Les ulcères cornéens sont des sources de complications - La Semaine Vétérinaire n° 1338 du 05/12/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1338 du 05/12/2008

Ophtalmologie

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Marie Sigaud

Les ulcères à collagénases représentent de véritables urgences médicales.

L’ulcère cornéen correspond à une exposition ou à une perte du stroma cornéen à la suite d’une rupture de l’épithélium cornéen. Il s’agit de l’une des affections oculaires les plus fréquentes chez les carnivores domestiques. Ses causes, diverses, sont le plus souvent traumatiques. Les symptômes sont variés. Une douleur oculaire peut être observée, ainsi qu’une modification des sécrétions oculaires, une hyperhémie conjonctivale, des signes de kératite et d’uvéite antérieure. La douleur oculaire peut être un signe d’appel trompeur pour évaluer la gravité de la lésion. En général, elle est inversement proportionnelle à la gravité de l’ulcère (plus intense lorsqu’il est superficiel). Les sécrétions oculaires, quand elles sont purulentes, traduisent un risque infectieux pouvant mener à un ulcère à collagénases. L’œdème stromal, la néovascularisation et la pigmentation sont autant d’indications d’une kératite (voir photo 1). Les signes d’uvéite antérieure (myosis, iritis, effet tyndall, hypopion) sont plus inconstants.

Le diagnostic clinique, qui consiste à instiller de la fluorescéine sur la cornée lésée, est assez aisé à réaliser et à interpréter, quel que soit le type d’ulcère. La fluorescéine, grâce à son caractère hydrophile, se fixe sur le stroma cornéen et pas sur l’épithélium cornéen, ni sur la membrane de Descemet. La seule exception est l’ulcère à collagénases lors duquel une kératomalacie est observée. Elle est généralement assez typique pour éviter le test à la fluorescéine (voir photo 2). En outre, cette dernière donne une coloration verte atténuée en présence de ce type d’ulcère, ce qui peut être difficile à interpréter.

Une antibiothérapie systémique est justifiée lors de perforation

En cas d’ulcère cornéen, le diagnostic étiologique est indispensable et implique un bilan ophtalmologique complet. Le traitement symptomatique a pour but de diminuer la douleur oculaire (collyre cycloplégique) dans un premier temps, de manière à soulager l’animal et à administrer plus facilement le traitement par voie locale. En effet, le blépharospasme, manifestation de la douleur oculaire, limite considérablement l’application de collyre. Le second objectif du traitement consiste à réduire les complications. Pour minimiser le risque d’infection, un antibiotique à large spectre est administré par voie topique. L’œil étant une structure externe de l’organisme, il n’est pas réellement nécessaire d’instaurer une antibiothérapie systémique, sauf en cas de perforation. L’administration locale de molécules qui favorisent la cicatrisation cornéenne (hyaluronate de sodium, vitamines, etc.) est également possible.

Faute de traitement, un ulcère à collagénases conduit à une perforation en quelques heures

La complication principale d’un ulcère infecté est la production d’enzymes protéolytiques par les bactéries, associée à l’activation de protéases endogènes synthétisées par les polynucléaires neutrophiles ou les macrophages et les cellules cornéennes lors du processus de cicatrisation. Ce processus est couramment nommé ulcère à collagénases. Il aboutit à une dégradation rapide du tissu cornéen qui, faute de traitement, mène inévitablement à la perforation en quelques heures (de vingt-quatre à quarante-huit).

Les ulcères à collagénases constituent donc de véritables urgences médicales. Leur prise en charge nécessite la mise en place immédiate d’un traitement intensif et son observance absolue.

Outre un traitement antibiotique adapté par voie topique, c’est-à-dire à large spectre plutôt ciblé vers les Pseudomonas spp. qui favoriseront le processus à collagénases (tobramycine, ciprofloxacine, norfloxacine), des inhibiteurs de collagénases sont également administrés. Pour cela, deux types de solutions sont envisageables. Le premier est d’instiller de la N-acétyl-cystéine à une concentration de 2,5 à 5 % (NAC®) ou du sérum autologue. Ces instillations doivent être réalisées toutes les une à deux heures au cours des premières vingt-quatre heures, condition essentielle à la réussite du traitement. L’autre alternative au traitement médical consiste à recouvrir l’ulcère par la membrane nictitante après la scarification de la face interne de celle-ci. Ce recouvrement est retiré au bout de vingt-quatre heures pour contrôler l’évolution. Une amélioration clinique justifie la poursuite du traitement médical. Au contraire, l’absence d’évolution favorable doit conduire à proposer un traitement chirurgical pour enrayer la progression de la lyse stromale pouvant mener à la perforation.

CONFÉRENCIÈRE

Sabine Chahory, maître de conférences en ophtalmologie à l’ENVA, diplomate de l’European College of Veterinary Ophtalmologists (ECVO).

Article rédigé d’après la conférence « Les ulcères cornéens : échec du traitement médical et complications », présentée lors de la journée de formation sur les échecs thérapeutiques organisée par l’Afvac Ile-de-France, le 18/10/2008 à Paris.

Le sérum autologue

Le sérum autologue est obtenu en prélevant du sang de l’animal (environ 5 ml), qui est mis à décanter quarante-cinq minutes au minimum, puis centrifugé pour ne récupérer que le sérum, à conserver impérativement au réfrigérateur. Toute la séquence de prélèvement doit être faite le plus proprement possible pour ne pas contaminer le sérum. Celui-ci peut être conservé au frais pendant plusieurs jours (au maximum huit, mais il est recommandé de le renouveler tous les quatre à cinq jours). Le sérum autologue contient de nombreux facteurs qui contribuent à la lutte contre la production de collagénases et à la cicatrisation cornéenne : anti-protéolytiques, anti-bactériens, facteurs de croissance, vitamine A.

M. S.
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