La réglisse est indiquée lors de gastrite associée à la présence d’Helicobacter pylori

Le 4^e symposium de phytothérapie vétérinaire s’est déroulé le 18 octobre dernier à Paris. Organisé par le laboratoire Wamine, cet événement a rassemblé environ quatre-vingt-dix vétérinaires et a permis de présenter toutes les facettes de la phytothérapie, qu’il s’agisse de l’utilisation traditionnelle des plantes (comme en médecine chinoise), de leur emploi en médecine moderne, mais aussi du dialogue entre ces deux pôles grâce à la recherche fondamentale, acceptée à la fois par les “anciens” et les “modernes”. Il est étonnant de constater que des cultures médicales aussi différentes que celles des Chinois et des Occidentaux conseillent la prescription du même remède pour les mêmes affections, comme le cassis (Ribes nigrum), exemple abordé par notre confrère Philippe Zeppa.

La matinée a été consacrée essentiellement à la toux et à l’insuffisance cardiaque. Après l’intervention de Jean-Philippe Corlouer sur les bases et les pièges des sémiologies cardiaques et respiratoires, différentes plantes intéressantes dans le traitement des bronchites aiguës ou chroniques et des insuffisances cardiaques ont été présentées.

Chaque plante contient plusieurs principes actifs. L’action globale de la préparation est supérieure à la somme des actions de chaque principe (totum synergique). Les différents constituants de la plante, parfois plus d’une centaine, semblent tous “tendre” vers un unique objectif thérapeutique, ou parfois quelques-uns. Dans ce cas, les principes actifs ne sont jamais contradictoires, même s’ils agissent à différents niveaux de l’organisme. Ainsi, une plante ne peut pas contenir à la fois des composés inotropes positifs et d’autres inotropes négatifs.

Un traitement sous forme d’extraits fluides de plantes fraîches standardisés (EPS) permet de conserver intacts les principes actifs (extraction à froid dans l’alcool). Ils sont mélangés dans une préparation magistrale, prescrite en général à la posologie de 1 ml/10 kg/j chez le chien ou le chat (sans dépasser 5 ml par animal et par jour).

La phytothérapie vise les différents symptômes de l’affection

« Comme en allopathie, la démarche en phytothérapie se fonde avant tout sur un recueil méticuleux de l’anamnèse et un examen clinique attentif », a précisé notre confrère Richard Blostin. Les examens complémentaires ont une place dans le raisonnement diagnostique, en complément de la physiopathologie qui permet d’appréhender les mécanismes en jeu, base du traitement. La démarche diagnostique vise in fine à déterminer des cibles thérapeutiques. Les plantes dont les composants atteignent ces dernières sont ensuite sélectionnées. Ainsi, lors de toux de chenil d’origine virale, les cibles peuvent être l’agent causal (le virus), l’inflammation, l’immunité, la toux et les sécrétions. Le praticien y fait correspondre des plantes (^{voir schéma}). Plusieurs extraits de plantes sont ainsi susceptibles d’être prescrits.

La racine de réglisse peut s’associer à la mélisse, la piloselle ou la canneberge

La racine de réglisse (Glycyrrhiza glabra), dont un EPS a récemment été mis sur le marché, trouve une indication dans le traitement des vomissements, des régurgitations gastro-œsophagiennes et des gastrites chroniques. Cette nouveauté thérapeutique est à mettre en relation avec de récents travaux qui montrent que 60 % des chiens et 90 % des chats vomisseurs hébergent Helicobacter pylori dans leur estomac et présentent une atrophie des muqueuses digestives.

La racine de réglisse possède plusieurs propriétés intéressantes lors de telles affections. L’acide glycyrrhétique a une action anti-ulcéreuse gastrique (augmentation de la sécrétion de mucus et de la durée de vie des cellules épithéliales de l’estomac, inhibition de la sécrétion de pepsinogène et de la multiplication des Helicobacter) et anti-inflammatoire (inhibition de la synthèse des prostaglandines E2). Des polysaccharides sont aussi immunostimulants. La réglisse est donc indiquée en cas de gastrite aiguë ou chronique, avec ou sans la présence d’Helicobacter. Elle peut être associée à la mélisse, la piloselle ou la canneberge dont l’action contre cette bactérie est également démontrée. En raison des effets minéralocorticoïdes de la glycyrrhizine (diminution de la métabolisation de l’aldostérone), la réglisse est contre-indiquée en cas d’hypertension, d’insuffisance cardiaque grave, d’hypokaliémie, d’insuffisance rénale grave et de gestation. Cette plante peut en outre être utilisée à titre curatif ou préventif dans le cadre d’affections respiratoires hautes.

La phytothérapie et l’allopathie sont complémentaires

Les approches thérapeutiques adoptées en phytothérapie et en allopathie ne sont pas incompatibles et peuvent se combiner.

Parallèlement à un traitement allopathique, la phytothérapie peut en potentialiser l’action ou en limiter les effets secondaires. Ainsi, lors d’anaplasmose équine, notre consœur Pascale Ducluzaux utilise systématiquement, outre le traitement antibiotique conventionnel, un EPS dont l’action hépatoprotectrice limite les effets secondaires du traitement. Il peut s’agir de l’association de desmodium (Desmodium adcendens) avec le pissenlit (Taraxacum officinalis) et la fumeterre (Fumaria officinalis).

S’appuyant à la fois sur son emploi traditionnel et sur la recherche scientifique actuelle, la phytothérapie constitue ainsi une corde supplémentaire à l’arc thérapeutique du praticien, en tant que médecine alternative ou complémentaire.