Le scanner est déterminant pour la chirurgie orbitaire - La Semaine Vétérinaire n° 1345 du 30/01/2009
La Semaine Vétérinaire n° 1345 du 30/01/2009

Imagerie médicale et ophtalmologie

Formation Continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Pierre-François Isard*, Thomas Dulaurent**, Amandine Savet***

Fonctions :
*service d’ophtalmologie, praticiens au Centre hospitalier vétérinaire Saint-Martin (à Saint-Martin Bellevue, Haute-Savoie).
**service d’ophtalmologie, praticiens au Centre hospitalier vétérinaire Saint-Martin (à Saint-Martin Bellevue, Haute-Savoie).
***service d’imagerie, praticiens au Centre hospitalier vétérinaire Saint-Martin (à Saint-Martin Bellevue, Haute-Savoie).

La fragilité des structures rétrobulbaires rend la chirurgie complexe lors de tumeur de l’orbite. Le scanner permet d’anticiper et de sécuriser l’intervention.

Une chienne berger des Shetland âgée de sept ans est référée pour une exophtalmie gauche qui date de plusieurs semaines. L’œil est prolabé et dévié temporalement, mais reste fonctionnel, comme le confirme une réponse positive aux tests fonctionnels (menace, boule de coton). Les réflexes photomoteurs directs et indirects sont normaux et la sensibilité cornéenne est préservée. La biomicroscopie révèle la présence d’une dystrophie cornéenne calcique (témoin d’une kératite d’exposition) et aucune autre anomalie des structures et des milieux. L’examen ophtalmoscopique indirect montre une indentation sclérale. La pression intra-oculaire est mesurée (Tonovet®). Elle s’élève à 17 mm Hg versus 15 mm pour l’œil adelphe. L’hypothèse diagnostique privilégiée est la présence d’une masse rétrobulbaire. L’échographie oculaire (Oti®, 20 MHz) confirme cette hypothèse et montre en outre une déformation importante de la partie dorsale du pôle postérieur du globe (voir photo 1).

Le scanner permet d’établir le bilan d’extension et la stratégie chirurgicale

Un examen tomodensitométrique est réalisé sous anesthésie générale, avant et après l’injection intraveineuse de liquide de contraste (Omnipaque®), afin de préciser la densité de la masse, d’affiner le pronostic par un bilan d’extension et d’établir une stratégie chirurgicale grâce à une reconstruction tridimensionnelle. La masse apparaît homogène, sans collection liquidienne et la densité est nettement rehaussée par le liquide de contraste (voir photo 2). Le bilan d’extension mené sur le crâne et le thorax est négatif pour cet examen. La reconstruction 3D permet de délimiter la masse qui s’étend postérieurement dans l’orbite, presque jusqu’au foramen optique et à la fente orbitaire (voir photo 3). Le geste chirurgical devra donc être peu agressif et l’abord suffisamment confortable pour permettre une dissection profonde et complète.

Le laser CO2 est utilisé dans le but d’isoler la tumeur

Après une préparation classique du site chirurgical, l’animal est anesthésié selon un protocole qui privilégie l’analgésie : induction avec domitor-kétamine, intubation endotrachéale, relais gazeux avec de l’isoflurane, renforcé par un “cocktail” analgésique morphine-lidocaïne-kétamine en perfusion, sous monitorage classique (saturation O2, capnographie, ECG). La peau et le tissu conjonctif sous-cutané sont incisés au laser CO2, en regard du ligament orbitaire. Celui-ci est isolé et ses attaches osseuses sont sectionnées, également au laser CO2. La tumeur ainsi libérée fait alors spontanément saillie entre les marges de l’incision, qui est maintenue béante par un écarteur orthostatique de Gelpi.

Relativement compacte et peu infiltrante pour les tissus environnants, la lésion est disséquée aux ciseaux de Hartman, utilisés en contre-effets. L’approche des structures fragiles (vaisseaux, nerfs et muscles extra-oculaires) se fait en les repoussant à l’aide de cotons-tiges stériles, sous contrôle du microscope opératoire. L’œil est délicatement repoussé par des écarteurs de Senn, pendant que la dissection mousse se poursuit jusqu’au plancher de l’orbite. Une hémostase prudente est réalisée en diathermie et la tumeur est finalement extraite en une seule pièce (voir photo 4), sans lésion apparente des structures voisines.

Le scanner a permis de réaliser une intervention chirurgicale précise

Le ligament orbitaire est réinséré par deux sutures en X réalisées au monofilament de nylon 3/0 (Prolène®). Le tissu conjonctif sous-cutané est rapproché par un surjet résorbable 5/0 (Vicryl®) et la peau suturée par des points simples au monofilament de nylon 3/0 (Prolène®). Le traitement antalgique est poursuivi jusqu’au réveil complet. Un traitement anti-inflammatoire (AINS) est poursuivi pendant six jours.

Quinze jours après l’intervention, la cicatrisation est effective. L’œil opéré est calme et a retrouvé une position normale. La vision est préservée (voir photo 5). Quarante-cinq jours après l’opération, la cicatrice cutanée n’est plus discernable, l’œil fonctionne normalement. Seule persiste la lésion cornéenne, peu invalidante. L’histopathologie conclut à un sarcome à cellules fusiformes, de type schwannome (tumeur développée à partir des gaines nerveuses). L’exérèse paraît complète pour cette tumeur de malignité locale élevée qui, par ailleurs, ne justifie pas de chimiothérapie.

Dans ce cas, l’examen tomodensitométrique préopératoire a permis une localisation précise de la lésion et de ses rapports anatomiques, autorisant ainsi la réalisation d’une exérèse complète qui respecte les structures indispensables au fonctionnement normal du globe oculaire.

Etiologie de l’exophtalmie

• Origine rétrobulbaire :

– néoplasmes, primaires ou secondaires (voir photo 6) ;

– cellulites/abcès (voir photo 7) ;

– sialocoele d’origine zygomatique ;

– kyste lacrymal

– hématomes/hémorragies/œdèmes

• Origine extraorbitaire :

– néoplasmes (d’origine osseuse, sinusale, nasale, orale, nerveuse)

– cellulites/abcès (voir photo 8).

• Origine nerveuse : syndrome de Pourfour du Petit (rare)

• Autres :

– myosite des muscles oculomoteurs ;

– myosite des muscles masticateurs.

L’examen clinique permet une orientation diagnostique qui peut être validée par des examens cytologique, échographique, radiographique et tomodensitométrique.

L’hydrophtalmie, augmentation de volume du globe oculaire, doit être différenciée cliniquement de l’exophtalmie.

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