La relation entre les éleveurs et les vétérinaires semble avoir vécu son âge d’or

La relation entre les éleveurs et les vétérinaires est en pleine mutation. C’est l’une des observations faites par Julie Pouivet dans son mémoire de sociologie, « Evaluer l’impact et l’enjeu des connaissances scientifiques sur les pratiques d’élevage », présenté lors des quinzièmes Rencontres pour la recherche sur les ruminants, les 3 et 4 décembre derniers. Réalisée dans le cadre du programme “action collective pour une maîtrise durable de la santé animale : qualification sanitaire en élevage de ruminants” (Acduq) en lien avec l’école vétérinaire de Nantes, cette étude est fondée sur des entretiens avec les différents intervenants du milieu de l’élevage, effectués entre mars et juin 2008, et sur des observations de terrain. Elle se penche également sur les relations entre éleveurs et praticiens.

Les enjeux commerciaux (marge sur les médicaments, prestations, etc.), la visite sanitaire, les échanges techniques réduits et la perte d’image de la profession vétérinaire, accentuée par l’épisode de la fièvre catarrhale ovine, ont entamé la relation de confiance entre les éleveurs et les praticiens. Mieux formés et plus autonomes, plus critiques et pointus dans leurs attentes, les premiers se mettent à douter du caractère scientifique des discours des seconds et font jouer la concurrence, s’en remettent à leurs propres connaissances ou s’auto-documentent, via l’Internet notamment. « Les petits exploitants qui n’y connaissaient rien et appelaient tout le temps, ça n’existe plus », témoigne un praticien.

Les vétérinaires doivent donc s’ajuster à cette nouvelle génération d’éleveurs, en travaillant « à la reconnaissance des savoirs et des compétences de chacun, et en valorisant les savoirs pratiques, qui sont autant à prendre en compte que les savoirs scientifiques », souligne Julie Pouivet. Le partenariat est la solution qui s’impose pour permettre la prise en compte de la parole et des apports de chacun, limiter les conflits d’intérêts, stabiliser les relations et favoriser la communication et la capacité d’action collective.

Les éleveurs apprécient les formations qui instaurent un vrai lien de communication

Les formations des éleveurs en petits groupes dans une exploitation sont, en outre, particulièrement appréciées. Chacun y expose son point de vue, ses objectifs, ses attentes et ses connaissances. Les exploitants deviennent acteurs de leur parcours professionnel et apprécient ces formations dans lesquelles les vétérinaires travaillent avec eux, et non pour eux, et instaurent un véritable lien de communication. « Ce sont des relations “d’égal à égal”, pour ainsi dire, avec le vétérinaire. C’est vraiment ce que nous recherchons », témoigne l’un d’eux. Etre formé par un intervenant qui dispose de solides connaissances, les expose de façon claire et reste disponible pour répondre à toutes les questions, « sans une relation mercantile sous-jacente », satisfait beaucoup les éleveurs.

Il apparaît donc important que le praticien développe un conseil individuel et sur mesure, qui soit une aide à la décision des exploitants, et s’adapte au profil et aux compétences de chacun. Malgré l’évolution du monde agricole et de ses acteurs, il restera toujours des éleveurs moins formés ou moins autonomes, demandeurs de préconisations simples. S’adapter à la diversité et à la complexité du monde agricole est sans doute un enjeu pour les éleveurs, mais aussi une obligation pour leurs conseillers.