L’alimentation est primordiale lors d’urolithiases - La Semaine Vétérinaire n° 1347 du 13/02/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1347 du 13/02/2009

Urologie et diététique

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Jérôme Séguéla

Ces calculs représentent 10 à 15 % des atteintes du bas appareil urinaire chez le chat, 18 % chez le chien. Des mesures préventives sont nécessaires pour éviter les récidives.

Les principales urolithiases, ou calculs urinaires, affectent le bas appareil urinaire (localisation vésicale et urétrale). Les calculs d’oxalate de calcium et de phosphate ammoniaco-magnésien (struvites) sont les plus fréquemment rencontrés. Ils représentent 80 à 90 % des calculs du bas appareil urinaire chez le chien et le chat.

Des facteurs de risque semblent favoriser la formation de ces calculs. Ces facteurs sont soit directement liés à l’animal (espèce, race, sexe, âge, stérilisation, mode de vie, obésité, régime alimentaire), soit associés à des affections concomitantes (infection urinaire, anomalie anatomique, traitements médicaux, endocrinopathies, etc.). Ils diffèrent selon le type de calculs.

La présence simultanée de ces facteurs favorisants et de conditions physico-chimiques de sursaturation de l’urine permet, dans un premier temps, une cristallisation spontanée des minéraux présents dans les urines et, dans un second temps, la formation et la croissance de calculs.

Quand le diagnostic d’urolithiase est établi (épidémiologie, examenclinique, analyse d’urine) et la localisation précisée (examens clinique et d’imagerie), une prise en charge thérapeutique s’impose.

La réalimentation est primordiale chez le chat présenté pour obstruction urétrale

Lorsque l’urolithiase est obstructive, une prise en charge d’urgence peut être nécessaire. Une insuffisance rénale aiguë postrénale, puis rénale, peut rapidement se développer si l’animal n’urine pas depuis plusieurs jours.

Après un globe vésical, des lésions irréversibles neurologiques du détrusor, par étirement des fibres nerveuses, peuvent également être observées et entraîner, par la suite, une incontinence neurogène.

La gestion d’un cas d’obstruction urinaire en urgence nécessite un rétablissement de la perméabilité des voies urinaires (par cystocentèse ou sondage urétral), une correction des déséquilibres hydro-électrolytiques (déshydratation, azotémie, hyperkaliémie, acidose) et une prise en charge des troubles cardiaques secondaires aux déséquilibres ioniques.

Une gestion nutritionnelle est également requise. L’animal, dès qu’il est stabilisé, doit être alimenté dans les vingt-quatre heures. Un aliment d’entretien peut être utilisé de façon à couvrir les besoins énergétiques. En cas d’anorexie, une alimentation forcée s’impose : un aliment de phase critique sera alors administré via une sonde naso-œsophagienne. Cette réalimentation est d’autant plus importante chez les chats obèses (prédisposés aux urolithiases obstructives), car une période d’anorexie prolongée dans ce type de cas peut conduire à une lipidose hépatique dont le pronostic est réservé. En dehors du contexte d’urgence, la gestion d’une cristallurie et/ou de calculs à struvites et oxalate de calcium se décompose en un volet médico-chirurgical et un volet nutritionnel.

Un examen cytobactériologique des urines est indispensable en présence de struvites

Le traitement médical d’une cristallurie à struvites dépend de deux facteurs principaux : la présence de calculs et une infection du tractus urinaire. Lors de cristallurie à phosphate ammoniaco-magnésien sans calcul, un lavage vésical (avec un soluté isotonique stérile tiède) et l’instauration d’un régime diététique adapté (acidifiant) sont préconisés.

En présence de calculs de phosphate ammoniaco-magnésien, la dissolution médicale est possible. Le premier examen à réaliser est une analyse cyto-bactériologique des urines prélevées par cystocentèse. Si la culture bactérienne est positive, un traitement antibiotique est à mettre en place selon l’antibiogramme. La dissolution est réalisée entre huit et vingt semaines. Le traitement antibiotique doit être poursuivi pendant un mois après la dissolution des calculs. Un aliment diététique (acidifiant) y est également associé. Si la culture bactérienne est négative, seul le traitement diététique est mis en place et la dissolution est obtenue en deux à quatre semaines.

L’instauration d’une alimentation acidifiante est une contre-indication absolue chez un animal en croissance, car elle empêche la minéralisation osseuse. La prise en charge diététique doit aussi s’accompagner de mesures hygiéniques (voir encadré). L’échec de la dissolution signe soit un problème d’observance de la part du propriétaire, soit une erreur de diagnostic. Exceptionnellement, un traitement chirurgical peut être proposé en première intention en présence d’un calcul de struvites volumineux.

La dissolution des calculs d’oxalate de calcium est impossible médicalement

Lors de cristallurie à oxalate de calcium sans calcul, le traitement consiste en un lavage vésical et l’instauration d’une alimentation adaptée. Leur dissolution est impossible médicalement et une intervention chirurgicale est préconisée pour réaliser leur exérèse. Par la suite, un traitement diététique est instauré, plus ou moins associé à de l’hydrochlorothiazide (diurétique qui diminue la calciurèse, contre-indiqué lors d’hypercalcémie) ou à du citrate de potassium (qui se complexe avec le calcium urinaire et le solubilise).

Dans tous les cas d’urolithiases, un traitement étiologique doit être mis en place si une cause favorisante est détectée (traitement médical ou chirurgical d’un hypercorticisme, traitement chirurgical d’une malformation anatomique vésicale, etc.).

Les mesures nutritionnelles et hygiéniques sont un élément pivot dans la prise en charge thérapeutique et prophylactique des urolithiases. En effet, des récidives sont observées dans 20 à 70 % des cas chez le chien et 19 à 37 % chez le chat. En général, lors de récidives, il s’agit d’un même type de calcul… mais pas toujours !

La diététique vise une diminution de la saturation et une stabilisation du pH

Le traitement nutritionnel ne fait pas systématiquement appel à un aliment spécifique adapté autyped’urolithiase. Eneffet, unaliment d’entretien de bonne qualité (sans indication contre l’urolithiase), associé à des mesures hygiéniques, peut suffire dans un premier temps. En revanche, il convient de réaliser une transition alimentaire progressive, sur plusieurs jours, de préférence chez le propriétaire et non en cage d’hospitalisation, afin d’éviter une aversion alimentaire (surtout chez le chat). Il n’est pas conseillé, notamment chez le chat, de passer d’un aliment humide à un aliment sec, même si ce dernier est indiqué lors d’urolithiase, car cela empêche la dilution des urines. Mieux vaut poursuivre avec l’aliment humide.

Le traitement nutritionnel a deux principaux objectifs. Le premier est de diminuer la saturation de l’urine. Pour cela, il convient d’augmenter le volume urinaire et de diluer les urines en favorisant la prise d’eau. Il faut limiter la stase urinaire en favorisant les mictions et couvrir les besoins nutritionnels sans excès afin de restreindre les déchets métaboliques dans les urines. Le second objectif est de stabiliser le pH urinaire. Pour cela, il faut éviter les variations de pH en fractionnant les repas : il existe une alcalinisation postprandiale des urines plus importante chez un animal nourri une seule fois dans la journée que chez un autre nourri ad libitum. L’aliment doit également être de bonne qualité pour assurer une composition stable dans le temps. Pour la dissolution de calculs de struvites, des acidifiants urinaires peuvent être prescrits sous forme d’aliment diététique (pendant un temps limité et contrôlé) ou d’acide phosphorique si le pH reste élevé (supérieur à 6,5) malgré les mesures diététiques. Pour éviter les récidives, la prescription doit être surveillée. Des contrôles cliniques et biologiques seront réalisés régulièrement (tous les deux à quatre mois). Le poids et l’état corporel sont à évaluer. La densité urinaire doit rester inférieure à 1,020 chez le chien et 1,025 à 1,030 chez le chat pour éviter la saturation de l’urine. Le culot urinaire doit permettre de réévaluer et de quantifier la cristallurie et de mettre en évidence une infection du tractus urinaire.

La physiopathologie des urolithiases chez les carnivores domestiques est complexe et dépend de nombreux facteurs. Il est essentiel de progresser avec méthode, sur le plan diagnostique, mais surtout sur le plan thérapeutique. L’alimentation, associée ou non à un traitement médico-chirurgical, est d’une importance majeure dans la prise en charge thérapeutique et prophylactique des calculs de struvites et d’oxalate de calcium.

Mesures hygiéniques

• Mesures pour favoriser la prise de boisson :

chez le chat : multiplier les points d’eau (fontaines, robinet, aquarium, etc.) ;

- chez le chien : humidifier les croquettes ;

- chez le chat et les petits chiens : utiliser un aliment humide ;

- augmenter l’activité physique de l’animal (jeux, promenades, etc.).

• Mesures pour favoriser les mictions :

- augmenter le nombre de litières (en théorie, n + 1 litière pour n chats) ;

- augmenter le nombre de courtes sorties chez le chien.

• Mesures pour couvrir les besoins nutritionnels :

- prescrire un aliment de bonne qualité (à formule fixe) ;

- couvrir les besoins d’entretien sans excès.

J. S.

A LIRE DANS LE POINT VÉTÉRINAIRE

• Uro-néphrologie du chat : C. Soyer : « Conduite à tenir devant une obstruction urétrale », PV n° 243, mars 2004.

• Diététique féline : L. Colliard, G. Blanchard, B.-M. Paragon : « Alimentation d’un chat lors d’obstruction urinaire », PV n° 267, juillet 2006.

CONFÉRENCIERS

Laurence Yaguiyan-Colliard, maître de conférences en nutrition à l’ENVA.

Jérôme Séguéla maître de conférences contractuel en médecine interne à l’ENVT.

Article rédigé d’après la conférence « Gestion médicale et nutritionnelle des urolithiases », présentée lors du forum de nutrition organisé par l’ENVT le 18/11/2008 à Toulouse.

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