Expert, vous avez dit expert…

On nous pond une nouvelle loi sur les chiens dangereux parce que l’actuelle n’est pas efficace, d’accord. On nous demande de nous former aux évaluations comportementales dans l’urgence pour répondre à la demande que génère cette nouvelle loi, d’accord. Maintenant, on nous conseille de n’évaluer que les chiens des clientèles de nos confrères, mais pas des nôtres, sous prétexte que l’évaluation comportementale est une expertise… du moins pour certains, mais pas pour d’autres. Alors là, plus d’accord !

Ces lois créées à la va-vite (évaluation des chiens de première catégorie avant le 21 décembre 2008, alors que le décret d’application paraît le 10 novembre), pour lesquelles on met la charrue avant les bœufs (les fameuses étiquettes à coller dans les passeports, pour la rage), avec des changements de cap incessants, commencent à me fatiguer sérieusement. Alors que beaucoup de confrères attendaient la promulgation du décret d’application de la loi pour décider de s’investir ou non, quelques-uns, dont je fais partie, avaient décidé de jouer le jeu et de se former, ne serait-cequepoursatisfaireleurs propresclients. Maiscette histoire d’expertise va décourager beaucoup de monde. Désormais, quivoudraseformer uniquement pour évaluer les clients des confrères, mais pas les siens ? « Tout le monde », me rétorquera-t-on, si chacun joue le jeu. Sauf que je ne suis justement pas convaincu que cela soit le cas ! C’est parce qu’ils ne savent pas encore qu’ils ne pourront évaluer que les chiens des autres clientèles. D’ailleurs, en passant, tous les confrères frontaliers ont-ils bien conscience qu’ils ne pourront pas évaluer la clientèle d’un autre département que le leur, même s’il est juste de l’autre côté de la rivière qui coupe leur ville en deux ?

Alors, pourquoi ne pas donner une autre définition de l’expertise, purement intuitive et fondée sur le bon sens ? En effet, un expert est une personne qui est au summum des connaissances. Sa parole ne peut être mise en doute que par un contre-expert, qui se situe au même niveau de connaissances. Moi, vétérinaire généraliste ayant suivi la formation de deux jours qui me donne une compétence particulière pour procéder à une évaluation comportementale, suis-je en haut de l’échelle ? Non ! Comme la formation l’indique, il pourra arriver que le chien évalué présente un comportement pathologique qui m’interdira de conclure et de le classer arbitrairement dans l’un des quatre niveaux de dangerosité sous peine d’avoir failli à l’une des principales règles de l’expertise : la compétence. Et c’est normal, car je ne suis pas comportementaliste. Donc, vers qui renverrai-je le client pour une évaluation définitive ? Vers un vétérinaire comportementaliste dûment diplômé, bien entendu ! C’est lui, et lui seul, qui maîtrise le problème dans sa globalité et qui est à même de trancher définitivement les cas litigieux. Moi, je ne suis là que pour déblayer le tout-venant à ma portée de “généraliste ayant suivi la formation”. Donc, en définitive, et si c’était le vétérinaire comportementaliste l’expert ? Et si on voulait bien me laisser travailler tranquille avec mes clients ? Et mes confrères comportementalistes (à qui je ne veux absolument aucun mal puisque je n’hésite pas à leur référer des cas régulièrement) aussi