

analyses de sang préopératoires : 65 % d’observance chez les chats et 72 % chez les chiens. Dans certaines cliniques, les clients n’ont pas le choix. Une prise de sang préopératoire est exigée (sauf dérogation signée par le propriétaire). Dans ce cas, l’observance est de 90 % ;

vaccinations : 87 % d’observance pour les chiens et les chats vus en consultation au cours de l’année écoulée. L’étude concerne les vaccins “de base”, à l’exclusion du vaccin contre la rage.

Ph. Z.

Travaux pratiques

Pour assurer une bonne observance, des conseillers en management américains pourraient conseiller le scénario suivant :

- le praticien établit un diagnostic d’obésité et conseille à la cliente de nourrir Fifi avec l’aliment de régime X ;

- il communique le dossier médical à son auxiliaire et lui demande de passer en revue les bienfaits de l’aliment avec la propriétaire ;

- l’auxiliaire réaffirme l’intérêt de l’aliment X et explique les raisons d’une transition progressive, pendant dix jours, avec la nourriture habituellement distribuée à l’animal. Au passage, elle confie que son chien a perdu 20 kg grâce à l’aliment X ;

- l’auxiliaire donne le dossier médical à la réceptionniste, qui passe en revue les frais ;

- la réceptionniste, avant d’établir la facture, demande à la cliente si elle préfère un sac de 10 ou de 20 kg. Elle précise que de nombreux clients ont été satisfaits de l’aliment de régime.

L’observance, plus qu’une notion abstraite, doit mettre en jeu tous les membres de l’équipe. La stratégie “maison” pourrait, par exemple, être discutée lors d’une réunion du personnel, éventuellement avec des jeux de rôle, pour que le jour venu, comme disait Boileau, « les mots pour le dire viennent aisément ».

Ph. Z.
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